Espagne
21.08.02
Interventions urgentes

Espagne: cellule de punition dans un centre pour mineurs à Melilla

Cas ESP 210802.EE
EXACTIONS ENFANTS
Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Le Secrétariat international de l’OMCT requiert DE TOUTE URGENCE votre intervention dans la situation suivante en Espagne.

Brève description de la situation

Le Secrétariat international de l'OMCT a été informé de source fiable que les enfants placés dans le centre pour mineurs de « Fuerte de la Purísma », situé dans la ville autonome de Melilla en Espagne, ont été victimes d’abus et de mauvais traitements par les autorités du centre. Selon les informations reçues, la majorité des enfants qui vivent dans ce centre sont des enfants des rues et des enfants immigrants qui suivent leur scolarité dans le centre où ils y recherchent aussi aide et attention. Le centre contiendrait, en particulier, une « cellule de punition » dans laquelle les enfants sont détenus pendant plusieurs heures sans possibilité de manger, de boire ni d’utiliser les installations sanitaires.

Selon les informations reçues, les gardiens et les éducateurs du centre font un usage excessif de leur autorité pour agresser arbitrairement et sans raison suffisante les enfants, parfois sous l’effet de sévères intoxications dues à l’abus d’alcool. Des dénonciations ont eu lieu selon lesquelles des coups et des traitements inhumains sont infligés de manière répétée contre les enfants.

Selon les informations reçues, il existe de nombreux témoignages d’enfants, à la fois victimes et témoins, relatant des cas d’abus par les autorités du centre. L’un d’eux, Muhaidine Azzazi, déclare avoir été détenu dans la « cellule de punition » pendant presque tout un jour. Les dimensions de la cellule sont approximativement de 2 x 1.5 mètres. L’enfant détenu dans la cellule le 6 juillet 2002 déclare « avoir été battu contre le mur de la cellule par Dani (l’un des éducateurs du centre) et un gardien. Immédiatement après, il a reçu un coup (« Cate ») qui lui a fait perdre connaissance et saigner de la bouche ». Ces déclarations ont été appuyées par le dépôt d’une plainte officielle par l’Asociación Pro Derechos de la Infancia (PRODEIN) auprès du procureur de Melilla. La plainte était accompagnée de photos et de cassettes sur lesquelles ont été enregistrées les déclarations sus-mentionnées.

Azzazi déclare avoir été détenu plusieurs fois dans la « cellule de punition ». Pendant l’une de ces détentions, il a été violemment agressé par un gardien du nom de Cortizo qui a détruit la caméra que l’enfant essayait d’utiliser pour filmer les mauvais traitements. Après avoir été battu avec des matraques et reçu des coups de pieds, l’enfant s’est enfui par la porte principale du centre. Les gardiens l’ont poursuivi et l’ont retrouvé inconscient et en sang à deux kilomètres du centre. Ils l’ont ramené au centre puis transféré vers un hôpital.

De manière similaire, un nombre important d’enfants vivant dans le centre de « Fuerte de la Purísma » seraient maltraités et abusés par les éducateurs et les gardiens. La dénonciation de PRODEIN contient les noms des enfants victimes d’abus suivants : Mohamed Bounani, Yusef Kandouri, Sufian Bosous et Yaguar, Abdelnaser, Karim, et Amin (le nom complet des deux derniers enfants de la liste est inconnu).

A la suite du dépôt de la plainte par PRODEIN, les détentions dans la « cellule de punition » auraient cessés et deux enfants auraient été transférés dans un autre centre. Deux gardiens auraient été transférés dans d’autres institutions. Ils n’auraient cependant reçu aucune sanction correspondant aux actes perpétrés.

Les autorités de Melilla nie que de tels faits prennent place au centre pour mineurs de « Fuerte de la Purísma ». A la suite de la publication d’un article relatant ces faits dans le journal « El Mundo », le maire (alcade-senador) de Melilla, M. Juan José Imbroda, a déclaré qu’il allait porter plainte contre PRODEIN pour diffamation. De manière similaire, la conseillère aux affaires sociales, Isabel Quesada, a nié les faits et a affirmé que les éducateurs dans les centres craignent les dénonciations, ce qui entrave l’éducation des enfants parce qu’ « on ne peut pas les punir si nécessaire ».

Le Secrétariat international de l’OMCT exprime sa plus vive inquiétude concernant les faits qui se sont déroulés à Menilla et est surpris que la ville autonome, et en particulier la conseillères aux affaires sociales, n’ait pas ouvert d’enquête parallèle sur les faits sus-mentionnés et sur les possibles écarts qui ont eu lieu concernant les mesures correctionnelles infligées aux enfants. Une telle enquête est rendue d’autant plus nécessaire étant donné les précédentes allégations de mauvais traitements et de discrimination par les autorités à l’encontre des enfants des rues et des enfants immigrants provenant d’Afrique du Nord, ignorant ainsi le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

L’OMCT rappelle que l’Espagne a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant qui interdit la pratique de toute forme de discrimination et les mauvais traitements contre les enfants. En particulier, l’article 2 sur la non-discrimination ; l’article 19 qui énonce que « les Etats parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l'enfant contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitements (…) pendant qu'il est sous la garde de ses parents ou de l'un d'eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié » ; et l’article 37(a) qui interdit la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Actions requises

Nous vous prions de bien vouloir écrire aux autorités d’Espagne, leur demandant:

i. de garantir la sécurité ainsi que l’intégrité physique et psychologique des enfants sus-mentionnés, ainsi que de tous les enfants victimes d’abus dans le centre pour mineurs de Melilla ;
ii. de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger, éduquer, réhabiliter et intégrer tous les enfants se trouvant sur le territoire national sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre de l'enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation (article 2 CDE) ;
iii. de mener une enquête exhaustive et impartiale sur les faits susmentionnés afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal compétent et de leur appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;
iv. de garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans tout le pays, conformément aux lois nationales et normes internationales, et plus particulièrement à la Convention relative aux droits de l’enfant.

Adresses

· Presidencia del Gobierno, S.E. D. José María Aznar López, Complejo de la Moncloa - 28071 Madrid.
· Portavoz del Gobierno, Dr. Pio Cabanillas; Fax: (+ 34) 91 321 40 30
· Director del Gabinete de la Presidencia, D. Carlos Aragones Mendiguchia, Complejo de la Moncloa - Madrid Fax : (+ 34).91.390.0356
· Ministro del Interior - Jaime Mayor Oreja, Ministerio del Interior, Paseo de la Castellana, 5 28071 Madrid Fax : (+ 34) 91.522.1538/(+ 34).91.522.5865
· Defensor del Pueblo - Fernando Alvarez de Miranda y Torres Eduardo, Defensoría del Pueblo, 31 - 28071 Madrid, Fax : (+ 34) 91 308 1158
· Consejo General del Poder Judicial - Presidente Francisco Javier Delgado Barrio Marques de la Ensenada, 8 - 28071 Madrid Fax : (+ 34) 91 310 0306
· Fiscal General del Estado, Fiscalia General de Estado - Jesús Cardenal Fortuny, 4 - 28071 Madrid Fax : (+ 34).91.319.3317
· Ministro de Asuntos Exteriores - Juan Abel Matutes, Ministerio de Asuntos Exteriores, Plaza de la Provincia, 1 - 28071 Madrid Fax (+ 34) 91 366 3856
· Ministro de Justicia, Dr. Ángel Acebes Paniagua, Ministerio de Justicia, Madrid
Fax: (+ 34)9 1 390 22 68
· Tribunal Tutelar de Menores de Melilla, Fax: (+ 34) 95 268 05 29


Veuillez aussi écrire aux représentations diplomatiques d’Espagne dans vos pays respectifs.


Genève, le 21 août 2002


Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.