Haïti
06.08.13
Interventions urgentes

Harcèlement et fausses accusations portées contre un avocat impliqué dans une affaire de lutte contre la corruption

Paris-Genève-Port-au-Prince,le 6 août 2013. L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droitsde l'Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues desdroits de l'Homme (FIDH) et de l'Organisation mondiale contre la torture(OMCT), ainsi que le Réseau national de défense des droits humains (RNDDH)s'inquiètent des fausses accusations et des actes de harcèlement portés à l'encontrede l'avocat Me André Michel dans le but manifeste de sanctionner ses activitésde lutte contre la corruption.

Le 26 juillet 2013, le Magistrat instructeur duTribunal de première instance de Port-au-Prince, Me Lamarre Bélizaire, a lancéun « mandat d'amener » contre Me André Michel, qui représente la partie civile aux côtés de Mes Newton Saint Juste et Mario Joseph dans une affaire de corruption et de manipulationprésumées de fonds publics impliquant l'entourage du Président haïtien. Le jourmême, le Magistrat instructeur se serait présenté aux abords du cabinetd'avocat de Me Michel en compagnie d'agents de sécurité afin de faire exécuterlui-même son mandat. Le Magistrat instructeur est ensuite reparti, mais lesagents sont restés sur place quelques instants avant de repartir eux-aussi sansarrêter Me Michel, suite aux protestations de militants d'organisations dedéfense des droits de l'Homme et d'avocats auprès de différents médias,également présents sur les lieux. Cependant, le mandat d'amener reste pourl'heure maintenu, et une « interdiction de départ » (ou interdictionde quitter le territoire) a été émise.

Nos organisations ont par ailleurs appris que cemandat d'amener a été émis contre Me André Michel sous le chef d'accusationd'« assassinat », en 2010, de M. Frantzy Duverseau[1], beau-frère de M. Enold Florestal, lui même partiecivile dans le dossier de corruption sus-mentionné.

Nos organisations ont également été informées de ladiffusion le 29 juillet 2013 d'un communiqué de presse émanant de l'Associationdes magistrats haïtiens (ASMAH), proche du gouvernement et dont le Magistratinstructeur du Tribunal de première instance Me Lamarre Bélizaire occupe leposte de secrétaire général, annonçant une supposée tentative d'assassinat dujuge instruisant le dossier par « des hommes armés à la solde de MeAndré Michel » dans la soirée du 26 juillet.

Tout en estimant que lumière doit être faite sur lesconditions dans lesquelles M. Frantzy Duverseau a été tué le 18 octobre 2010,nos organisations dénoncent ces actes de harcèlement et ces accusationsmensongères à l'encontre de Me André Michel, qui ne semblent viser qu'àsanctionner ses activités de lutte contre la corruption en Haïti.

Nos organisations appellent les autorités haïtiennesà garantir en toutes circonstances l’intégrité physiqueet psychologique de Me André Michel et de ses collègues, ainsi que de tous lesdéfenseurs en Haïti, et de mettre un terme à toute forme de harcèlement, ycompris au niveau judiciaire, à leur encontre.

Nos organisations appellentplus généralement les autorités haïtiennes à se conformer aux dispositions de la Déclaration surles défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale desNations unies le 9 décembre 1998.


[1] Le 18 octobre2010, M. Frantzy Duverseau a été abattu par des policiers à la suite d'unedispute familiale. Le 26 juillet 2013, jour de l'émission du mandat contre MeAndré Michel, un autre mandat d’amener a été émis contre M. Enold Florestal, etle frère de ce dernier, M. Josué Florestal, a été incarcéré. Les autoritéstentent aujourd'hui d'accuser faussement Me André Michel d'être impliqué danscet assassinat.