Rwanda
02.12.04
Interventions urgentes

Rwanda : Atteinte à la liberté d'association et menaces contre membres de CAURWA

APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE

RWA 002 / 1204 / OBS 090
Atteinte à la liberté d'association/
Menaces
Rwanda
1er décembre 2004



L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante au Rwanda.


Description des faits :

L'Observatoire a été informé par la Communauté des Autochtones Rwandais (CAURWA) de la décision de suspension des activités de celle-ci prise par le gouvernement rwandais et de menaces dirigées contre son directeur M. Zéphirin Kalimba, dans le cadre de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (Dakar - 23 novembre/7 décembre 2004).

Selon les informations reçues, dans une lettre du 28 juin 2004, le ministre de la Justice informait la CAURWA que la demande effectuée par l'organisation en vue d'obtenir la personnalité juridique était refusée au motif que « l'objectif et le nom de l'organisation [étaient] contraires aux principes constitutionnels de la République rwandaise ». Dans une lettre du 8 octobre 2004, l'Ombudsman explicitait cette décision, indiquant notamment que les dénominations « Autochtones, Batwa » utilisées à plusieurs reprises dans le statut et le règlement d'ordre intérieur étaient contraires aux principes fondamentaux de la Constitution du Rwanda visant à « extirper définitivement les divisions fondées sur l'appartenance tribale, le régionalisme et autres divisions »; il conseillait à l'organisation de changer ses textes afin de s'y conformer.

Selon ces mêmes informations, par une décision datée du 9 novembre, le ministre de la Justice a renouvelé son refus d'octroyer la personnalité juridique à l'organisation, estimant que celle-ci ne s'était toujours pas conformée à la Constitution et sous-entendant ainsi qu'elle continuait de promouvoir le divisionnisme. Il a également exigé la suspension de ses activités tant qu'elle n'aurait pas remédié à cette situation. N'ayant encore procédé à aucune modification, la CAURWA, dont le mandat est simplement de dénoncer les discriminations que subissent les populations autochtones au Rwanda, est actuellement en cours de négociation avec le gouvernement rwandais, pour démontrer que l’organisation ne viole pas les principes de la Constitution.

La lettre de demande de suspension a été reçue le 24 novembre, soit deux semaines après sa date supposée d'envoi, alors que MM. Zéphirin Kalimba et Amédée Kamota, chargé du programme droits de l'Homme de l’organisation, participaient à la 36ème session de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples. Ceci laisse craindre que cette demande de suspension ne constitue un acte de représailles contre l'activité de la CAURWA à Dakar.

Lors de cette même session, MM. Kalimba et Kamota ont en effet soumis un rapport alternatif, afin de compléter le rapport périodique du Gouvernement rwandais. Les Commissaires se sont appuyés sur leur rapport pour interroger le ministre de la Justice rwandais. A la suite de cette contribution, dans sa réponse aux questions posées par les Commissaires, un représentant du gouvernement rwandais a directement adressé des menaces à M. Zéphirin Kalimba, citant nommément son nom et faisant référence à son épouse et à l'un de ses enfants.

L'Observatoire condamne avec la plus grande fermeté la décision arbitraire de suspendre les activités de la CAURWA, visant ainsi à entraver son action. Tout porte à croire en effet que cette décision fait partie d'une politique de durcissement des autorités rwandaises à l'égard des organisations indépendantes de défense des droits de l'Homme. L'Observatoire rappelle à cet égard que le Parlement rwandais a recommandé la dissolution de la LIPRODHOR en juin 2004, ainsi que celle de quatre autres organisations de défense des droits de l'Homme internationales basées au Rwanda, au motif, toujours non justifié, que ces organisations favoriseraient le divisionnisme au Rwanda (cf. Appels de l’Observatoire RWA 001/0704/OBS 055 et 055.1). L'Observatoire exprime enfin sa plus vive préoccupation au regard de la sécurité et de l'intégrité des représentants de la CAURWA.

Créée en 1995, la CAURWA est une organisation de défense des droits du peuple autochtone « pygmée » du Rwanda, appelé « Batwa », et travaille sur l'ensemble du territoire.

Actions demandées :
Merci d’écrire aux autorités rwandaises et de leur demander de :

i. Garantir la sécurité et l’intégrité physique et morale de MM. Kalimba et Kamota ainsi que de leurs familles et mettre un terme à toute forme de menace ou harcèlement à leur encontre ou tout autre défenseur des droits de l’Homme au Rwanda ;

ii. Revenir sur la suspension des activités de la CAURWA ;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée Générale des Nations-Unies le 9 décembre 1988, en particulier à son article 1, qui dispose que " chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveau national et international ", à son article 5 (b) en vertu duquel “Afin de promouvoir et protéger les droits de l’Homme et les libertés fondamentales, chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, aux niveaux national et international, de former des organisations, associations ou groupes non gouvernementaux, de s’y affilier et d’y participer”, et enfin à son article 6(b) selon lequel " chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres [...] conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales " ;

iv. Se conformer aux dispositions du Pacte International relatif aux droits civils et politiques auquel le Rwanda est partie depuis 1975.


Adresses :
  • Président de la République rwandaise : Président Paul Kagame B.P. 15, Kigali, Rwanda ; Fax : +250 572431, e-mail: presirep@rwanda1.com

  • Premier Ministre, M. Bernard Makuza, B.P. 1334 , Kigali, Rwanda, Fax: +250 83714

  • Ministère de la Défense et de la Sécurité nationale : Général-Major Marcel Gatsinzi B.P. 23, Kigali, Rwanda ; Fax : +250 576969

  • Ministre de la Justice : M. Edda Mukabagwiza, BP 160 Kigali, Rwanda, Fax : + 250 86 509

  • Mission Permanente de la République Rwandaise près de Nations Unies à Genève, Rue de la Servette 93, CH-1202, Genève, Suisse, e-mail : mission.rwanda@ties.itu.int, Fax: +4122 919 10 01


Paris - Genève, 1er décembre 2004
Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.
L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.
L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
Tel et fax FIDH : 33 (0) 1 43 55 20 11 / 01 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : +4122 809 49 39 / 41 22 809 49 29