03.05.02
Interventions urgentes

Mauritanie: arrestation de M. Boubacar Ould Messaoud, Président de SOS Esclaves Mauritanie

APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE

MAU 001 / 0205 / OBS 029
Arrestation / Détention
MAURITANIE
3 mai 2002


L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme, programme conjoint de la FIDH et de l'OMCT, vous prie d'intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante en Mauritanie.

Brève description des faits :

L’Observatoire a été informé par l’organisation SOS Esclaves Mauritanie / Section Europe de l’arrestation, le 2 mai 2002, de M. Boubacar Ould Messaoud, Président de SOS Esclaves Mauritanie.

Selon les informations reçues, M. Ould Messaoud a été arrêté à son domicile, à Nouakchott, par les services de la Direction de la Sûreté de l’Etat (D.S.E), sur ordre du Commissaire principal de police, M. Deddahi Ould Abdallahi. M. Ould Messaoud était alors en audience avec le Consul des Etats-Unis.

Après que M. Ould Messaoud eut été emmené de force, sans mandat d’arrêt, des membres de la D.S.E restés sur place ont fouillé son domicile et emporté des documents se trouvant dans son bureau. Dans la nuit du 2 au 3 mai, les membres de la D.S.E sont revenus et ont emporté son ordinateur.

Selon les informations reçues, cette arrestation fait suite à l’intervention de M. Boubacar Ould Messaoud sur Radio France International le 30 avril 2002, lors de laquelle il a dénoncé les actes de torture infligés à M. Salem Ould Sidi Ya’raf, présumé militant du mouvement d’opposition clandestin « Conscience et résistance », détenu durant quatre jours en avril 2002. Celui-ci avait détaillé les tortures qu’il avait subies pendant sa détention aux mains de la police politique, dans une déclaration enregistrée par le Président de SOS Esclaves et largement diffusée. Soumis à de multiples pressions, la victime s’était ensuite rétractée publiquement, dans un communiqué diffusé depuis par la police. Or, renforcées par les témoins oculaires de son état de santé à sa sortie de prison, les déclarations initiales de M.Ould Sidi Yarav ont fait l'objet de plusieurs enregistrement audio, et d'un témoignage écrit de sa main. Ces éléments devaient être remis hier par M. Boubacar Ould Messaoud au Consul des Etats Unis.

Par ailleurs, cette arrestation intervient deux jours avant le départ de M. Ould Messaoud pour l’Afrique du Sud, où celui-ci devait représenter un collectif de 13 ONG de défense des droits de l’Homme mauritaniennes, le FONADH (Forum des organisations nationales des droits humains en Mauritanie), lors de la 31ème session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples, qui se tient à Pretoria du 2 au 16 mai 2002.

L’Observatoire rappelle que M. Boubacar Ould Messaoud avait déjà été arrêté et détenu en 1998 après avoir dénoncé l'esclavage en Mauritanie, lors d'une interview accordée à la chaîne de télévision française France 3. Il avait été condamné à 13 mois de prison le 13 février 1998, avec d'autres militants des droits humains, puis gracié en mars sous la pression internationale (Cf Rapport annuel de l’Observatoire 1997-1998). Lors de ce verdict, SOS Esclaves avait été déclarée illégale, à l’instar de l’Association mauritanienne des droits de l’Homme (AMDH) et du Gerdess ( Organisation de promotion du développement et de la démocratie).

L’Observatoire est vivement préoccupé par cette situation. Dans un contexte où l’on assiste, selon de nombreuses sources concordantes, à une recrudescence du recours à la torture, l’arrestation de M. Messaoud illustre de façon flagrante la stratégie déployée par les autorités pour faire taire toute personne, victime ou non, dénonçant les actes de torture commis par la police politique en Mauritanie. Ces faits participent plus généralement d’une stratégie de musellement des défenseurs des droits de l’Homme mise en place depuis maintenant plusieurs années ; ceux-ci sont en effet l’objet d’une pression constante (écoutes téléphoniques, surveillance des domiciles, actes de harcèlement,…).

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités mauritaniennes et de leur demander de :

i. Garantir l’intégrité physique et psychologique de M. Boubacar Messaoud et procéder à sa libération immédiate, en raison du caractère arbitraire de sa détention ;
ii. Mettre un terme à toute forme de représailles à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme mauritaniens ;
iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptées par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, ; notamment à son article 1 qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international » et à son article 6.b qui stipule que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres (…) de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales ».
iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et des pactes internationaux relatifs aux droits de l’Homme liant la Tunisie.

Adresses :

· Mr. Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, Président de la République, La Présidence, BP 184 Nouakchott, Mauritanie, Fax: 222 525 24 06 ou 222 525 26 36

· Mr. Dah Ould Abdel Jelil, Ministre de l’Intérieur, Des Postes et Télécommunications, BP 195 Nouakchott, Mauritanie, Fax : 222 525 36 61

· Mr. Lemrabott Sidi Mahmoud Ould Cheikh Ahmed, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice, BP 350 Nouakchott, Mauritanie, Fax : 222 525 49 95, 222 525 70 02

Paris – Genève, le 3 mai 2002

Merci de bien vouloir informer l'Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L'Observatoire, programme de la FIDH et de l'OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l'Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L'Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l'Homme de la République Française.

Pour contacter l'Observatoire, appeler La Ligne d'Urgence :

Tel et fax FIDH : 33 (0) 1 43 55 20 11 / 01 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 4122 809 49 39 / 41 22 809 49 29
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