Niger
11.08.05
Interventions urgentes

Niger: Détention arbitraire de M. Abdoul Razak Amadou Guirey

APPEL URGENT - L’OBSERVATOIRE

NER 001 / 0805 / OBS 067


Arrestation et détention arbitraire / Procédures judiciaires
Niger

11 août 2005

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), vous prie d’intervenir d’urgence concernant la situation suivante au Niger.

Description des faits :

L’Observatoire a été informé par le Comité de réflexion et d’orientation indépendant pour la sauvegarde des acquis démocratiques (CROISADE) et l’Association nigérienne de défense des droits de l’Homme (ANDDH) de l’arrestation et de la détention de M. Abdoul Razak Amadou Guirey, secrétaire général adjoint de la coordination départementale de CROISADE à Gaya (286 km au sud de Niamey).

Selon les informations reçues, M. Abdoul Razak Amadou Guirey a été arrêté le 8 août 2005, sur décision du juge du tribunal de Gaya, pour avoir dénoncé, dans une déclaration publiée le même jour, la détention de M. Oumarou Souley, président de la coordination départementale de CROISADE à Gaya. Ce dernier, accusé de “diffamation et injure”, a été condamné le 26 juillet 2005 par le Tribunal de Gaya à deux mois de prison ferme et 25.000 francs CFA d’amende, sur la base d’une plainte de la directrice de l’hôpital de district de cette localité. M. Souley avait dénoncé publiquement, dans un pamphlet virulent, les dysfonctionnements et la mauvaise gestion de l’hôpital. M. Souley est actuellement détenu à la prison civile de Gaya.

Sans se prononcer sur le ton employé et les qualificatifs retenus dans la déclaration de M. Souley, l’Observatoire constate que ce dernier n’en a pas moins soulevé un problème sérieux relatif au non respect au droit à la santé, que la justice ne semble pas avoir pris en compte. M. Abdoul Razak Amadou Guirey s’est alors inquiété du fait que le fond du problème (les dysfonctionnements graves de l’hôpital) ne fasse pas l’objet d’un traitement par les pouvoirs publics.

Détenu dans un premier temps au commissariat de la ville de Gaya, M. Abdoul Razak Amadou Guirey a été présenté au juge le 9 août 2005, avant d’être déféré à la prison civile de la ville. Sa première comparution, prévue le même jour, a été reportée au 12 août 2005, le prévenu ayant indiqué qu’il n’était pas en mesure d’assurer sa défense. Il est accusé de “discrédit sur décision de la justice”.

L’Observatoire craint que le droit de M. Razak Amadou Guirey à bénéficier d’un procès juste et équitable ne soit pas garanti. Il doit en effet être jugé par le juge Hamza Guiré, qui est à l’origine de la condamnation de M. Oumarou Souley.

L’Observatoire exprime sa plus vive préoccupation à l’égard de ces faits, qui constituent une violation flagrante de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, dont l’article 6.b prévoit que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales”.

Par ailleurs, l’Observatoire, qui a effectué une mission d’enquête sur les défenseurs des droits de l’Homme au Niger en juin 2005, note que ces faits s’inscrivent dans le cadre d’actes de harcèlement récurrents à l’encontre des membres de CROISADE et, plus généralement, des défenseurs des droits de l’Homme au Niger. Ainsi, M. Marou Amadou, président de CROISADE, est empêché d’exercer sa profession d’avocat depuis qu’il lui a été interdit de prêter serment en décembre 2002, suite à des poursuites judiciaires - toujours pendantes devant la Cour de cassation - liées à ses prises de position en faveur de la défense des droits de l’Homme. Il reste également poursuivi pour “complot contre l’autorité de l’Etat ” en sa qualité de secrétaire exécutif de la Coalition Equité-Qualité contre la vie chère au Niger, de même que M. Nouhou Arzika, président de l’Organisation nationale de défense des consommateurs et dirigeant de la Coalition Equité-Qualité, M. Moustapha Kadi, trésorier de la Coalition et président de SOS Kandadji, M. Moussa Thangari, président du Groupe Alternative Niger et responsable de la Coordination démocratique de la société civile au Niger (CDSCN), et M. Issa Kassoum, secrétaire général du Syndicat national des enseignants du Niger et également coordinateur de la CDSCN. Ils avaient été arrêtés et détenus en mars 2005 après avoir participé à un mouvement de la société civile contre la vie chère au Niger (cf. lettre ouverte de l’Observatoire du 25 mai 2005). Enfin, le 10 mai 2005, les bureaux de CROISADE ont été fermés suite à son impossibilité de payer un loyer dont le montant a été subitement élevé de 120 %. A ce jour, l’organisation n’a pu retrouver de nouveaux locaux.

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités du Niger afin de leur demander de :
  • Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Oumarou Souley et de M. Abdoul Razak Amadou Guirey ;

  • Veiller à ce que M. Abdoul Razak Amadou Guirey bénéficie d’un procès juste et équitable, afin que les charges à son encontre soient abandonnées, en raison de leur caractère arbitraire ;

  • Veiller à ce qu’un terme soit mis à tout acte de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme nigériens, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

  • Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998 et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”, son article 6b sus-mentionné, et son article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;

  • Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Niger.


Adresses :


  • M. Mamadou Tandja, Président de la République du Niger, Fax : + 227 73 34 30.

  • M. Hama Amadou, Premier Ministre, Fax : + 227 73 58 59.

  • M. Mahamane Ousmane, Président de l’Assemblée Nationale, Fax : + 227 73 60 27.

  • M. Matty Elhadj Moussa, Ministre de la Justice, Fax : +227 72 37 77.

  • M. Garba Lompo, Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, Tel/Fax + 227 72 26 54, e-mail : Cndhlf@intnet.ne

  • Mme Adama Harouna, Procureur général, Fax : + 227 75 33 97.

  • Ambassadeur, M. Abdou Abarry, Mission permanente du Niger auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, Chancellerie diplomatique, Avenue Franklin Roosevelt 78, 1050 Bruxelles, Belgique, Fax : + 32 2 648 27 84, E-mail : ambanigerbru@skynet.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Niger dans vos pays respectifs.

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Genève - Paris, le 11 août 2005

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du Prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence:
Email : observatoire@iprolink.ch
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : +41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29