Tunisie
29.11.07
Interventions urgentes

Les Nations Unies condamne la Tunisie pour des actes de torture pratiqués sur un défenseur des droits de l’Homme

Le Comité contre la Torture des Nations Unies a conclu à la responsabilité de la Tunisie pour des actes de torture dans le cas Ben Salem c. Tunisie, Communication No. 269/2005. Le cas, porté par l’Organisation Mondiale Contre la Torture, a fait l’objet d’une décision lors de la 39ème Session du Comité contre la Torture, tenue à Genève, Suisse, et a été communiqué aux parties le 23 novembre 2007.

M. Ben Salem, le plaignant, est le fondateur de deux organisations tunisiennes de défense des droits de l’Homme – le Conseil National pour les Libertés en Tunisie (CNLT) et l’Association Tunisienne de Lutte contre la Torture (ALTT). En avril 2000, alors qu’il assistait à une manifestation en soutien à un collègue dont le passeport avait été confisqué par les autorités tunisiennes, M. Ben Salem, âgé de 67 ans au moment des faits, a été arrêté par des officiers de police en civil et sauvagement frappé, au point de perdre conscience. Après avoir reçu ces coups et alors qu’il était toujours inconscient, il a été conduit à la périphérie de Tunis et abandonné dans une zone désertique. Aujourd’hui, à l’âge de 74 ans, M. Ben Salem continue à souffrir en permanence de traumatismes crânien et du dos, en raison de la violence des mauvais traitements subis.

Peu de temps après l’incident, M. Ben Salem a déposé plusieurs plaintes auprès des autorités judiciaires tunisiennes, qui n’ont entrepris aucune action pour enquêter sur ses allégations. En mai 2005, l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) a porté le cas devant le Comité contre la Torture qui a conclu que le traitement subi par M. Ben Salem alors qu’il était aux mains d’agents de la fonction publique constitue un acte de torture tel que définit à l’article 1 de la Convention contre la Torture. Dans sa décision, le Comité contre la Torture a déclaré que les preuves montrent que les agents tunisiens l’ont torturé dans le but de le punir et de l’intimider, du fait de ses activités en tant que défendeur des droits de l’Homme.


De plus, le Comité contre la Torture a conclu que le fait que les autorités tunisiennes n’aient pas engager d’enquête prompte et effective concernant la plainte de M. Ben Salem, et qu’elles ne lui aient pas ouvert de voie de recours, constitue une violation des articles 11, 12 et 13 de la Convention. Le Comité a précisé que la Tunisie a une obligation d’enquêter et de poursuivre les auteurs de ces actes de torture, ainsi que de fournir des compensations appropriées à M. Ben Salem. En outre, la décision prévoit que la Tunisie a 90 jours pour informer le Comité des mesures qu’elle aura prises afin de mettre en œuvre cette décision.


Cette affaire est d’une importance particulière en ce qu’elle fait partie des rares cas pour lesquels le Comité contre la Torture a conclu que le traitement en question constituait un acte de torture tel que défini à l’article 1 de la Convention. De plus, ce cas est révélateur des pratiques d’intimidation, de harcèlement et de graves persécutions à l’égard des défenseurs des droits de l’Homme, exercées par le gouvernement tunisien. Des actions judiciaires contre des agents publics qui ont commis des crimes de torture et de mauvais traitements sont inexistantes en Tunisie. L’impunité pour des actes de torture reste donc la règle plus que l’exception.


L’OMCT appelle le Gouvernement de Tunisie à saisir l’opportunité offerte par cette décision de faire valoir sa volonté d’engager un processus afin de mettre un terme aux effroyables constats de violations des droits de l’homme, en donnant pleinement et immédiatement effet à la décision du Comité.

Pour des informations complémentaires, veuillez contacter :
Boris Wijkström
Conseiller juridique à l’OMCT
bw@omct.org

Genève, le 29 novembre 2007