République démocratique du Congo
25.11.10
Interventions urgentes

Intervention orale de l'OMCT à la 48ème session de la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples

ORGANISATIONMONDIALE CONTRE LA TORTURE (OMCT)

Intervention devant la Commission Africaine des Droitsde l’Homme et des Peuples (CADHP), dans le cadre de la 48ème sessionordinaire, Banjul, Gambie, 10- 24 novembre 2010
Point 4: Lasituation des droits de l’Homme en Afrique

Merci Madame la Présidente,
Madamela Présidente, Mesdames/ Messieurs les Commissaires, délégués et participants,en tant que principale coalition internationale d’organisations nongouvernementales luttant contre la torture et autres peines ou traitementscruels, inhumains ou dégradants (« mauvais traitements »),l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) exprime sa vive préoccupationquant à l’incidence de ces actes en Afrique.
Aujourd’huiencore, malgré son interdiction claire et absolue inscrite dans le droitinternational et régional, le recours à la torture et aux mauvais traitementsn’est que trop fréquent. Ces six derniers mois, l’OMCT a documenté de nouveauxcas, notamment en Algérie, à Djibouti, en Guinée Equatoriale, en RépubliqueDémocratique du Congo (RDC) et au Sénégal.Or, il appartient aux autorités et aux institutions judiciaires ou quasijudiciaires de veiller à ce que le droit de ne pas être soumis à la torture etaux mauvais traitements soit non seulement proclamé, mais respecté auquotidien.

Madamela Présidente,

Commel’a soulevé le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la question de latorture et des mauvais traitements dans son dernier rapport[1], lecadre juridique international existant prévoit un large éventail de normes etstandards destinés à interdire, prévenir et éliminer ces abus. Toutefois, leur applicationeffective reste un défi permanent.

Alorsque les Etats ont la responsabilité primaire de mettre en œuvre les standardsinternationaux et régionaux en matière de droits de l’homme, notammentl’interdiction de la torture et des mauvais traitements, ces actes perdurent,entre autres, parce que les cadres juridiques nationaux sont inefficaces et necodifient pas ces actes (la torture et les mauvais traitements) comme un crimeà part entière punissable par des sanctions appropriées.Acet égard, la Commission africaine[2] arécemment souligné que peu d’Etats parties à la Charte africaine onteffectivement criminalisé la torture.

Ainsi,en République Démocratique du Congo(RDC), il n’existe, à ce jour, toujours aucune loi incriminant la torture dansle Code pénal congolais bien qu’un tel projet ait été initié en 2004 et qu’unprojet ait été formellement déposé en 2007. Eu égard aux violations systématiquesdes droits de l’homme dans le pays, dont des actes de torture, l’OMCT estparticulièrement préoccupée par la lenteur de ce processus, une mesure pourtantfondamentale non seulement pour prévenir et sanctionner ces actes mais égalementpour permettre aux victimes de ces violations d’obtenir réparation. L’OMCTsaisi cette occasion pour appeler à nouveau la Commission africaine à examinersans délai le rapport étatique de la RDC.

Madamela présidente,

L’OMCT rappelle que lesEtats doivent veiller au respect des garanties fondamentales des personnesprivés de liberté, notamment en cessant le recours à la détention au secret età la disparition forcée.

En Algérie par exemple, contrairement au discours des autorités, des disparitionsforcées surviennent encore sous la forme de détentions au secret temporaire,souvent accompagnées de torture et de mauvais traitements, alors que desmilliers de personnes, le plus souvent des hommes, restent portéesdisparues après avoir été arrêtées par les forces de l’ordre dans les années90, au nom de la lutte contre le terrorisme. Leurs familles ignorent cequ’elles sont devenues. L’OMCT rappelle que la disparition forcée estconsidérée comme une forme de torture et que les personnes disparues mais aussiles familles de celles-ci en sont victimes.

Enfin, comme l’a également rappeléle Rapporteur Spécial sur la question de la torture dans son étude sur lephénomène de la torture et des mauvais traitements[3],l’impunité constitue l’un des principaux facteurs contribuant à la pratique de cesabus. Bien que l’impunité soit fréquemment liée à une administrationdéfaillante de la justice, trop souvent, elle persiste aussi du fait del’absence d’une volonté d’enquêter de manière exhaustive sur les allégations detorture et autres mauvais traitements et d’en traduire les auteurs présumés enjustice.

Madame la Présidente, l’OMCT appelle à nouveau lesEtats membres à

- ratifier etmettre pleinement en œuvre la Convention des Nations unies contre la torture,notamment en définissant et criminalisant la torture et les mauvais traitementsen droit interne conformément à la définition de ladite Convention et enpoursuivant en justice les individus responsables d'avoir autorisé ou infligédes tortures et d'autres mauvais traitements,- ratifier etmettre pleinement en œuvre le Protocol additionnel à la Convention contre latorture qui, entre autres, demande aux Etats parties de créer ou désigner desmécanismes nationaux de prévention (MNP) indépendant et doté de moyenssuffisants à leur tache. Plus généralement, l`OMCT appelle les Etats membres,les institutions nationales et la Commission à poursuivre les efforts afind’assurer le respect par les Etats de leurs obligations découlant desinstruments internationaux et régionaux en ce qui concerne l’interdiction de latorture et des mauvais traitements et de prendre les mesures nécessaires afind’assurer que le droit à ne pas être soumis à la torture et aux mauvaistraitements, en tant que droit absolu et non dérogeable, soit garanti demanière effective pour toutes les femmes, tous les hommes, et tous les enfants,quel que soit leur statut civil, politique, économique, social ou culturel.
Merci, Madame la Présidente.

[1] Rapport A/65/273 à l’Assemblée général des NationsUnies, 10 août 2010. [2] Communiqué de presse de la Commission Africainelors de la journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture,le 26 juin 2010[3] Rapport A/HRC/13/39/add.5, 5 février 2010.