Djibouti
22.02.11
Interventions urgentes

Libération sous contrôle judiciaire de M. Jean-Paul Noël Abdi pour raisons de santé

APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE

Nouvelles informations

DJI 001 / 0211 / OBS016.3

Libération sous contrôlejudiciaire pour raisons de santé

Djibouti

22 février 2011

L’Observatoire pour la protection des défenseurs desdroits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale desligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre latorture (OMCT), a reçu de nouvelles informations sur la situation suivante à Djibouti.

Nouvelles informations :

L'Observatoire a été informé de la libération provisoirede M. Jean-PaulNoël Abdi, président de la Ligue djiboutienne desdroits humains (LDDH) pour raisons de santé. Ce dernier, qui restait détenu à la prison de Gabodedepuis le 9 février 2011, souffre de diabète et de problèmes cardiaques. Son état s'étaitconsidérablement détérioré en fin de semaine dernière (cf. rappel des faits).

Le 21 février 2011, M. Noël Abdi a été libéré souscontrôle judiciaire suite à une requête de mise en liberté provisoire déposéele 19 février par ses avocats[1], Mes Zakaria Abdillahi et Mohamed Foulie,auprès du juge d'instruction.

M. Noël Abdi, dont l'état de santé reste préoccupant, aregagné son domicile. Il devait subir une série d'examens hier après-midi.

L'Observatoire se félicite de la libération de M.Jean-Paul Noël Abdi, mais rappelle que ce dernier ainsi que M. Farah Abadid Heldid, membre de la LDDH arrêté le 5 février et qui resteactuellement détenu, sont accusés depuis le 9 février 2011 de"participation à un mouvement insurrectionnel" et encourent jusqu'àquinze ans de réclusion criminelle et une amende de 7 000 000 Francsdjiboutiens (cf. rappel des faits).

L'Observatoiredemande la libération immédiate et inconditionnelle de M. Heldid ainsi quel'abandon des poursuites à l'encontre des deux défenseurs, en ce qu'elles nesemblent viser qu'à sanctionner leurs activités de défense des droits del'Homme et ne semblent étayées par aucun élément de preuve valable.

Rappeldes faits :

Le9 février 2011 au matin, M. Jean-Paul Noël Abdi a été arrêté par des élémentsde la Gendarmerie nationale et conduit dans les locaux de la Direction de laGendarmerie nationale située à Djibouti-ville dans le lieu dit de "LaFiche".

Vers17 heures le même jour, M. Jean-Paul Noël Abdi et M. Farah Abadid Heldid ontété déferrés devant le parquet de Djibouti, et accusés de "participation àun mouvement insurrectionnel" sur la base des articles 145 et 146.4 duCode pénal djiboutien. Ils ont ensuite été placés sous mandat de dépôt.

Le 17 février 2011, M. Jean-PaulNoël Abdi a été victime d'un malaise et a dû être transféré à l'hôpital Peltierde Djibouti. Le médecin urgentiste qui l'a examiné a conclu à la nécessité d'untransfert d'urgence en soins intensifs. Les agents de police présents sur leslieux ont cependant refusé cette hospitalisation, et l'ont reconduit à laprison de Gabode dans le courant de la nuit.

Lesaccusations portées contre les deux défenseurs seraient liées à leur soutien au"mouvement" des étudiants et lycéens qui manifestent depuis décembre 2010dans les rues de Djibouti. Ce mouvement estudiantin a été sévèrement réprimé etplusieurs dizaines de lycéens, étudiants et membres de l'opposition sonttoujours détenus de façon arbitraire à la prison de Gabode et au centre derétention de Nagad. M. Jean-Paul Noël Abdi avait en réalité dénoncé larépression par les autorités de Djibouti de ces manifestations, au cours dumois de décembre 2010[2]. L'Observatoire craint que M. Heldid ne soit poursuivipour son appartenance à la LDDH.

Lesaccusations à leur encontre auraient été principalement formulées suite à destémoignages non-crédibles, et de surcroît contradictoires. Certains témoignagesmentionnent en effet la prétendue participation de M. Noël Abdi et de M. FarahAbadid Heldid à une réunion le 3 février 2011 en présence de membres del'opposition, où ils auraient "incité des jeunes à la révolte". Cestémoignages auraient en réalité été formulés par certains de leurs codétenus enéchange de leur libération. D'autres témoignages attestent au contraire que MM.Noël Abdi et Farah Abadid Heldid n'étaient pas présents ce jour-là, et n'ontdonc pas pris la parole. Ces éléments seraient par ailleurs étayés par desécoutes téléphoniques, mais le dossier d'accusation ne les mentionne pas.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie d’intervenir auprès des autoritésde Djibouti et de leur demander de :

i. Garantiren toutes circonstances l'intégrité physique et psychologique de M. Jean-PaulNoël Abdi et de M. Farah AbadidHeldid,et de tous les défenseurs des droits de l'Homme djiboutiens ;

ii. Procéderà l'abandon des charges à leur encontre en ce qu'elles ne visent manifestementqu'à sanctionner leurs activités de défense des droits de l'Homme ;

iii. Libérerde manière immédiate et inconditionnelle M.Farah Abadid Heldid, ence que son arrestation et sa détention ne semblent viser qu'à sanctionner sesactivités de défense des droits de l'Homme ;

iv. Mettreun terme à toute forme de harcèlement à leur encontre, ainsi qu’à celle de tousles défenseurs des droits de l’Homme à Djibouti, afin qu’ils puissent menerleurs activités de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

v. Seconformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits del’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nationsunies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son :

- article1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avecd’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Hommeet des libertés fondamentales aux niveaux national et international” ;

- article6(b), qui dispose que “chacun a le droit,individuellement ou en association avec d’autres de publier, communiquer àautrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances su tousles droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales”

- article12.2, qui dispose que “l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurerque les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou enassociation avec d’autres, de toute violence, menace, représailles,discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans lecadre de l’exercice légitime des droits visés dans la [...] Déclaration ” ;

vi. Plusgénéralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle desdroits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs auxdroits de l’Homme ratifiés par Djibouti.

Adresses :

· SonExcellence Ismail Omar Guelleh, Président de la République, PalaisPrésidentiel, BP 6, Djibouti Ville, République de Djibouti. Tel / Fax : 00253 35 50 49 / 00 253 35 02 01.

· MonsieurMohamed Barkat Abdillahi, Ministre de la Justice, des affaires pénitentiaireset musulmanes, chargé des droits de l’Homme, BP 12, Djibouti Ville, Républiquede Djibouti. Tel / Fax : 00 253 35 54 20

· MonsieurMaki Omar Abdoulkader, Procureur de la République, Tel / Fax : 00 253 3569 90. Email : likmik@caramail.com.

· MonsieurAli Hassan Bahdon, Ministère de l'Equipement et des Transports, BoulevardMaréchal Joffre, BP 2501, Tel: (253) 35 7913 / Fax: (253) 35 59 79.

· AmbassadeurMohamedSiad Doualeh, Missionpermanente de Djibouti auprès de l’Office des Nations unies à Genève, 19 cheminLouis Dunant, 1202 Genève, Suisse, Fax : + 41 22 749 10 91. Email :mission.djibouti@djibouti.ch

· Ambassadede Djibouti à Bruxelles, 204 avenue F.D. Roosevelt, 1050 Bruxelles, Belgique,Tel : + 32 2 347 69 67, Fax : + 32 2 347 69 63 ; Email : amb_djib@yahoo.fr

Prière d’écrire également auxreprésentations diplomatiques de Djibouti dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 22 février 2011

Merci de bien vouloirinformer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code decet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDHet de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes deviolations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

· E-mail: Appeals@fidh-omct.org

·Telet fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80

· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39/ 41 22 809 49 29

[1] M. Noël Abdi devraémarger tous les jeudis auprès du juge d'instruction.

[2] L'Observatoirerappelle que M. Abdi a fait l'objet de multiples arrestations ces dernièresannées, et qu'une procédure judiciaire à son encontre est toujours pendante.Cf., notamment, lettre ouverte de l'Observatoire à Mme Khalija Abeba, PremièrePrésidente de la Cour suprême, 15 janvier 2010. Les audiences dans cetteaffaire sont régulièrement reportées sine die depuis 2008.