Tunisie
17.07.07
Interventions urgentes

Ouverture d'une information judiciaire contre Me Abderraouf Ayadi

Nouvelles informations
TUN 001 / 0407 / OBS 037.1
Harcèlement
Tunisie
17 juillet 2007

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Tunisie.

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé par le Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) de l’ouverture d’une information judiciaire contre Me Abderraouf Ayadi, avocat, ancien membre du Conseil de l’Ordre des avocats et ancien secrétaire général du CNLT.

Selon les informations reçues, une information judiciaire pour agression sur la personne du chef de poste de Bab Bnet (dont dépend le Palais de justice) vient d’être ouverte contre Me Abderraouf Ayadi alors que ce dernier avait été agressé, le 14 avril 2007, par un officier de la police politique devant la salle d’audience du tribunal de première instance à Tunis ; il se préparait alors à plaider dans une affaire où comparaissaient des prévenus en vertu de la loi anti-terroriste (Cf. rappel des faits). Cette information judiciaire a été ouverte peu après une audition, le 12 juillet 2007, de Me Abdelfattah Mourou, collègue de Me Ayadi qui était entendu par le procureur de la République comme témoin de l’agression du 14 avril.

Parallèlement, Me Ayadi continue de faire l’objet d’actes de harcèlement de la part des services spéciaux du ministère de l’Intérieur. Ainsi, le 7 juillet 2007, Me. Ayadi a aperçu un homme en train de déposer une enveloppe sur sa boîte aux lettres, puis s’enfuir précipitamment à son arrivée. Considérant l’enveloppe suspecte par sa similitude à celle qu’il avait reçue une semaine auparavant, et qui contenait un photomontage mettant en scène son épouse, il s’est rendu dans un poste de police, où il a demandé à un agent de procéder à l’ouverture de l’enveloppe. Cette dernière contenait un DVD. Devinant que son contenu portait une nouvelle fois atteinte à son honneur, Me Ayadi à demandé à ce que cet acte soit consigné dans un procès-verbal afin d’engager une plainte. L’agent a toutefois reçu l’ordre de sa hiérarchie de ne pas le faire, son chef se prévalant de « consignes reçues à cet effet » et acceptant tout au plus de consigner les faits sur un papier volant. Me Ayadi s’est retiré en refusant cette procédure et en protestant contre son illégalité, laissant l’enveloppe avec son contenu sur le bureau de l’agent. Une demi heure plus tard, sa secrétaire a retrouvé la même enveloppe dans la boîte aux lettres.

L’Observatoire exprime sa profonde préoccupation à l’égard de ces faits, qui s’inscrivent dans le cadre plus général de représailles des défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie, et notamment des avocats engagés dans la défense des droits de l’Homme. L’Observatoire rappelle que ces derniers font l’objet d’un harcèlement permanent dans leur vie quotidienne, visant également les membres de leur familles, qu’ils sont également souvent l’objet de graves actes de violence et qu’enfin leur clientèle fait fréquemment l’objet de pressions pour les dissuader d’avoir recours à leur conseil (Cf. rapport annuel 2006 de l’Observatoire).

Rappel des faits :

Le 14 avril 2007, M. Abderraouf Ayadi a été agressé par un officier de la police politique devant la salle d’audience du tribunal de première instance à Tunis, où il se préparait à plaider dans une affaire où comparaissaient des prévenus en vertu de la loi anti-terroriste. Me Ayadi a été frappé à coup de pieds par un agent de police tandis que d’autres agents ont formé un barrage devant la porte pour l’empêcher d’entrer dans la salle d’audience.

Auparavant, Me Ayadi avait été témoin de l’expulsion par la police politique de M. Ali Ben Salem, vice-président de l’Association de lutte contre la torture en Tunisie (ALTT) et président de la section de Bizerte de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), de la salle d’audience, afin de l’empêcher d’observer le procès.

Actions demandées :

Merci de bien vouloir écrire aux autorités tunisiennes en leur demandant de :

  1. garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Abderraouf Ayadi et de M. Ali Ben Salem, ainsi que des membres de leurs familles et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie ;
  2. Mener une enquête indépendante sur les faits décrits ci-dessus, afin que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés conformément à la loi en vigueur ;
  3. mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;
  4. se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”, son article 9.3.C qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres d’offrir et prêter une assistance juridique professionnelle qualifiée ou tout autre conseil et appui pertinents pour la défense des droits de l’Homme et des libertés fondamentales », et son article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;
  5. plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie.

Adresses :

  • M. Zine el-Abidine Ben Ali, Président de la République, Palais de Carthage, 2016 Carthage, Tunisie, Fax: +216 71 744 721 ou +216 71 731 009
  • M. Mohamed Ghannouchi, Premier Ministre, Secrétariat Général du Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax: +216 71 562 378
  • M. Rafik Belhaj Kacem, Ministère de l’Intérieur et du Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Tunisie, Fax: ++ 216 71 340 888; Email : mint@ministeres.tn
  • M. Kamel Morjane, Ministère de la Défense Nationale, Avenue Bab Mnara, La Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax: +216 71 561 804
  • M. Bechir Tekkari, Ministère de la Justice et des Droits de l’homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 568 106 ; Email : mju@ministeres.tn
  • Ambassadeur, S.E M. Samir Labidi, Mission permanente de la Tunisie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, 58 Rue Moillebeau, Case postale 272, 1211 Genève 19, Suisse, Fax : +41 22 734 06 63 ; Email : mission.tunisia@ties.itu.int
  • Ambassadeur M. Mehrez Benrhouma, Ambassade de la Tunisie à Bruxelles, 278 avenue de Tervueren, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique, Fax : + 32 2 771 94 33; Email : amb.detenusie@brutele.be

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Genève - Paris, le 17 juillet 2007

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29