Maroc et Sahara occidental
27.09.11
Interventions urgentes

Risque imminent d’extradition et de torture

MAR 270911

Risqueimminent d’extradition et de torture/ Crainte pour l’intégrité physique etpsychologique

Le Secrétariat International del’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) requiert votreintervention urgente dans lasituation suivante au Maroc.

Descriptiondes faits

Le SecrétariatInternational de l’OMCT a été informé par l’Actiondes chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-France), une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, du risque imminentd’extradition vers l’Algérie de M. Djamel Ktiti, un ressortissantfrançais de 37 ans détenu à la prison de Salé, près de Rabat. L’OMCT craintqu’il ne soit victime d’actes de torture et de mauvais traitements s’il devaitêtre extradé vers l’Algérie.

Selon les informations reçues, le Maroc a annoncédans un courrier envoyé au Comité contre la torture des Nations Unies (CAT), endate du 9 septembre 2011, son intention d’extrader vers l’Algérie M. DjamelKtiti, alors que le CAT avait rendu une décision définitive[1],le 26 mai 2011, dans laquelle il reconnaît le risque de torture encouru par M.Djamel Ktiti en cas d’extradition vers l’Algérie et conclut que le Marocviolerait l’article 3 de la Convention contre la torture et autres peines outraitements cruels, inhumains ou dégradants[2]si le requérant était extradé vers l’Algérie. Le Comité ajoute également que M.Djamel Ktiti doit être libéré si aucune charge n’est portée contre lui auMaroc.

L’OMCT rappelle que M. Djamel Ktiti a été arrêté àTanger par la police marocaine, le 14 août 2009, sur la base d’un mandatd’arrêt international lancé par la justice algérienne, le 19 avril 2009, pour« constitution d’une bande organisée pour l’exportation illicite destupéfiants ». Suite à son arrestation, il a été placé en garde à vuejusqu’au 15 août 2009, puis déféré devant le Procureur du roi près le Tribunalde première instance de Tanger, qui l’a informé du motif de son arrestation, àsavoir la publication, par l’Algérie, du mandat d’arrêt international. Il aensuite été détenu à la prison de Tanger avant d’être transféré à la prison deSalé, où il restait détenu au moment de diffuser cet appel urgent. Le 7 octobre2009, la Cour suprême marocaine a rendu l’arrêt n° 913/1, autorisantl’extradition de M. Djamel Ktiti vers l’Algérie. La Cour a confirmé cettedécision, le 7 avril 2010, suite à l’appel interjeté par l’avocat de M. DjamelKtiti. L’ACAT-France a par la suite saisi le CAT sur le cas de M. Djamel Ktiti.

Selon les mêmes informations reçues, au moins l’undes autres prévenus poursuivis dans la même affaire que M. Djamel Ktiti a étésoumis à plusieurs formes de torture et de mauvais traitements pendant sa gardeà vue en Algérie, suite à son arrestation en août 2008. Ce dernier a cité lenom de M. Djamel Ktiti pendant ses interrogatoires. Selon les mêmesinformations, un tribunal algérien a jugé M. Djamel Ktiti par contumace et l’acondamné, le 28 janvier 2010, à la réclusion criminelle à perpétuité pourtrafic de drogue, sur la seule base d’aveux obtenus sous la torture d’un de sescomplices présumés.

L’OMCT estgravement préoccupée pour la situation de M. Djamel Ktiti et le risque imminentd’extradition. L’OMCT prie les autorités du Maroc de garantir, en toutescirconstances, son intégrité physique et psychologique conformément au droitinternational pertinent, et notamment la Convention des Nations Unies contre latorture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Endevenant partie à la Convention contrela torture, le Maroc s’est en effet engagé à ne pas expulser, refouler,ni n'extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux decroire qu'elle risque d'être soumise à la torture.

L’OMCT est égalementgravement préoccupée par la décision du Maroc de ne pas respecter la décisiondu Comité contre la torture, alors que les autorités marocaines ont respecté,jusqu’à présent, leurs engagements vis-à-vis du Comité en acceptant de surseoirà l’extradition de M. Djamel Ktiti.

Actionsrequises

Merci d’écrire aux autorités duMaroc afin de leur demander de:

i. Garantir, en toutes circonstances, l’intégritéphysique et psychologique de M.Djamel Ktiti;

ii. Annuler la décision d’extradition de M. Djamel Ktiticonformément à la décision du Comité contre la torture en date du 26 mai 2011;

iii. Ordonner la libération immédiate de M. Djamel Ktiti en l’absence d’accusations qui soient enaccord avec les règles et les standards internationaux ou, si de tellesaccusations existent, le déferrer promptement devant un tribunal civil,impartial et compétent tout en garantissant ses droits procéduraux en touttemps;

iv. Garantir le respect desdroits de l’homme et des libertés fondamentalesà travers le pays selon les lois nationales et les instrumentsinternationaux des droits de l’homme.

Adresses

  • Sa Majesté le Roi Mohammed VI Ibn Al Hassan, Roidu Maroc, Palais Royal, Rabat, Maroc, Fax : + 212 537 76 85 15
  • M. Mohamed Taib Naciri, Ministre de la Justice,Ministère de la Justice, Place Mamounia, Rabat, Maroc, Fax : + 212 537 72 37 10 ou +212 537 73 47 25
  • Mission Permanente duRoyaume du Maroc auprès de l’Office des Nations Unies et des autresOrganisations Internationales à Genève, 18, chemin François Lehmann, 1218Grand Saconnex, Fax : +41 22 791 81 80, Email : mission.maroc@ties.itu.int

Prièred’écrire aussi aux représentations diplomatiques du Maroc dans vos pays respectifs.

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Genève,le 27 septembre 2011.

Veuillez nous informer de toute action engagée,citez le code de cet appel dans votre réponse.

[1] Voir Communicationn° 419/2010 du CAT. Le CAT a pris, le 19 avril 2010, une mesure provisoire deprotection enjoignant aux autorités marocaines de surseoir à l’extradition deM. Ktiti en attendant que le CAT ait examiné le dossier.

[2] L’article 3 de la Conventioncontre la torture stipule que « Aucun Etat partie n'expulsera, nerefoulera, ni n'extradera une personne vers un autre Etat où il y a des motifssérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture ».