Türkiye
05.06.12
Rapports

Défenseurs des droits de l'homme: coupables jusqu'à preuve du contraire

COMMUNIQUÉDE PRESSE - L'OBSERVATOIRE

TURQUIE : PRESUMÉSCOUPABLES, CRIMINALISATION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME

Publicationd'un rapport d'une mission internationale d'enquête

Le rapport, sous embargojusqu'au 5 juin 2012, 12:01 Heure d'Ankara (9:01 GMT) est disponible en anglaisaux liens suivant :

www.fidh.org/IMG/pdf/obsrapporttr05062012eng.pdf

http://www.omct.org/files/2012/06/21816/obs_mission_report_turkey_hd.pdf

Paris-Genève, le 5 juin 2012. L'Observatoirepour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, un programme conjointde la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et del'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), publie aujourd'hui un rapportintitulé “Turquie : Présumés coupables, la criminalisation des desdéfenseurs des droits de l'Homme”, qui analyse la situation des défenseursdes droits de l'Homme en Turquie.

En dépit des réformes et des avancées majeures de cettedernière décennie, dans la Turquie d'aujourd'hui, ceux qui dénoncent lesviolations des droits de l'Homme dans des domaines « sensibles » sontla cible d'une intense politique de criminalisation. Ces sujets« sensibles » incluent la promotion du droit à la différence (droitdes minorités religieuses ou ethniques, en particulier la question Kurde, etdroit des minorités sexuelles), et la critique de l'État et des institutions(le fonctionnement de ces institutions, notamment l'indépendance de la justiceou l'impunité de l'État et de l'armée en matière de violations de droits del'Homme). Des secteurs clefs de la société civile, active en matière de défensedes droits de l'Homme, sont touchés par cette politique : des membresd'organisations non gouvernementales (ONG) mais aussi des avocats, dessyndicalistes, des journalistes, des intellectuels et des universitaires, desécrivains, des défenseurs du droit à l'objection de conscience ou des membresdes familles des victimes de violations graves, etc.

La criminalisation de leurs activités est rendue possiblepar l'existence de pratiques administratives et de dispositions pénalesrépressives, que les différentes réformes n'ont pas supprimées, notamment dansle Code pénal (Turkish Penal Code – TPC) ou la Loi anti-terrorisme (Anti-TerrorismLaw – ATL). De plus, les autorités chargées de l'application de la loi, lesprocureurs et les juges, depuis longtemps habitués à limiter les droits etlibertés, continuent à interpréter et à appliquer la loi de manière répressive.Ces dernières années, l'ATL, qui implique l'application de règles procéduralesmoins protectrices des droits de la défense, est ainsi de plus en plus utiliséecontre les défenseurs des droits de l'Homme. La définition vague du terrorismeet son interprétation par les tribunaux ont permis aux procureurs et aux jugesde considérer que la simple critique des autorités et de leur action en matièrede droits de l'Homme pouvait, en soi, être considérée comme un soutien à desgroupes terroristes ou comme une preuve de l'appartenance à ces groupes. Lerecours à de longues périodes de détention préventive est fréquent et peut êtreperçu en soi comme une forme de peine, indépendamment du résultat des procès.

Une révision approfondie du système judiciaire turqueest, aujourd'hui, plus que nécessaire afin d'améliorer l'environnementdéterminant l'action des défenseurs des droits de l'Homme. La justice estutilisée comme une arme pour réprimer, intimider et punir les défenseurs desdroits de l'Homme, au travers de procédures pénales violant de manièreflagrante le droit à un procès équitable. Aujourd'hui, de telles pratiquesautoritaires doivent prendre fin”, a affirmé Mme Souhayr Belhassen,présidente de la FIDH.

Au début de l'année 2012, 105 journalistes, 44 avocats, aumoins 16 membres d'organisations de défense des droits de l'Homme et 41syndicalistes étaient toujours emprisonnés, principalement au titred'accusations de terrorisme. Les cas les plus emblématiques tels que ceux de lasociologue Pınar Selek,poursuivie depuis 1998, de l'avocat Muharrem Erbey,détenu depuis décembre 2009, et de l'éditeur RagıpZarakolu détenu pendant plus de cinq mois, ne sont que la partievisible de cette situation déplorable qui prévaut en Turquie.

Nous craignons que cespoursuites pénales continues finissent par mener la société civile à développerun certain degré d'autocensure, précisément au moment où une communauté dedéfenseurs des droits de l'Homme forte et dynamique, opérant sous la protection de la loi, estnécessaire”, a ajouté M. Gerald Staberock, secrétaire général de l'OMCT.

L'Observatoire appellerespectueusement les autorités turques à attacher la plus grande des attentionsà ses recommandations, à entreprendre les démarches nécessaires à la créationet au maintien d'un environnement sûr et propice permettant aux défenseurs desdroits de l'Homme d'opérer librement et efficacement dans le pays, notamment enreconnaissant pleinement le rôle légitime joué par les organisations de défensedes droits de l'homme, en libérant tous les défenseurs détenus du fait de leursactivités en matière de droits de l'Homme, en mettant fin au harcèlementjudiciaire et en menant des enquêtes effectives sur les abus commis àl'encontre des défenseurs des droits de l'Homme.

Pour plus d’informations, veuillez contacter:

· FIDH: Karine Appy / Arthur Manet, + 33 1 43 55 25 18

· OMCT: Gerald Staberock + 41 22 809 49 23