République démocratique du Congo
29.04.09
Interventions urgentes

Refoulement de M. Joseph Kabeya par la République du Congo vers la RDC

COD 290409
Expulsion d’un réfugié / Crainte pour l’intégrité physique et psychologique

Le Secrétariat international de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) requiert votre intervention urgente dans la situation suivante en République du Congo (Brazzaville) et en République démocratique du Congo (RDC).

Description des faits

Le Secrétariat international de l’OMCT a été informé par l’Association africaine de défense des Droits de l’Homme (ASADHO), une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, du refoulement de M. Joseph Kabeya, syndicaliste, ressortissant de la RDC et demandeur d’asile politique en République du Congo (Brazzaville), par le Gouvernement de la République du Congo vers Kinshasa (RDC).

Selon les informations reçues, le 6 avril 2009, quatre membres de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST) ont procédé à l’arrestation de M. Joseph Kabeya à son domicile. Après l’avoir soumis à un interrogatoire serré en l’absence de son avocat, ils l’ont conduit, menotté, au cachot de la DGST à Brazzaville.

Le 7 avril 2009 vers 13 heures, les agents de la DGST ont expulsé M. Joseph Kabeya par le Beach (port fluvial) de Brazzaville vers Kinshasa.

Cette expulsion fait suite à la publication dans le bihebdomadaire Talasa n°165 du 2 mars 2009 de l’article intitulé « Joseph Kabeya risque de déposer plainte contre l’Etat congolais », dans lequel M. Kabeya contestait la légalité de la décision n° 092/CESR de rejet de sa demande d’asile prise par la Commission d’éligibilité au statut de réfugié (CESR) depuis 2004 et qui ne lui avait jamais été notifiée plus de quatre ans après. Il remettait également en cause l’impartialité de la majorité des membres de la CESR dont il citait les noms, car travaillant à la DGST, à la police, à l’immigration ainsi que dans l’armée.

Selon M. Kabeya, la CESR aurait refusé sa demande de statut de réfugié en raison, entre autres, de l’existence d’un mandat d’arrêt international qui aurait été lancé à son encontre par le Gouvernement de la RDC, mais M. Kabeya nie avoir connaissance de l’existence d’un tel mandat.

Les agents de la DGST ont renvoyé M. Kabeya vers Kinshasa sans lui avoir donné la possibilité de contester la décision du Gouvernement devant une juridiction compétente, en dépit de ses multiples réclamations. Il lui a également été refusé tout délai raisonnable pour qu’il trouve un autre pays d’accueil. En outre, son avocat, qui a tenté de l’assister à la DGST, a été menacé d’arrestation.

Le Secrétariat international de l’OMCT se montre préoccupé par le fait que le Gouvernement de la République du Congo a violé ses obligations procédant des articles 12 alinéas 1, 3 et 4 de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, et des articles 32 alinéa 3 et 33 alinéa 1 de la Convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, aux termes desquels « toute personne a droit, en cas de persécution, de rechercher et recevoir asile en territoire étranger, et de bénéficier d’un délai raisonnable pour chercher à se faire admettre dans un autre pays ».

L’OMCT reste par ailleurs préoccupée par le fait que M. Joseph Kabeya est depuis contraint de vivre dans la clandestinité à Kinshasa, où il risque à tout moment d’être arrêté par les services de sécurité de la RDC qui l’ont astreint, à son arrivée, de rester à leur disposition. A cet égard l’OMCT rappelle que l’article 9.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel la RDC est partie, stipule que « nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire ».

Rappel des faits

M. Kabeya avait fuit la RDC en 2001 parce qu’il était poursuivi en rapport avec les démêlés qu’il avait avec son ancien employeur, M. Jeannot Bemba, homme d’affaires bien connu à Kinshasa et père de M. Jean-Pierre Bemba, président du Mouvement pour la libération du Congo (MLC) et ancien candidat à l’élection présidentielle de 2006. En effet, en 1999, alors délégué syndical et principal représentant l’Intersyndicale CSC/OTU/UNTC, M. Kabeya a été licencié par M. Jeannot Bemba en raison de son activisme syndical au sein de son entreprise, le Groupe SCIBE-CONGO. A la suite de ce licenciement, M. Kabeya s’était lancé dans plusieurs procédures à l’encontre de M. Jeannot Bemba et de son entreprise, poussant ces derniers à déposer une plainte contre M. Kabeya auprès du Parquet près le Tribunal de Kalamu pour « diffamation » et « imputations dommageables ». Fort de ses moyens financiers et appuis politiques, M. Jeannont Bemba aurait juré de faire condamner et disparaître M. Kabeya qui aurait, selon lui, souillé son honneur. En décembre 1999, M. Kabeya a été convoqué et détenu pendant trois jours avec injonction d’abandonner ses réclamations contre M. Jeannot Bemba. En 2001, M. Kabeya a préféré quitté Kinshasa pour se réfugier au Congo-Brazzaville afin d’éviter toute condamnation.

A son arrivée à Brazzaville, M. Kabeya a adhéré au groupe local des militants de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), parti d’opposition de la RDC, et a depuis adopté à plusieurs occasions des positions critiques à l’encontre du Gouvernement de la RDC.

Actions requises

Merci d’écrire aux autorités de la République démocratique du Congo, afin de leur demander de :

  1. Garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Joseph Kabeya ;
  2. Mettre un terme au harcèlement judiciaire à l’encontre de M. Joseph Kabeya ;
  3. Garantir le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’Homme.
Merci également d’écrire aux autorités de la République du Congo, afin de leur demander de :
  1. Respecter les droits des demandeurs d’asile conformément à ses engagements pris dans la Charte Africaine des droits de l’Homme et des peuples et de la Convention relative aux droits des réfugiés ;
  2. Garantir le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’Homme.

Adresses

République démocratique du Congo :

  • Le Président de la République, S.E M. Joseph Kabila, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Email: upp@ic.cd; Fax +243 88 02 120;
  • Le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, M. Alexis Tambwe Mwamba, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo ;
  • Le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Luzolo Bambi Lesa, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax: + 243 88 05 521, Email : minjustrdc@yahoo.fr
  • Ministre des Droits Humains, M. Upio Karura, Cabinet du Vice-Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax: + 243 12 20 664 ; + 243 9939971 ; Email: mindroitshumains@yahoo.fr
  • Ambassadeur, M. Antoine Mindua Kesia-Mbe, Mission permanente de la République démocratique du Congo, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, e-mail : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

République du Congo :

  • M. Denis Sassou Nguesso, Président de la République, Palais présidentiel, Plateau Centre ville, Brazzaville, Congo. E-mail : firmayessa@yahoo.fr
  • M. Valentin Mavoungou, Directeur général des droits humains et des libertés fondamentales. Email : mvconsulting1955@yahoo.fr
  • M. Aimé Emmanuel Yoka, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice et des Droits Humains, BP 2497 Brazzaville, République du Congo. Tél : (+242) 281 41 67 Fax : (+242) 281 41 67
  • M. Thierry Ngombet, Président de la Commission nationale des droits de l’Homme. Tél. : +242 551 00 28
  • M. Roger Julien Menga, Mission permanente de la République du Congo auprès de l’Office des Nations Unies, 11 Rue des Pâquis, 1201 Genève, Suisse. Tél. : + 41.22.731.88.21. Fax : + 41.22.731.88.17. E-mail : missioncongo@bluewin.ch
    Ambassade de la République du Congo auprès des Institutions de l’Union Européenne, 16 avenue F.D. Roosevelt, 1050 Ixelles, Belgique. Fax : + 32 2 648 42 13

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République Démocratique du Congo et de la République du Congo dans vos pays respectifs.

Genève, le 29 avril 2009

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.