République démocratique du Congo
12.07.17
Interventions urgentes

Appel à la libération immédiate de M. Eugène DIOMI NDONGALA


MISE A JOUR

Le 21 mars 2019, M. Eugène DIOMI NDONGALA a été libéré de la prison centrale de Makala, à Kinshasa, après avoir bénéficié d'une libération conditionnelle décidée par le Président Félix Tshisekedi.

L’OMCT se félicite de la libération de M. Eugène DIOMI NDONGALA, et remercie toutes les personnes, institutions et organisations qui se sont mobilisées en sa faveur.

L’OMCT appelle néanmoins les autorités congolaises à mettre un terme à tout acte de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de M. Eugène DIOMI NDONGALA et de l’ensemble des opposants politiques et des défenseurs des droits humains dans le pays.


Lettre ouverte au Président de la RépubliqueDémocratique du Congo

Genève,le 12 juillet 2017

Objet : Libération immédiate de M.Eugène DIOMI NDONGALA, annulation de sa condamnation, et indemnisation adéquateet suffisante

L’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) - principalecoalition internationale d’organisations non gouvernementales (ONG) luttantcontre la torture, les exécutions sommaires, les disparitions forcées et toutautre traitement cruel, inhumain ou dégradant - et l’Association Congolaisepour l’Accès à la Justice (ACAJ) - ONG apolitique travaillant pour la promotionet la défense des droits de l’Homme, la démocratie et l’Etat de droit au Congo -sont extrêmement inquiètes quant à la détention actuelle de M. Eugène DIOMI NDONGALA, malgré lademande de libération de la part du Comité des Droits de l’Homme des NationsUnies.

M. Eugène DIOMI NDONGALA, président du parti politiqued’opposition « Démocratie Chrétienne » et porte-parole de la « MajoritéPrésidentielle Populaire » a été enlevé le 27 juin 2012 par des agents desservices de sécurité, puis détenu au secret pendant une période de trois moiset treize jours jusqu’au 10 octobre 2012. Alors qu’un mandat d’arrêt a étédélivré à son encontre le 28 juin 2012 pour viol sur deux mineures, l’opposantpolitique affirme n’avoir été interrogé pendant sa détention que sur lastratégie envisagée par l’opposition pour prendre le pouvoir.

Libéré dans la nuit du 10 octobre 2012 et abandonnésur une route de Kinshasa, il a porté plainte pour enlèvement, détention ausecret et mauvais traitements auprès de l’Auditeur Général des forces armées le15 octobre 2012. Le 8 avril 2013, M. Eugène DIOMI NDONGALA est de nouveau arrêtépar la police et placé en détention préventive, mais n’est informé des chargesà son encontre seulement 10 jours plus tard : « viol et entretien d’unmouvement insurrectionnel dénommé imperium ».

Lors de sa détention préventive, il affirme avoirsubi des mauvais traitements, raison pour laquelle il a dû passer desexamens médicaux au centre hospitalier de la prison centrale de Malaka àKinshasa. Alors qu’il a été recommandé de le transférer dans un centre mieuxéquipé pour sa prise en charge, les autorités sont passées outre et ont privéM. Eugène DIOMI NDONGALA de soins médicaux adéquats pendant son emprisonnement.

Le 26 mars 2014 par un jugement de la Cour suprême dejustice, M. Eugène DIOMI NDONGALA a été condamné à dix ans de réclusion fermepour viol à l’aide de violence sur deux mineures, tentatives de viol etexposition d’enfants à la pornographie.

La Cour ayant statué en premier et dernier ressort,toutes les voies internes de recours ont été épuisées, raison pour laquelle M.Eugène DIOMI NDONGALA a pu porter plainte devant le Comité desDroits de l’Homme des Nations Unies qui a conclu à une violation du PacteInternational relatifs aux Droits Civils et Politiques le 3 novembre 2016.

En particulier, le Comité a constaté qu’aucune desallégations de M. Eugène DIOMI NDONGALA d’enlèvement, de détention arbitraireet de mauvais traitements n’avait fait l’objet d’une enquête.

Qui plus est, le Comité a noté que M. DIOMI NDONGALAavait été privé de soins médicaux adéquats pendant son emprisonnement. Eneffet, il a été transféré à l’hôpital pour quelques jours suite à un effondrementbrutal, mais a été ramené de force en prison malgré sa condition précaire.

En outre, selon le Comité, M. DIOMI NDONGALA n’a pasété jugé par un tribunal indépendant et impartial : en effet, la composition decinq magistrats de la chambre l’ayant jugé en Cour de Cassation n’était pasconforme à la législation interne et aurait dû comprendre au moins sept magistrats.De plus, ses droits de la défense ont été bafoués : ayant subi un étouffementet étant physiquement incapable de prendre la parole, M. Eugène DIOMI NDONGALAs’est vu refuser une courte remise pour faire revenir ses avocats dans lasalle.

Dès lors, pour l’ensemble de ces raisons, le Comité arecommandé à l’Etat de prendre toutes les mesures appropriées pour libérerl’auteur immédiatement, annuler sa condamnation et lui accorder uneindemnisation adéquate.

Jusqu’à présent, aucune de ces recommandations n’a étémise en oeuvre. A cet égard, l’OMCT et l’ACAJ sont particulièrement préoccupéespar l’actuelle détention arbitraire de M. Eugène DIOMI NDONGALA. Nous prionsles autorités de la République Démocratique du Congo de mettre en oeuvre toutesles recommandations du Comité des Droits de l’Homme dans les plus brefs délais,et d’assurer en premier lieu la libération immédiate et inconditionnelle de M.Eugène DIOMI NDONGALA ainsi que son intégrité physique et psychologique. L’OMCTet l’ACAJ demandent également à ce que l’Etat assure la protection effectivedes défenseurs des droits de l’Homme et des opposants politiques,particulièrement exposés à toute forme d’harcèlement, détentions arbitraires, tortureet autres violations graves des droits de l’Homme.

Confiants de l’attention que vous porterez à notredémarche et dans l’attente de votre réponse, nous vous prions de bien vouloiragréer, Excellence Monsieur le Président de la République, l’expression denotre haute considération.

Gerald Staberock

Secrétaire général

OMCT

Georges Kapiamba

Président

ACAJ