Maroc et Sahara occidental
16.09.05
Interventions urgentes

Maroc: Déterioration de la santé de prisionniers politiques sahraouis / Grève de la faim

Cas MAR 020905.1 - Suivi du Cas MAR 020905

Grave détérioration de l'état de la santé / Grève de la faim / Préoccupation concernant l'intégrité physique et psychologique des prisonniers politiques sahraouis

Genève, le 16 septembre 2005

Le Secrétariat international de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) requiert votre intervention Très URGENTE dans la situation suivante au Sahara Occidental / Maroc.

Nouvelles informations

Le Secrétariat international de l'OMCT a reçu avec grande préoccupation des nouvelles informations concernant la détérioration de l'état de la santé de plusieurs prisonniers politiques sahraouis qui poursuivent, depuis le huit (8) août 2005, une grève de la faim dans leurs prisons respectives, à savoir: la Prison Noire de El Aaiun, au Sahara Occidental; les pénitencier marocains d'Ait Melloul à Agadir, et d'Oukacha à Casablanca.

Selon les informations reçues de différentes organisations dont l’« Asociación de Familiares de Detenidos y Desaparecidos Saharaouis » (AFAPREDESA), il y a déjà presque 40 jours que les prisonniers politiques sahraouis ont entamé une grève de la faim dans les prisons marocaines de El Aaiun, d’Agadir et de Casablanca. L'intégrité physique et la vie des prisonniers sont sérieusement menacées par cette grève, qui est en train de causer de dommages irréversibles à leur santé. Selon les mêmes informations, plusieurs des prisonniers - toujours en grève de la faim - souffrent aussi des conséquences d'actes de torture et mauvais traitements qui leur ont été infligés dans des centres secrets de détention. D'autres prisonniers souffrent de maladies chroniques des reins, de rhumatismes, et/ou d’affections cardiaques, etc.

D'après les informations reçues, l’un des prisonniers politiques sahraoui, M. El Wali Amaidan (Amidan Elouali), "est en danger de mort" et doit se faire opérer d'urgence d'une lésion intestinale. Par ailleurs, le 12 septembre 2005, deux autres prisonniers, MM. Buchama Nafaa et Aluat Sidi Mohamed, ont perdu connaissance. D'après les informations reçues, l'état de la santé des prisonniers politiques en grève de la faim s'est aggravée de jour en jour et, selon les plaintes déposées, à la date du 14 septembre 2005, la situation était la suivante:
  • Mme Aminetou HAIDAR, dont l’état de santé était critique depuis plusieurs jours, a été conduite, inconsciente, à l'hôpital BEN EL MEHDI le soir du 14 septembre;
  • M. Ali Salem TAMEK souffrait, à cette même date et depuis trois jours, de très forte fièvre;
  • M. Brahim NOUMRIA présente une incapacité motrice et il s’exprime avec une grande difficulté; il ne pèse plus que 45 kilos. Le samedi 9 septembre déjà, il avait perdu connaissance pendant 3 heures et il souffre des maladies chroniques. Il a été détenu antérieurement 4 fois, en 1983, 1985, 1987 et 1991;
  • M. Elouali AMADIAN a sombré dans le coma et a dû être opéré des intestins, afin de sauver sa vie. Par ailleurs les visites de ses proches lui sont interdites;
  • M. Lehsen ZREIGUINAT, gravement affaibli par sa grève de la faim, présente une accumulation de pathologies, telles que la gale, des douleurs abdominales, une perte de vision et des évanouissements continus.


Selon les informations, le matin du 14 septembre, 4 policiers de la Prison Noire de El Aaiun ont emmené M. Lehsen Zreiguinat, enveloppé dans une couverture, et l'ont conduit à la Cour d'Appel. Le Président de la Cour, à la grande surprise des personnes présentes dans la salle (familles des prisonniers politiques, membres de la police secrète et avocats défenseurs), a refusé de le juger et a intimé l’ordre de le faire sortir pour qu’il soit mis à la disposition du Procureur.
Selon les informations, le Procureur a ordonné le retour immédiat de M. Lehsen Zreiguinat à la Prison Noire de El Aaiun, après avoir essayé de le convaincre d'interrompre la grève de la faim, ce à quoi M. Lehsen a répondu "Dignité ou martyre". Cependant vers 16 h 00, ce même 14 septembre 2005, M. Lehsen Zreiguinat, décharné et dans un état visiblement plus détérioré, a été laissé en liberté conditionnelle et ramené chez lui, où il reçoit de nombreuses visites de la population sahraoui.

D'autre part, d'après les nouvelles informations et selon les plaintes déposées, tant M. Brahim Numria que MM. Lidri El Hussein (ou Houssein Lidri) et Larbi Massud, ont subi de graves tortures depuis leur arrestation, le 20 Juillet 2005. D'après les plaintes déposées, ces trois détenus ont été sauvagement battus, en plus d'être soumis à divers sévices tels que: « pieds et mains liés derrière leur dos sur lequel étaient placés des objets lourds, ils étaient pendus dans cette position à une barre de fer horizontale », « ficelés comme des saucissons sur une longue table, on leur introduisait la tête dans un mélange de détergent et d’urine dans le but de les asphyxier », et même « on leur infligea de longues séances de décharges électriques sur les parties les plus sensibles du corps », ou « ils étaient pendus pendant de nombreuses heures dans la position du "poulet grillé" ». Selon les dénonciations, toutes ces tortures leur furent infligées dans les locaux du Commissariat de Police de El Aaiun.

D'après les informations, le 1er août 2005, M. Brahim Numria et ses 4 compagnons prisonniers politiques, MM. Ali Salem Tamek, Mohamed El Mutawakil, Hussein Lidri et Larbi Massud, ont été sortis de leur cellule de la Prison Noire de El Aaiun et transférés dans des conditions inhumaines à la prison d'Oukacha, à Casablanca, Maroc.

D'après les informations, des plaintes avaient déjà été élevées pour dénoncer la détérioration de la santé des prisonniers politiques car plusieurs détenus se seraient évanouis sans que, semble-t-il, les autorités ne leur aient procuré les soins médicaux exigés par leur état. En particulier, on avait dénoncé le cas du détenu et leader politique M. Abderrahman Bougarfa qui avait perdu connaissance. Les autres prisonniers politiques, qui présentent une sérieuse détérioration de leur état de santé et se trouvent même dans un état grave, sont MM. Elhoussein Ndour (N° 26136), Lahcen Zraiguinat (N° 26126), Dawdi Omar (N° 26230), Mahmoud Mustapha Lhaddad (N° 25296), Amaidan El ouali et Ejanhi Lakhlifa.

Le Secrétariat international de l’OMCT manifeste à nouveau sa vive préoccupation pour la sécurité ainsi que pour la santé et l’intégrité physique et psychologique des prisonniers politiques sahraouis, cités tant dans le premier Appel Urgent que dans celui-ci, et qui poursuivent une grève de la faim depuis le huit août 2005 dans les prisons où ils sont incarcérés. Le Secrétariat international de l’OMCT demande donc au gouvernement marocain d’adopter immédiatement les mesures les plus urgentes et appropriées afin que tous les grévistes de la faim puissent recevoir gratuitement des soins médicaux adéquats et également que leurs cas soient étudiés de toute urgence afin qu’ils puissent interrompre cette grève de la faim utilisée ici comme mécanisme de dénonciation.

Rappel des faits

Le Secrétariat international de l’OMCT avait été informé de la sérieuse préoccupation existante concernant la santé et l'intégrité physique et psychologique de nombreux prisonniers politiques sahraouis qui poursuivent, depuis le 2 août 2005, une grève de la faim dans leurs prisons respectives, à savoir: la Prison Noire de El Aaiun au Sahara Occidental; la prison d'Ait Melloul à Agadir, Maroc, et la prison d'Oukacha à Casablanca, Maroc, (voir l'Appel Urgent de l'OMCT: Cas MAR 020905).

Selon les informations, les objectifs des prisonniers qui poursuivent cette grève visent, entre autres choses: à protester pour la détention de chacun d’entre eux, détention due, d’après les dénonciations, au fait d’avoir exprimé leurs opinions et de s’être manifestés pacifiquement. Par cette action ils prétendent également manifester leur désaccord pour le transfert des défenseurs des droits de l’homme sahraouis de la Prison Noire de El Aaiun à des lieux de détention inconnus.

Par ailleurs, les prisonniers en grève ont exprimé clairement leurs revendications pour l’amélioration de la situation de confinement à laquelle ils se trouvent ; pour être séparés des prisonniers communs, ne pas être traités comme des délinquants mais comme des prisonniers politiques ; pour recevoir une visite quotidienne de leurs proches ; pour que leur soit garantie une assistance médicale ; pour avoir accès à la presse écrite ainsi qu’à la radio ; pour que l’administration pénitentiaire cesse les fouilles et –selon les dénonciations- les vols de ce que leur apportent leurs familles comme la nourriture et les objets de toilette. Ils réclament également une investigation sur les cas de torture et de mauvais traitements qui leur ont été infligés afin que les responsables de ces actes soient traduits devant un tribunal et exigent de pouvoir jouir de tous les droits internationalement reconnus aux prisonniers politiques, tels qu’ils sont mentionnés dans les Conventions Internationales y relatives (voir la liste de détenus politiques sahraouis qui poursuivent la grève de la faim dans l’Appel Urgent de l’OMCT : Cas MAR 020905).

Les détenus ont suggéré aux institutions compétentes d’envoyer un comité central du Ministère de la Justice ou de l’Administration des Prisons, afin de permettre de mener à bien les négociations. Ce comité aurait pour but d’établir un dialogue avec le prisonnier M. Ali Salem Tamek, nommé par le groupe leur représentant.

Selon les informations, le 26 août, deux des prisonniers politiques sahraouis en grève de la faim, MM. Yaya Bachir et Elmousaui Dkhil puis, le 27 août, un autre d’entre eux, M. Hammadi Elkarcha, furent transférés, souffrant de crises cardiaques et d’évanouissements, dans des conditions inhumaines à l’Hôpital de El Aaiun.. D’après les dénonciations, dans les trois cas les médecins essayèrent de faire pression sur eux pour qu’ils mettent fin cette grève de la faim et, face au refus des prisonniers, ils les firent reconduire à la Prison Noire de El Aaiun.

Actions requises :

Nous vous prions de bien vouloir écrire aux autorités Marocaines, en leur demandant :
i. de prendre toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder l’intégrité physique et psychologique des prisonniers politiques sahraouis qui, depuis le 8 août 2005, poursuivent une grève de la faim dans leurs prisons respectives, à savoir: la Prison Noire de El Aaiun au Sahara Occidental; la prison d'Ait Mal-lul (Ait Melloul) à Agadir au Maroc; et celle d'Ukacha (Oukacha) à Casablanca au Maroc;
ii. d’ordonner la libération immédiate de tous les prisonniers ci-dessus mentionnés, dont la détention aurait eu lieu sans charges valables ou, dans les cas où ces charges le seraient, le (les) traduire devant un tribunal civil, indépendant et impartial et lui (leur) garantir à tout moment le respect de ses (leurs) droits procéduraux ;
iii. mener une enquête exhaustive, transparente et impartiale sur les circonstances des mauvais traitements et tortures infligés aux prisonniers ci-dessus mentionnés afin d’identifier les responsables, les traduire devant un tribunal civil, indépendant et impartial et de leur appliquer les sanctions pénales et/ou administratives prévues par la loi;
iv. de manière générale, garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales de la population sahraoui, conformément aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des Pactes et des Conventions Internationales des droits de l'homme, notamment les Principes et normes minimales pour le traitement des prisonniers ainsi que la Convention contre la torture.

Adresses :

  • S. M. Mohammed VI. Ibn Al Hassan, Roi du Maroc, Palais Royal, Rabat, Maroc. ; Fax : + 21237.773 07 72
  • Mission Permanente du Royaume du Maroc à Genève, Chemin François-Lehmann 18a., 1218 Grand-Saconnex. Fax: + 41 (0) 22.791.81.80 E-mail: mission.maroc@ties.itu.int
  • M. Driss Jettou, Premier Ministre, Bureau du Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, Palais Royal, Rabat, Maroc. Fax + 21237.776 99 95 // + 21237.76 91 95 ou + 21237.77 68 37
  • M. Mohamed Bouzoubaa, Ministre de la Justice, Place Mamounia, Rabat, Maroc.
    Telegrammes : Ministre de Justice, Rabat, Maroc Fax: + 21237.72.37.10/ + 21237.73.07.72/ + 21237.73.89.40
  • M. Al Mustapha Sahel, Ministre de l'Intérieur, Quartier Administratif, Rabat, Maroc. Fax : + 21237.76.20.56
  • M. Mohamed Benaïssa, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération, Avenue F. Roosevelt, Rabat, Maroc. Fax: (+212) 37 76 55 08 ; (+212) 37.76 46 79. Tel : (+212) 37.76 28.41 / (+212) 37.76.11.25 / (+212) 37 76 25.50 / (+212) 37 76.21.95 Fax : (+212) 37 76 55-08 / (+212) 37 76 46.79 E-mail: ministere@maec.gov.ma E-mail: mail@maec.gov.ma
  • Conseil Consultatif des Droits de l’Homme (CCDH), Place des Chouhada, B.P. 1341, Rabat, Maroc. Fax: + 21237.72.68.56. E-mail: ccdh@ccdh.org.ma


Prière d’écrire aux représentations diplomatiques du Royaume du Maroc dans vos pays respectifs.

Genève, le 16 septembre 2005

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.