Maroc et Sahara occidental
15.07.03
Interventions urgentes

Maroc - communiqué: l'OMCT inquiète face à la violence faite aux femmes.

COMMUNIQUE DE PRESSE


Aux représentants de la presse

Genève, le 15 juillet 2003



Maroc : l’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) exprime son inquiétude face à la violence faite aux femmes au Maroc à la 29ème session du Comité des Nations Unies sur l’élimination de la discrimination contre les femmes.

Le Comité des Nations Unies sur l’élimination de la discrimination contre les femmes examine ce jour la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes par le Maroc. Dans un rapport alternatif intitulé « Violence against Women in Morocco » qui a été soumis au Comité, l’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) exprime son inquiétude sur la violence très répandue exercée contre les femmes dans la sphère privée et communautaire.

La discrimination contre les femmes persiste au Maroc aussi bien de jure que de facto. Le gouvernement marocain a émis in certain nombre de réserves sur la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes, diminuant ainsi sérieusement son efficacité. De plus, la législation marocaine discrimine les femmes dans plusieurs domaines, notamment avec l’âge minimum du mariage, la possibilité de contracter le mariage, la polygamie et le divorce. Par ailleurs, les femmes ont un niveau d’alphabétisation plus bas que les hommes et disposent d’une représentativité très faible dans les segments supérieurs du marché du travail.

Le rapport de l’OMCT déplore le fait que, malgré l’existence de peu de documentation et d’allégations sur la violence domestique, celle-ci semble constituer un sérieux problème. Plusieurs obstacles empêchent les femmes et les jeunes filles de déposer des plaintes en relation avec la violence domestique. Ceux-ci incluent notamment : les croyances sociales traditionnelles sur l’infériorité de la femme ; la difficulté sociale de dénoncer un mari ; l’absence de législation spécifique sur la violence faite aux femmes au sein de la famille ; et la carence de sensibilité des officiels chargés de l’exécution des lois. En outre, l’OMCT constate une insuffisance de structures adéquates pour accueillir les femmes battues, et celles-ci font face à des difficultés importantes pour obtenir le divorce pour cause de violence perpétrée à leur encontre. En effet, prouver l’agression physique dans le cadre familial nécessite un certificat médical ainsi qu’un témoin. Le rapport montre ainsi que ces obstacles perpétuent l’idée que la violence domestique est acceptable jusqu’à un certain point, et permettent aux auteurs de jouir de l’impunité. L’OMCT demande donc au gouvernement marocain de développer une politique générale ainsi qu’une réponse législative au problème de la violence domestique, permettant ainsi d’éliminer les obstacles cités plus haut.

Le viol semble également être sous-documenté, notamment en raison de l’importance sociale que revêt la virginité, ainsi que de la difficulté des femmes à apporter des preuves, en raison de l’absence de témoin du crime. Un autre point qui semble décourager les femmes à porter plainte, est le risque d’être accusées d’avoir eu des relations sexuelles illégales, alors qu’elles sont enceintes et ne peuvent apporter les preuves du viol. L’OMCT recommande au gouvernement marocain d’abroger la question du témoignage en cas de viol, qui met, de fait, le fardeau de l’accusation sur la victime.

L’OMCT relève également dans son rapport sa grave préoccupation face à l'augmentation de la traite des femmes et des jeunes filles à des fins de prostitution, ainsi qu’à la situation d’exploitation des jeunes employées de maison. L’OMCT note que les prostituées peuvent se trouver doublement victimes : tout d’abord, forcées de se prostituer, puis détenues puisque la prostitution est illégale. Etant donné qu’aucune législation ne criminalise actuellement le trafic des êtres humains, l’OMCT recommande au gouvernement marocain d’adopter une nouvelle législation qui criminalise ces actes, et garantisse notamment aux femmes et aux jeunes filles victimes d’exploitation sexuelles de ne pas être poursuivies.

En conclusion, le rapport de l’OMCT indique que, malgré le fait que le Maroc a, en regard du droit international, l’obligation de prévenir, enquêter, poursuivre et punir toutes formes de violences faites aux femmes, qu’elles soient commises par des personnes privées ou par des agents de l’Etat, celle-ci n’a pas été mise en oeuvre au niveau national.



Pour plus d’informations ou des commandes d’exemplaires du rapport « Violence against Women in Morocco » (en anglais seulement), prière de contacter :
Carin Benninger-Budel +4122 809 49 39 ou cbb@omct.org