République démocratique du Congo
15.06.06
Interventions urgentes

Procès des Pasteurs Kutino Fernando et Bompere Mbo Timothée

Cas COD 170506.2 / Cas COD 170506.2.EE Appel Urgent / Exactions Enfants Suivi de l’affaire 170506 et 170506.1 Respect des droits procéduraux Genève, le 15 juin 2006 Le Secrétariat international de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a reçu de nouvelles informations et requiert votre intervention urgente dans la situation suivante en République Démocratique du Congo (RDC).

Nouvelles informations :


Le Secrétariat international de l’OMCT a été informé par le Comité des observateurs des droits de l’homme (CODHO), membre du réseau SOS-Torture, de l’ouverture et des conditions de déroulement du procès des Pasteurs Kutino Fernando et Bompere Mbo Timothée* , ainsi que de Messieurs Ngandu Junior (enfant de la rue âgé de 16 ans) et du sergent Major Sawa Anekonzapa, membre de la protection rapprochée du vice-président Jean Pierre Bemba, devant le Tribunal militaire de la garnison de Kinshasa/Gombe. Les différentes audiences ont lieu en chambre foraine dans l’enceinte de l’Inspection provinciale de la police de Kinshasa (IPKIN). Selon les informations reçues, les Pasteurs Kutino Fernando et Bompere Mbo Timothée sont inculpés d’« association de malfaiteurs, détention illégale d’armes et d’effets militaires et tentative d’assassinat ». La première audience s’est déroulée le 31 mai 2006 et a été consacrée à l’identification des prévenus. Lors de la seconde audience du 2 juin 2006, le tribunal a rejeté la requête de mise en liberté provisoire des Pasteurs Kutino Fernando et Bompere Mbo Timothée et a poursuivi les débats. Le lendemain, lors de la troisième audience, le tribunal a constaté l’absence des prévenus. C’est le mauvais état de santé du Pasteur Kutino Fernando qui a conduit le ministère public à ne pas le présenter devant le tribunal et en l’absence de celui-ci, le parquet a estimé inutile de faire venir les autres prévenus. Deux médecins légistes de l’hôpital militaire de référence de Camp Kokolo à Kinshasa, les docteurs Malolo et Tshomba, ont rendu leur rapport médical sur la santé du Pasteur le 6 juin 2006, lors de la quatrième audience du procès. Selon l’expertise, le mauvais état de santé du Pasteur serait la conséquence de l’état d’"angoisse" de celui-ci et serait une "maladie diplomatique". Les avocats de la défense ont souhaité recevoir de plus amples explications sur le contenu de ce rapport et ont également demandé une contre-expertise qui a été rejetée par le tribunal. Le Pasteur Kutino Fernando, pour la cinquième audience et pour la deuxième journée consécutive, n’a pas été présenté devant le tribunal. Lors de la sixième audience, qui s’est tenue le 9 juin 2006, le tribunal a constaté l’absence des Pasteurs Kutino Fernando et Bompere Mbo ainsi que de M. Ngandu Junior, tous trois malades. Leurs avocats ont demandé à ce qu’un médecin soit tenu à leur disposition. Les explications des docteurs Malolo et Tshomba sur l’état de santé du Pasteur Kutino Fernando ont été données pendant la septième audience du tribunal. Selon eux, son état d’angoisse serait un alibi car le pasteur refuserait de comparaître. Le professeur Longo Mbensa, cardiologue des cliniques universitaires de Kinshasa (CUK) que le Pasteur Kutino Fernando avait déjà consulté, a quant à lui expliqué au tribunal que son patient, à qui il a rendu visite dans son centre de détention, souffre d’un ulcère gastrique dû au stress. Selon lui, il est donc réellement malade. La huitième audience du 12 juin 2006 a été consacrée à la plaidoirie de la partie civile. Lors de la neuvième audience du 13 juin 2006, le Ministère public a requis les peines suivantes contre les quatre prévenus :

  • Pasteur Kutino Fernando : peine de mort pour les infractions d’association de malfaiteurs et tentative d’assassinat ;

  • Pasteur Bompere Mbo : 20 ans de servitude pénale pour association de malfaiteurs et 20 ans de servitude pénale pour tentative d’assassinat ;

  • Mr Ngandu Junior: 20 ans de servitude pénale pour tentative d’assassinat ;

  • sergent Major Sawa Anekonzapa : 12 mois de servitude pénale principale pour rébellion.


Le prononcé du jugement interviendra vendredi 16 juin 2006 à 9 heures, heure locale. Le Secrétariat international de l’OMCT exprime sa plus vive inquiétude quant au respect de l’intégrité psychologique et physique des personnes susmentionnées et s’alarme des conditions dans lesquelles se déroule ce procès. L’OMCT appelle les autorités judiciaires à se conformer à tous les principes internationaux reconnus en matière de procès équitable. * Pour des raisons de traitement du dossier, le cas COD 260506 est traité conjointement avec le présent appel.

Rappel des faits :


Le 14 mai 2006, le Pasteur Kutino Fernando a été enlevé par des éléments de sécurité de la police dits de Kin Maziere, sous le commandement du colonel Raus, alors qu’il était dans le bureau de son église "Armée de la victoire", située dans la commune de Kasa-Vubu, après avoir participé à un culte au stade Tata Raphaël, commune de Kalamu. Lors de son enlèvement, M. Kutino Fernando a été brutalisé et menacé de mort. Il a également été déshabillé. Selon les informations reçues, M. Kutino Fernando a dans un premier temps été détenu au cachot du bureau de la Direction de renseignements généraux et de sécurité (DRGS) de la police nationale, situé dans le bâtiment appelé Kin-Mazière (commune de Gombe à Kinshasa). Le 15 mai 2006, il a été présenté à l’auditorat militaire de garnison de Kinshasa/Gombe et entendu brièvement par un magistrat militaire auprès de cet auditorat (parquet militaire). Il a ensuite été transféré au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK), au pavillon 8 puis au pavillon 4. Le Pasteur Bompere, également membre de l’église "Armée de la victoire", a quant à lui été arbitrairement arrêté le 24 mai 2006 à son domicile et est actuellement détenu au pavillon 3 du CPRK Lors du prêche qu’il avait tenu dans le stade, le Pasteur Kutino Fernando aurait proposé de consulter les principaux acteurs politiques du pays afin de désamorcer une crise politique qui pourrait survenir avec la fin de la transition fixée au 30 juillet 2006. Intervenant dans la soirée sur la chaîne publique de télévision RTNC (Radio-Télévision Nationale du Congo), le gouverneur de la ville de Kinshasa, M. Kimbembe Mazunga avait accusé M. Kutino d’avoir tenu, lors de sa prédication, des propos d’incitation à la haine et à la division. Il avait aussi affirmé avoir découvert des armes dans la résidence du pasteur. Le Psteur Kutino Fernando n’est rentré d’Europe que le 6 mai 2006 après un exil de trois ans en France. Il avait fui le pays dans les mêmes circonstances, en raison de menaces de mort qui pesaient sur lui. Le 15 mai 2006, une marche avait été organisée à Kinshasa par les fidèles du Pasteur Kutino Fernando ainsi que d’autres militants afin de protester contre son arrestation illégale, ainsi que contre les mauvais traitements, menaces de mort, et brutalités dont sont victimes les fidèles de son église. Les manifestants, qui se dirigeaient vers le cabinet du vice-président de la République, M. Jean-Pierre Bemba Gombo, avaient été violemment dispersés par des membres de la police nationale qui avaient fait usage d’armes à feu ainsi que de gaz lacrymogènes. Plusieurs adeptes de M. Kutino Fernando auraient été arrêtés.

Actions requises :


Merci d’écrire aux autorités de la République Démocratique du Congo, afin de leur demander de : 1. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique des personnes susmentionnées; 2. Ordonner leur libération immédiate en l’absence de charges valables ou, le cas échéant, de les traduire devant un tribunal civil, impartial et compétent tout en garantissant leurs droits procéduraux en tout temps; 3. Garantir une enquête exhaustive et impartiale sur ces évènements, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire en justice et d’appliquer les sanctions pénales et/ou administratives prévues par la loi; 4. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’homme.

Adresses :



  • Le Président de la République, S.E. Joseph Kabila, Présidence de la République, Kinshasa-Ngaliema, République Démocratique du Congo, E-mail: upp@ic.cd

  • Le Vice-Président de la République en Charge de la Commission Politique, Défense et Sécurité, M. Azarias Ruberwa Manywa, Cabinet du Vice-Président de la République, avenue roi Baudouin ex-3Z, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Email : vice_presidence.rdc@ic.cd

  • Le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, M. Ramazani Baya, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo

  • Le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Kisimba Ngoy, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, E-mail: minjustrdc@yahoo.fr

  • Le Ministre de l’Intérieur, Ministère de l’Intérieur, Fax: +243 88 02 042, E-mail: mininterieur@yahoo.fr

  • La Ministre des Droits Humains, Mme Marie-Madeleine Kalala, Cabinet du Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax: 00 243 12 20 664, Email: min_droitshumains@yahoo.fr ou mindroits_humains@yahoo.fr

  • Observatoire National des Droits de l’Homme (ONDH), Cabinet du Président, avenue Sendwe, Kinshasa/Kalamu, République Démocratique du Congo, Tél: +243 98313740 / + 243 98271199 / + 243 98407633

  • M. Théo Kiakwima, Directeur adjoint de l’Agence Nationale des Renseignements, Tel : + 243 995 8610

  • Ambassadeur, Antoine Mindua Kesia-Mbe, Mission permanente de la République démocratique du Congo, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, e-mail : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +4122 740.16.82

  • Ambassade de la République Démocratique du Congo à Bruxelles, Rue marie de Bourgogne, 30 – B 1040 Bruxelles, Belgique. Tel : + 32 2 375 47 96, Fax : + 32 2 372 23 48


Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République Démocratique du Congo dans vos pays respectifs. *** Genève, le 15 juin 2006 Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.