Tunisie
29.04.08
Interventions urgentes

Actes de harcèlement à l'encontre de M. Taoufik Ben Brik et Me Radhia Nasraoui

TUN 006 / 0408 / OBS 069
Actes de harcèlement et d’intimidation
Tunisie

29 avril 2008

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Tunisie.

Description des faits :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de nouveaux actes de harcèlement à l’encontre de M. Taoufik Ben Brik, membre fondateur du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT), et de Me Radhia Nasraoui, présidente de l’Association de lutte contre la torture en Tunisie (ALTT) et membre de l’Assemblée des délégués de l’OMCT.

Selon les informations reçues, le 21 avril 2008, la voiture de l’épouse de M. Ben Brik, Mme Azza Zarrad, a été saccagée : les vitres ont été brisées et les rétroviseurs arrachés. Quelques jours auparavant, le 16 avril 2007, M. Ben Brik avait été approché par des agents de la police politique qui lui avaient demandé de "croiser les bras" jusqu’en 2009, année de l’élection présidentielle, et qui avaient menacé de s’en prendre à sa femme et à sa famille.

Les événements de ces derniers jours seraient liés en partie au refus de Mme Zarrad de poursuivre la procédure de divorce qu’elle avait entamée à l’encontre de son mari. Le 20 avril 2007, la famille de Mme Zarrad a en effet reçu un appel téléphonique d’un inconnu affirmant être "du côté d’Azza", ajoutant que "le gouvernement [était] prêt à l’aider dans sa démarche, [et que] le dossier [était] sur le bureau du président Ben Ali". Le lendemain, Mme Zarrad s’est rendue au poste de police afin de porter plainte, mais n’a pu obtenir gain de cause.

Par ailleurs, le 18 avril 2008, Me Radhia Nasraoui s’est présentée auprès des autorités pénitentiaires du quartier de Monplaisir à Tunis, afin de soumettre des demandes de visites de deux de ses clients détenus. Plus de trente agents de la police politique l’ont alors chassée des locaux en proférant des injures à son encontre, et la menaçant de lui "casser la figure ... encore une fois". Les policiers l’ont ensuite forcée à monter dans sa voiture, tout en continuant à l’insulter. Certains d’entre eux ont violemment frappé sur le véhicule, causant des dégâts notables, alors que d’autres l’ont suivie en moto et en voiture jusqu’à son cabinet. Le 26 avril 2008, Me Nasraoui a porté plainte contre les policiers en question. La veille, la ligne téléphonique et l’accès internet de Mme Nasraoui avaient été coupés, au lendemain d’une conversation téléphonique avec des journalistes étrangers.

En outre, plusieurs de ses clients continuent d’être fortement découragés de faire appel aux services de Me Nasraoui, à l’instar de mères de détenus, qui ont été brutalisées et insultées par des policiers en civil le 15 février 2008 par un important dispositif policier alors qu’elles tentaient de se rendre à son cabinet.

L’Observatoire déplore avec la plus grande vigueur les méthodes utilisées par les autorités tunisiennes à l’encontre de M. Ben Brik et Me Nasraoui dénonce plus généralement la détermination constante avec laquelle les autorités tunisiennes répriment toute personne qui promeut et défend les droits de l’Homme.

Actions demandées :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités tunisiennes en leur demandant de :

  1. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Taoufik Ben Brik et Me Radhia Nasraoui ;
  2. Mener une enquête indépendante sur les faits décrits ci-dessus, afin que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés conformément à la loi en vigueur ;
  3. Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement à l’encontre de M. Taoufik Ben Brik et Me Radhia Nasraoui et de tous les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;
  4. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui prévoit que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”, son article 6(b), selon lequel “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales”, et son article 12.2 qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;
  5. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie.

Adresses :

  • M. Zine el-Abidine Ben Ali, Président de la République, Palais de Carthage, 2016 Carthage, Tunisie, Fax : +216 71 744 721 ou +216 71 731 009
  • M. Mohamed Ghannouchi, Premier Ministre, Secrétariat Général du Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 562 378
  • M. Rafik Belhaj Kacem, Ministère de l’Intérieur et du Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Tunisie, Fax : ++ 216 71 340 888 ; Email : mint@ministeres.tn
  • M. Kamel Morjane, Ministère de la Défense Nationale, Avenue Bab Mnara, La Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 561 804
  • M. Bechir Tekkari, Ministère de la Justice et des Droits de l’homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 568 106 ; Email : mju@ministeres.tn
  • Ambassadeur, S.E M. Samir Labidi, Mission permanente de la Tunisie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, 58 Rue Moillebeau, Case postale 272, 1211 Genève 19, Suisse, Fax : +41 22 734 06 63 ; Email : mission.tunisia@ties.itu.int
  • Ambassade de la Tunisie à Bruxelles, 278 avenue de Tervueren, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique, Fax : + 32 2 771 94 33 ; Email : amb.detenusie@brutele.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de Tunisie dans vos pays respectifs.

Genève - Paris, le 29 avril 2008

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80

Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29