Sahara Occidental
31.01.06
Interventions urgentes

Sahara Occidental / Maroc: Condamnation en appel de 14 prisonniers politiques sahraouis

Cas MAR 020905.2
Suivi des Cas MAR 020905 et MAR 020905.1

Condamnations / Libération

Genève, le 31 janvier 2006

Le Secrétariat international de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) requiert votre intervention TRES URGENTE dans la situation suivante au Sahara Occidental / Maroc.

Nouvelles informations:

Le Secrétariat International de l’OMCT a reçu avec grande préoccupation de nouvelles informations concernant le cas des 14 prisonniers politiques sahraouis arrêtés lors d’une vague d’arrestations en juin et juillet 2005 (cf. rappel des faits).

Selon les informations reçues de plusieurs sources fiables, le 24 janvier 2006, la Cour d’appel de Laâyoune a confirmé les peines de prison de ces activistes et prisonniers politiques sahraouis, . Elle a en outre augmenté la peine de M. Ali Salem Tamek et M. El Ouali Amidan, respectivement de deux mois et de six mois. Ces 14 personnes avaient été condamnées en première instance le 14 décembre 2005.

De plus, selon les informations reçues, au cours de leur transfert du Tribunal à la “Prison Noire”, les prisonniers politiques saharaouis, et en particulier M. El Ouali Amidan, auraient été battus, soumis à de mauvais traitements et à des actes de torture à l’intérieur même des fourgons de la police qui les transportaient.

Rappel des faits:

Le 14 décembre 2005, le Tribunal d’Appel de Laâyoune a condamné quatorze prisonniers sahraouis, accusés d’avoir pris part à des manifestations contre le gouvernement marocain, après les avoir déclarés coupables de plusieurs délits dont instigation à des actes de protestation violente et participation à ceux-ci. A l’issue d’un procès extrêmement expéditif, qui a débuté le 13 décembre 2005 et s’est achevé le lendemain, aucun d’entre eux n’a été autorisé à présenter le moindre témoin à décharge, et les condamnations suivantes ont alors été prononcées à leur encontre :
1. Mme Aminatou Haidar: condamnée à 7 mois de prison;
2. M. Elwali Amaydan: condamné à 6 mois de prison;
3. M. Ali Salem Tamek: condamné à 8 mois de prison;
4. M. Mohamed El Moutawakil: condamné à 6 mois de prison;
5. M. Houssein Lidri: condamné à 10 mois de prison;
6. M. Larbi Messaoud: condamné à 10 mois de prison;
7. M. Brahim Noumria: condamné à 10 mois de prison;
8. M. H’mad Hammad: condamné à 2 ans de prison;
9. M. Balla Med: condamné à 2 ans de prison;
10. M. Elmoussaoui Med: condamné à 2 ans de prison;
11. M. Mahjoub Chtioui: condamné à 2 ans de prison;
12. M. Med Tahlil: condamné à 3 ans de prison;
13. M. Jenhi Lekhlifa: condamné à 2 ans de prison;
14. M. Lawidi Mahmoud: condamné à 2 ans de prison;.
Selon les informations reçues, les condamnations se sont fondées exclusivement sur des déclarations écrites, présentées par des policiers qui affirmaient que les accusés avaient fait des aveux, ou alors après avoir été victimes de mauvais traitements et d’actes torture dans les locaux de la police.

De plus, selon les avocats de la défense, tous les accusés ont refusé de signer des aveux au cours de leur détention préventive et ils ont nié ces accusations devant le tribunal. Par ailleurs, les accusés n’ont pas non plus été autorisés à présenter les témoins à même de réfuter le contenu écrit des déclarations de la police, violant ainsi l’un des aspects fondamentaux d’un procès équitable, qu’est le droit qu’ont les accusés d’appeler des témoins et que ceux-ci soient entendus au cours du dit procès.

Par ailleurs, le Secrétariat international de l’OMCT a été informé de la mise en liberté, le 18 janvier 2006, de Mme Aminetou Haidar, qui a joué un rôle important dans diverses campagnes organisées pour demander la libération des prisonniers politiques sahraouis. Elle est pu quitter la “Prison Noire” de Laâyoune au terme de la peine de sept mois d’emprisonnement à laquelle elle a été condamnée le 14 décembre 2005.

Mme Aminetou Haidar avait été arrêtée par la police marocaine le 17 juin 2005 alors qu’elle s’apprêtait à prendre part à une manifestation indépendantiste à Laâyoune. Mme Haidar avait alors été violemment frappée par la police marocaine et admise à l’Hôpital Hasan Belmehdi. Après avoir reçu son bulletin de sortie le jour même, elle avait été conduite à un commissariat de Laâyoune où elle est restée en détention et a été soumise à des interrogatoires pendant trois jours. Le 20 juin 2005, Mme Haidar a été inculpée par le procureur de Laâyoune de divers chefs d’accusation tels que participation à des actes violents de protestation, incitation à ceux-ci et appartenance à une association illégale. Elle a ensuite été conduite à la “Prison Noire”.

Le 12 décembre 2005, Mme Aminatou Haidar a reçu de la Commission Espagnole d’Aide aux Réfugiés (CEAR) et la Fondation CEAR-Conseil d’Appui aux Réfugiés le prix « Juan María Bandrés » de la Défense du Droit d’Asile et Solidarité avec les Réfugiés en raison de sa lutte pacifique en faveur de l’autodétermination du peuple sahraoui. En 1987, Mme Haidar avait été arrêtée une première fois par la police marocaine et était restée détenue, sans charge à son encontre, dans divers centres de détention secrets pendant quatre ans, avant d’être libérée en 1991.

Par ailleurs, le Secrétariat International de l’OMCT avait manifesté sa vive préoccupation pour la santé et pour l’intégrité physique et psychologique, puis pour l’aggravation de l’état de santé de presque 30 prisonniers politiques sahraouis qui, depuis le huit août 2005, poursuivaient une grève de la faim dans leurs prisons respectives: la Prison Noire de Laâyoune, Ait Mal-lul (Ait Melloul) à Agadir et Oukacha à Casablanca. L’OMCT avait alors demandé au gouvernement marocain d’adopter les mesures nécessaires pour que tous les grévistes de la faim reçoivent les soins médicaux appropriés et gratuits. Elle avait également insisté pour que leurs cas soient étudiés de toute urgence afin que les prisonniers interrompent cette grève de la faim utilisée, dans leur cas, afin de dénoncer leur situation (voir Appels Urgents de l’OMCT Cas MAR 020905 et, Cas MAR 020905.1, suivi diffusé le 16 septembre 2005).

Parmi les prisonniers en grève de la faim se trouvaient fiplusieurs des prisonniers condamnés en appel le 24 janvier 2006, dont Mme Aminatou Haidar, MM. Elwali Amaydan, Ali Salem Tamek, Mohamed El Moutawakil, Houssein Lidri, Elmoussaoui Med, Med Tahlil, Larbi Messaoud, Brahim Noumria, et H’mad Hammad. Les détenus avaient décidé d’entamer une grève de la faim indéfinie pour protester contre le transfert illégal et abusif d’un groupe de prisonniers politiques de la Prison Noire à des lieux de détention inconnus dans le but, semblait-il, de les isoler. Ils prétendaient également manifester leur mécontentement dû au fait que les revendications exprimées par un groupe de prisonniers politiques sahraouis dans un dossier, remis à l’administration de la Prison Noire, n’avaient jamais été satisfaites et que leurs conditions de détention étaient en tout point déplorables.

Le Secrétariat International de l’OMCT manifeste une fois encore sa vive préoccupation pour la sécurité ainsi que pour la santé et l’intégrité physique et psychologique des prisonniers politiques sahraouis et demande au gouvernement marocain d’adopter immédiatement les mesures les plus urgentes et appropriées pour les garantir.

L’OMCT estime que les condamnations des prisonniers politiques sahraouis le 14 décembre 2005, confirmées et/ou modifiées le 24 janvier 2006, sont injustes car le procès a été entaché de graves irrégularités, telles qu’interdire aux accusés de présenter des témoins pour qu’ils puissent être interrogés. Selon les normes internationales des droits de l’homme, la culpabilité des prisonniers doit être rejetée si la preuve en est apportée uniquement par des aveux obtenus sous la torture (article 15 de la Convention contre la Torture). L’OMCT demande donc aux autorités marocaines la tenue d’un nouveau procès équitable et transparent pour toutes les personnes antérieurement condamnées, procès instruit et jugé par un tribunal civil, indépendant, compétent et impartial.

Actions requises:

Nous vous prions de bien vouloir écrire de nouveau aux autorités marocaines en leur demandant:
i. de garantir la sécurité et l’intégrité physique et psychologique de tous les prisonniers politiques sahraouis ainsi que leur accès à une assistance médicale adéquate dans leurs prisons respectives, à savoir: la Prison Noire de Laâyoune ; la prison d’Ait Mal-lul (Ait Melloul) à Agadir ; et celle d’Oukacha à Casablanca ;
ii. d’ordonner la tenue d’un nouveau procès, sur la base de charges valables uniquement, pour les prisonniers ci-dessus mentionnés, devant un tribunal civil, indépendant, compétent et impartial, en leur garantissant à tout moment le respect de leurs droits procéduraux;
iii. mener une enquête exhaustive, transparente et impartiale sur les circonstances des mauvais traitements et tortures infligés aux prisonniers sahraouis dans les prisons marocaines afin d’identifier les responsables, les traduire devant un tribunal civil, indépendant et impartial et de leur appliquer les sanctions pénales et/ou administratives prévues par la loi;
iv. de manière générale, garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales de la population sahraoui, conformément aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des Pactes et des Conventions Internationales des droits de l’homme, notamment les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus ainsi que la Convention contre la torture.

Adresses:

  • S. M. Mohammed VI. Ibn Al Hassan, Roi du Maroc, Palais Royal, Rabat, Maroc. ; Fax : + 21237.773 07 72
  • Mission Permanente du Royaume du Maroc à Genève, Chemin François-Lehmann 18a., 1218 Grand-Saconnex. Fax: + 41 (0) 22.791.81.80 E-mail: mission.maroc@ties.itu.int
  • M. Driss Jettou, Premier Ministre, Bureau du Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, Palais Royal, Rabat, Maroc. Fax: + 21237.776 99 95 // + 21237.76 91 95 ou + 21237.77 68 37
  • M. Mohamed Bouzoubaa, Ministre de la Justice, Place Mamounia, Rabat, Maroc. Telegrammes: Ministre de Justice, Rabat, Maroc. Fax: + 21237.72.37.10 // + 21237.73.07.72 // + 21237.73.89.40
  • M. Mostafa Sahel, Ministre de l’Intérieur, Quartier Administratif, Rabat. Fax:+21237.76.20.56
  • M. Mohamed Benaïssa, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, Avenue F. Roosevelt, Rabat, Maroc. Fax: +21237.76.55.08 // +21237.76.46 79. E-mail: mail@maec.gov.ma
  • Conseil Consultatif des Droits de l’Homme (CCDH), Place des Chouhada, B.P. 1341, Rabat, Maroc. Fax: + 21237.72.68.56. E-mail: ccdh@ccdh.org.ma


Prière d’écrire aux représentations diplomatiques du Royaume du Maroc dans vos pays respectifs.

Genève, le 31 janvier 2006

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.