France
11.09.17
Interventions urgentes

La France continue de harceler les défenseurs des droits des personnes migrantes

Paris-Genève,le 11 septembre 2017 - L’Observatoirepour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (un partenariatFIDH-OMCT) et la Ligue des droits de l’Homme (LDH) dénoncent la condamnation dudéfenseur des droits des migrants Pierre-Alain Mannoni à deux mois de prisonavec sursis et s’inquiètent de la multiplication des cas de personnes harceléesen France pour leur soutien aux personnes migrantes.

Le 11 septembre 2017, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné M. PierreAlain Mannoni à deux mois de prison avec sursis pour avoir aidé ettransporté en France trois jeunes migrantes dont une mineure. Fin août, la mêmecour avait condamné un autre défenseur, Cédric Herrou, à quatre mois deprison avec sursis[1].

Depuis près d’un an, M. Pierre-Alain Mannonifait l’objet d’un harcèlement judiciaire suite à soninterpellation le 18 octobre 2016 par la gendarmerie de Grasse alors qu’iltransportait dans son véhicule trois jeunes femmes d’origine érythréenne.Celui-ci les avait pris en charge à Saint-Dalmas-de-Tende, alors qu’elles se trouvaientdans un bâtiment abandonné, investi par un collectif d’associations. Face àleur situation de dénuement, M. Pierre-Alain Mannoni les avait accueillies àson domicile, avant de les conduire à une gare.

Pierre-AlainMannoni a alors été poursuivi pour violation de l’article L.622-1 du Code del'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda), avant d’êtrerelaxé par le Tribunal correctionnel de Nice, concluant à son immunité pénale,l’assistance en question n’ayant donné lieu à aucune contrepartie directe ouindirecte. Le procureur a ensuite fait appel de la décision.

La LDH etl’Observatoire s'indignent de voir à nouveau la solidarité envers les migrantsêtre jugée comme un délit. Cette nouvelle condamnation fragilise le statutdes défenseurs des droits des personnes migrantes en France, qui font face àune multiplication des cas de convocations au commissariat, de gardes à vue etde poursuites pour aide au séjour irrégulier ou autres délits[2].

« Ladécision de l'Etat de faire appel de la première décision de relaxe témoigned'un réel harcèlement des pouvoirs publics envers les femmes et les hommesengagées de manière désintéressée à apporter aide et assistance à celles et àceux réfugiés que l'Etat abandonne dans les rues. Cette décision dejustice sera pourvue en Cassation pour apprécier le statut des secours aux plusprécaires », ont déclaré nos organisations.

La LDH etl’Observatoire regrettent cette décision de justice qui fragilise les acteursde la solidarité et réaffirment leurtotale solidarité avec Pierre-Alain Mannoni.

Nos organisations appellent les autorités françaises àgarantir une protection efficace contre des poursuites visant des actions« humanitaires et désintéressées » en amendant les dispositions del'article L. 622-4 du Ceseda[3].

Pourplus d'informations, veuillez contacter :

· FIDH : Samuel Hanryon : +33 6 72 28 42 94

· OMCT : Delphine Reculeau : +41 22 809 49 39

· LDH : Chloé Keller : +33 1 56 55 51 15

L’Observatoire,partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT),a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes deviolations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH etl’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européennepour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civileinternationale.

Créée en 1898 à l’occasion de l’affaire Dreyfus,la Ligue des Droits de l'Homme (LDH) s’est donnée pour objectif de défendretoute personne ou groupe de personnes victimes d’injustice ou d’atteintes àleurs droits. Association laïque, généraliste et politique, quoique nonpartisane, elle entend lutter contre les atteintes aux droits de l’individu,dans tous les domaines de la vie civique, politique et sociale. Elle veut aussipromouvoir la citoyenneté politique et sociale de tous et garantir l’exerciceentier de la démocratie. C’est en ce sens qu’agissent ses 9 500 adhérents, dansplus de 300 sections en France.

[1] Cf. communiqué conjointde l’Observatoire et de la LDH, 29 août 2017.

[2] Cf.dossier web du Groupe d'information et de soutien des immigrées (GISTI) sur larecrudescence du délit de solidarité : http://www.gisti.org/spip.php?article5179

[3] Cf.l’avis n°0131 du 4 juin 2017 de la CNCDH, Avis : mettre fin au délit desolidarité, disponible surhttps://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000034851164