Algérie
21.02.13
Interventions urgentes

Vague de répression contre les militants du droit au travail

ALGERIE :Vague de répression contre les militants du droit au travail

Alger,Genève-Paris, 21 février 2013 - Nos organisations condamnentfermement les deux derniers incidents dont ont été victimes des militants dudroit au travail hier en Algérie.

Le premierincident concerne dix jeunes membres d’associations de chômeurs du Maghreb, quidevaient participer à la première rencontre du Forum maghrébin pour la luttecontre le chômage et le travail précaire à Alger les 20-21 février 2013. Lesjeunes militants dont 5 jeunes militants tunisiens[1],3 mauritaniens[2] et2 marocains[3],s’étaient rendus à cet événement qui devait se dérouler à la Maison dessyndicats de Bab Ezzouar (quartier d’Alger). Selon nos informations, le 20février, les membres des trois délégations ont été arrêtés, puis emmenés àl’aéroport après avoir été retenus toute la journée au Commissariat dequartier. Si les jeunes mauritaniens et tunisiens ont déjà pu être rapatriésentre hier et ce matin, il semble que les membres de la délégation marocainesoient toujours retenus à l’aéroport, coupés de tout contact avec l’extérieur.

Nosorganisations dénoncent cette tentative de réprimer une réunion pacifiqueportant sur le droit au travail et appellent les autorités algériennes à mettreun terme aux violations des libertés de réunion, d’association, d’expressionainsi qu’aux libertés syndicales dont sont victimes les défenseurs des droitsde l'Homme en Algérie.

Nosorganisations ajoutent que les chambres d’hôtel des 10 militants ont égalementété fouillées par la police. Mourad Thicko, membre du Syndicat NationalAutonome du Personnel de l’Administration Publique (SNAPAP), et AbdelkaderKherba, membre du Comité national pour la défense des droits des chômeurs(CNDDC), ont par ailleurs été arrêtés et retenus au Commissariat jusqu’au soir.

Dès le matintrès tôt du 20 février, des agents de police ont également encerclé l’immeuble où se trouve la Maison des syndicats pour empêcher l'accès des autres participants. LaMaison des syndicats, occupée de façon régulière par le Syndicat nationalautonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP) depuis janvier2013, est un local privé utilisé comme un lieu de rencontres, de formation etdes débats pour les militants syndicaux et associatifs. Nos organisationssoulignent que les organisateurs du Forum n'ont violé aucune disposition de laloi contrairement aux déclarations faites à El Watan par le directeur dela cellule de la communication de la Direction générale de la sûreté nationale(DGSN) [4].En effet, conformément à la loi 91-19 du 2 décembre 1991 relative aux réunionset manifestations publiques, toute réunion privée organisée sur la based’invitations personnelles et nominatives est « dispensée[s] de ladéclaration préalable » (art. 14).

Par ailleurs,suite à une manifestation organisée le même jour à Laghouat (Sud de l’Algérie)devant le bureau de main d’œuvre de la ville pour revendiquer le droit autravail, dix-sept autres jeunes activistes connus pour leur engagement,notamment MM. Mohamed Rag, Aissa Tadj, Mohamed Bendjillali, MustaphaTernoukha et Ahmed Akouche, ont été arrêtés. Ils se trouvent actuellementdevant le procureur du Tribunal de Laghouat.

Nosorganisations demandent aux autorités algériennes de :

- Libérer demanière immédiate et inconditionnelle les 17 militants de Laghouat, en ce queleur détention ne semble viser qu'à sanctionner leurs activités de défense desdroits de l'Homme ;

- Ne pasprocéder à l'expulsion des militants maghrébins qui demeurent sur le territoirealgérien et, pour l'avenir, garantir leur libre accès au territoirealgérien ;

- Mettre unterme à toute forme de harcèlement à l’encontre de tous les défenseurs desdroits de l’Homme conformément aux dispositions de la Déclaration des Nationsunies sur les défenseurs des droits humains ;

- Garantirl’exercice des libertés de réunion, d’association et d’expression ainsi que deslibertés syndicales, conformément à la Constitution algérienne et lesdispositions du Pacte international pour les droits civils et politiques(PIDCP) et des Conventions de l’OIT, ratifiés par l’Algérie ;

- Garantir lasécurité et l’accès au local de la Maison des syndicats ainsi que ledéroulement de toute activité légitiment organisée dans ce cadre

Contacts :

REMDH : Hayet Zeghiche : +32 488 08 00 41

FIDH : Arthur Manet / Audrey Couprie : +33 1 43 55 25 18

OMCT : Delphine Reculeau : +41 22 809 49 39

Organisations signataires :

Réseau euro-méditerranéendes droits de l'homme (REMDH)

Observatoire pour laprotection des défenseurs des droits de l'Homme, programme conjoint de laFédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et del'Organisation mondiale contre la torture (OMCT)

Collectif des famillesdes disparu(e)s en Algérie (CFDA)

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme(LADDH)

Syndicat National Autonome du Personnel del’Administration Publique (SNAPAP)

Réseau d’Avocats pour laDéfense des Droits de l’Homme (RADDH)

Agir pour le ChangementDémocratique en Algérie (ACDA)

Comité International deSoutien au Syndicalisme Autonome Algérien (CISA)

Informationssupplémentaires :

Forum maghrébin pourla lutte contre le chômage et le travail précaire

Les organisationsconviées au premier Forum maghrébin pour la lutte contre le chômage et letravail précaire sont : le Comité national des contrats pré-emploi etfilet social d’Algérie, l’Union des Diplômés Chômeurs (UDC) de Tunisie,l’Association Nationale des Diplômés Chômeurs (ANDCM) du Maroc, l’AssociationMauritanienne des Diplômés Chômeurs (AMDC) de Mauritanie, le Comité nationalpour la défense des droits des chômeurs (Algérie), le Comité national desdiplômés chômeurs (Algérie).

Maison des syndicats

Il faut rappelerque l’ancienne Maison des syndicats à Dar El Beida (Est Alger) avait étécambriolée dans la nuit du 3 mai 2012, suite à l’annonce de la constitutiond’une confédération syndicale - la Confédération nationale autonome destravailleurs algériens (CNATA) -. Seuls les ordinateurs avaient été emportés,laissant penser à une intimidation qui porterait atteinte à l’exercice de laliberté syndicale. Par ailleurs, la plainte déposée par le SNAPAP suite aucambriolage du 8 mai 2011, ainsi que les anciens contentieux liés à lafermeture administrative de la Maison des associations (Oran 2002) et de laMaison des Syndicats (Alger 2010) n’ont à ce jour eu aucune suite.

Pour plusd’informations, voir le communiqué conjoint du Réseau euro-méditerranéen desdroits de l’Homme (REMDH) et l’Observatoire pour la protection des défenseursdes droits de l’Homme, un programme conjoint de la Fédération internationaledes ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre latorture (OMCT), du 14 mai 2010 : http://www.euromedrights.org/fra/2010/05/17/algerie-fermeture-administrative-de-la-maison-des-syndicats-a-la-veille-de-la-tenue-du-forum-syndical-maghrebin/

[1] Il s'agitde : Benamor Salah, Idoudi Souheil, Boussaa Kamel, Affout Intissar etBenammour Noaman.

[2] Il s’agit de:Widdady Abdou, Haimedane Ahmed et Bayrouk Fatimetou.

[3] Il s’agitde : Louchacha Dhahbi et Kalou Imade.

[4] Cf.http://www.elwatan.com/actualite/11-syndicalistes-etrangers-et-2-algeriens-arretes-21-02-2013-204187_109.php