Liban
09.11.11
Interventions urgentes

Une enquête doit être ordonnée sans délai sur les allégations de torture et de détention arbitraire dans l’affaire de M. Tarek Rabaa

Beyrouth, Genève, Paris, Lyon, le8 novembre 2011

Liban: Uneenquête doit être ordonnée sans délai sur les allégations de torture et de détentionarbitraire dans l’affaire de M. Tarek Rabaa.

Les organisations signatairesdemandent une enquête immédiate, indépendante et approfondie sur la torture etla détention arbitraire qu’aurait subies M. Tarek Rabaa au Liban. De plus, lesorganisations signataires appellent les autorités libanaises à le relâcherimmédiatement s’il s’avère que ses aveux lui ont effectivement été arrachéssous la torture.

Tarek Rabaa, citoyenlibanais de 41 ans, qui travaille comme ingénieur à la compagnie téléphoniqueAlfa, a été convoqué pour enquête au Ministère de la Défense le 12 juillet2010. Là-bas, il a été interrogé au sujet d’un numéro de téléphone françaisdont il avait reçu un appel, sur son téléphone portable libanais, alors qu’il assistaità une formation en France en 2007. Les services de renseignements militaireslibanais suspectaient que ce numéro appartenait à un agent du Mossad. Il a étéultérieurement établi par son avocate que ce numéro appartenait en réalité àune compagnie de transport qui s’occupait du groupe de Libanais de la compagnieAlfa venus en formation en France. M. Rabaa a répondu aux questions que luiposaient les services de renseignements militaires libanais.

Juste après cela, M. Rabaa auraitété déshabillé de force et menotté. Au cours de sa détention au centre dedétention du Ministère de la Défense il aurait été torturé à l’électricité,laissé debout pendant 20 jours etgravement frappé sur ses oreilles. Il n’a été autorisé à voir sa sœur –agissant en tant qu’avocate – pour la première fois que 32 jours après sonarrestation. Selon les informations disponibles, il aurait été soumis à latorture et à des mauvais traitements pendant 108 jours au centre de détentiondu Ministère de la Défense avant d’être transféré à la prison de Roumieh, où ilest encore détenu à ce jour.

Durant les interrogatoires, M.Rabaa aurait refusé de signer la plupart des documents que lui présentaient lesservices de renseignements militaires, mais son nom complet (pas sa signature)a été écrit à la main en bas des pages qui ont par la suite été présentées à lajustice militaire comme ses « aveux ». Sur la base de ces documentsla justice militaire a émis un mandat d’arrêt le 28 juillet 2010, 16 joursaprès l’arrestation. Il a été accusé de collaboration avec Israël en vertu desarticles 274, 275 et 278 du code pénal libanais.

Son procès devant le tribunalmilitaire a débuté le 7 février 2011 (à cette session M. Rabaa a perduconnaissance et a dû être transporté à l’hôpital).

Sa défense a présenté toutes lespreuves de son innocence à la justice militaire et le 27 juin 2011, un médecinlégiste a établi un certificat médical qui prouve qu’il a été torturé, mais letribunal a refusé de le prendre en considération. La prochaine session estprévue le 12 décembre 2011.

Si elles s’avèrent fondées, lesallégations mentionnées ci-dessus représentent de graves violations du code deprocédure pénal libanais[1]et des engagements internationaux du Liban[2].Dans ce cas, les organisations signataires considèreraient que M. Rabaa est unevictime de torture et de détention arbitraire, qu’il devrait être immédiatementrelâché, et que les auteurs des exactions devraient être tenus pourresponsables et poursuivis. Les victimes de torture doivent de plus bénéficierdu droit à un recours effectif concernant les souffrances psychologiques etphysiques qui leur ont été infligées, ainsi que du droit à la réparation par lebiais de la compensation et de la réhabilitation.

Les organisations signatairessouhaitent également réitérer que les tribunaux militaires constituent uneviolation sérieuse du droit à un procès équitable prévu par les standardsinternationaux et à l’intégrité du système judiciaire. Ils ne devraient doncavoir aucune compétence sur des civils.

Signataires:

- Centre Libanais des Droits Humains (CLDH)

- Al Karama for Human Rights

- Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)

- ALEF - Act for human rights

- Fédération Internationale des ligues des Droits del’Homme (FIDH)

- Agir Ensemble pour les Droits de l’Homme (AEDH)

- Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture(ACAT – France)

[1] Le code de procédure pénal libanaisprévoit notamment un délai de garde à vue de 48h maximum, le droit pour lesuspect de garder le silence et l’annulation de tout aveu obtenu sous latorture.

[2] Le Liban est partie au Pacte International relatif aux droits civils etpolitiques qui établit notamment les règles pour un procès équitable et à la Convention contre la torture et autrestraitements cruels, inhumains ou dégradants qui prohibe formellement la torture.