27.04.04
Interventions urgentes

Communiqué de presse: L'OMCT tire un bilan très mitigé de la 60e Commission des Droits de l'Homme

COMMUNIQUE DE PRESSE OMCT

L’OMCT tire un bilan très mitigé de la 60e Commission des Droits de l’Homme



Alors que s’achève la 60e Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies, l’OMCT tire un bilan en demi-teinte de cette session où les quelques avancées ne permettent pas de masquer les graves reculs et inconstances qui l’ont ponctuée.

Résolutions thématiques :

Droits de l’Homme et mesures contre-terroriste :

L’OMCT se félicite de l’adoption par consensus de la résolution relative à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste. Celle-ci, présentée à l’initiative du Mexique réaffirme que « les Etats doivent s’assurer que les mesures prisent pour combattre le terrorisme respectent le droit international et plus particulièrement les droits de l’Homme, le droit des réfugiés et le droit humanitaire. L’OMCT approuve la nomination d’un Expert Indépendant pour une durée d’un an, dont le mandat consiste à aider le Haut Commissaire aux droits de l’Homme à examiner cette question, et notamment évaluer si les mesures nationales anti-terroriste sont compatibles avec les droits de l’Homme et de présenter des recommandations concernant les obligations des Etats dans ce domaine. L’OMCT considère que cette résolution est un pas dans la bonne direction, mais rappelle que de nombreuses violations de droits de l’Homme sont commises au nom de la lutte anti-terroriste et estime qu’un mécanisme indépendant reste le meilleur moyen de lutter contre ces violations.
L’OMCT espère désormais que l’expert indépendant qui sera nommé sera unanimement reconnu pour son indépendance et sa compétence.

Torture et autres mauvais traitements :
L’OMCT se félicite de l’adoption par consensus de la résolution condamnant la torture et les autres traitements cruels, inhumains ou dégradants ; cette résolution réaffirme que de telles pratiques ne sauraient être justifiées quelles que soient les circonstances. L’OMCT regrette néanmoins que la prohibition de la torture ne soit pas reconnue explicitement dans la résolution comme une norme du jus cogens. De plus, l’OMCT regrette profondément qu’une nouvelle fois la Commission n’ait pas inclus de recommandations explicites sur les femmes et les enfants dans cette résolution, se contentant de faire référence à la résolution 2001/62. L’OMCT estime que cette simple référence donne l’impression que la problématique sexo-spécifique est désormais suffisamment abordée et ne nécessite plus d’attention particulière de la part du rapporteur spécial. Cependant, au vu des cas de violations de droits de l’Homme qui lui sont quotidiennement transmis, l’OMCT réaffirme le lien prépondérant entre le genre et la torture ou les mauvais traitements.
En outre l’OMCT condamne avec force les attaques de l’Espagne portée à l’encontre du rapporteur spécial, Mr. Théo Van Boven lors de la présentation de son rapport et ses velléités de limiter le mandat de ce dernier. Ces comportements sont contraires aux principes de coopération et de dialogue qui prévalent entre les rapporteurs spéciaux et les Etats. L’OMCT déplore également que lors de ces attaques, la majorité des Etats aient gardé le silence.
Violence contre les femmes :
L’OMCT se réjouit de l’adoption par consensus de la résolution sur l’élimination de la violence contre les femmes, dans laquelle la Commission condamne avec vigueur toute forme de violence contre les femmes et les filles, et enjoint les Etats à prévenir, investiguer et punir tout acte de violence contre les femmes et les filles en spécifiant les différentes actions concrètes à mettre en œuvre et notamment de condamner la violence contre les femmes et ne pas invoquer la coutume, la tradition ou les pratiques liées à la religion ou à la culture pour se soustraire à l’obligation d’agir ainsi que d’adopter une législation nationale adéquate.
Droits de l’enfant :

L’OMCT se félicite de l’adoption des résolutions concernant les droits de l’enfant, malgré l’opposition désormais habituelle des Etats-Unis d’Amérique qui refusent d’y voir inclus comme références-clés la Convention des droits de l’Enfant et la Cour Pénale Internationale ainsi que l’appel fait aux Etats à renoncer à la peine de mort à l’encontre des mineurs.

L’OMCT accueille également favorablement l’adoption par consensus de la résolution sur l’administration de la justice et en particulier la justice des mineurs, et les engagements qui y sont pris. Cependant l’OMCT regrette que la résolution ne contienne pas de recommandations sur les mesures alternatives à l’emprisonnement pour les mineurs en conflit avec la loi, et ce malgré les abus et les violences constants dont ceux-ci sont victimes dans les prisons.

Défenseurs des droits de l’Homme :

L’OMCT se félicite de l’adoption de la résolution sur les défenseurs des droits de l’Homme, et en particulier l’appel fait aux Etats de prendre toutes mesures appropriées pour mettre en œuvre la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme et notamment sur les questions d’impunité.

Droits économiques, sociaux et culturels :
L’OMCT se félicite du renouvellement du mandat du groupe de travail chargé d’examiner les options possibles en ce qui concerne l’élaboration d’un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. L’OMCT espère désormais que les débats des deux prochaines sessions du groupe de travail permettront d’établir un programme d’action pour commencer la rédaction du protocole créant un mécanisme de plainte individuel.
L’OMCT note également que pour la première fois la Commission a exprimé à quel point il était nécessaire et important de renforcer les normes de références s’appliquant aux entreprises trans-nationales dans le domaine des droits de l’Homme. L’OMCT souhaite désormais que les consultations et les études menées par le Haut Commissariat aux droits de l’Homme permettent un débat constructif avec la société civile afin de déterminer ces normes et les moyens d’action pour les mettre en œuvre.

Situations dans les pays :

L’OMCT accueille avec soulagement la décision de nommer un rapporteur spécial sur la situation des droits de l’Homme en Biélorussie, notamment au vue des graves violations dont sont victimes les défenseurs des droits de l’Homme.

L’OMCT rejette avec vigueur la tentative toujours plus forte qu’ont certains Etats membres de la Commission (et parmi eux la Chine, Cuba et le Zimbabwe suivi par les groupes asiatiques et africains) de ne plus condamner les violations de droits de l’Homme dans les pays dans le cadre du point 9. Cette attitude est irresponsable et compromet une nouvelle fois la crédibilité de la Commission. En outre la politisation toujours croissante et les différents marchandages qui permettent à certains pays d’échapper à toute condamnation donnent une image consternante de la Commission.

Aussi l’OMCT dénonce avec vigueur les motions de non-action prises au sujet du Zimbabwe et de la Chine et regrette que le Canada ait finalement renoncé à présenter une résolution sur la situation des droits de l’Homme en Iran. Le rejet de la résolution sur la situation en Tchéchénie est également scandaleux, alors même que l’OMCT avec d’autres ONG n’a cessé d’alerter la communauté internationale sur les graves violations de droits de l’Homme qui s’y produisent et notamment à l’égard des défenseurs de droits de l’Homme. L’OMCT regrette également que Cuba ait décidé de retirer son projet de résolution sur les détentions arbitraire à Guantanamo.

L’OMCT regrette également que les Rapporteurs spéciaux sur le Burundi et la République du Congo aient été remplacés par des Experts indépendants chargés d’assister ces Etats à respecter les droits de l’Homme. Alors que la situation ne cesse de se détériorer au Népal, seule une déclaration du Président relative à l'assistance en matière de droits de l'Homme au Népal a été adoptée, ce que regrette vivement l’OMCT, tout comme elle déplore le peu de consistance de la déclaration du Président au sujet de la situation en Colombie.

Enfin, l’OMCT note qu’après d’intenses négociations, la Commission a adopté une décision sur la situation des droits de l'homme au Soudan dans laquelle elle demande au Président de la Commission de désigner pour une année un expert indépendant sur la situation des droits de l'homme au Soudan. La Commission engage toutes les parties à l'accord de cessez-le-feu de N'djamena à respecter pleinement cet accord. L’OMCT considère que cette décision reste bien vague à l’encontre du gouvernement soudanais et des milices qu’il soutient alors que des crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité contre la population civile de la région du Darfour sont allégués.



Contact à l’OMCT :
Patrick Mutzenberg : pm@omct.org