Niger
25.07.18
Interventions urgentes

Quatres défenseurs des droits humains poursuivis à tort condamnés et trois toujours arbitrairement détenus

APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE


NER 001 / 0418 / OBS 039.4
Détention arbitraire /
Harcèlement judiciaire /

Condamnation / Libération /
Entraves à la liberté de réunion pacifique
Niger
25 juillet 2018

L’Observatoire pourla protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de la FIDHet de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvellesinformations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situationsuivante au Niger.

Nouvellesinformations :

L’Observatoire a été informé de sources fiablesde la condamnation de MM.Ali Idrissa[1], Moussa Tchangari[2],Nouhou Mahamadou Arzika[3]et de leur libération, lacondamnation de Me. Lirwana Abdourahamane[4],ainsi que de la poursuite de ladétention arbitraire de M. Ibrahim Diori[5], M. Maikoul Zodi[6]et Me. Lirwana Abdourahamane.

Selon lesinformations reçues, le tribunal de grande instance de Niamey a condamné, lorsde son délibéré du 24 juillet 2018, MM.Ali Idrissa, Moussa Tchangari,Nouhou Mahamadou Arzika, à trois mois de détention avec sursis, et aordonné leur libération, après quatre mois de détention arbitraire. Accusésd’“organisation et participation à une manifestation interdite”, de “complicitéde violences”, d’“agression” et de “destruction de biens”, pour avoir participéou appelé à participer aux manifestations pacifiques organisées contre la loide finance 2018[7](voir le rappel des faits ci-dessous).


M. Ibrahim Diori et M. Maikoul Zodi, deux membres du cadre de concertation dela société civile qui ont eux aussi comparu pour les mêmes chefs d’accusationle 10 juillet dernier, restent arbitrairement détenus depuis plus de trois moiset attendent toujours l’ouverture de leur procès.

Par ailleurs, letribunal de grande instance de Niamey a, lors d’un délibéré du 23 juillet 2018,condamné Me. Lirwana Abdourahamane à 24 mois de prison, dont 12 avec sursis, et1 million de F.CFA (environ 1500 euros) d’amende. Visé dans la même affaire, leministère public avait émis la charge supplémentaire « d’outrage aumagistrat par voie de parole » lors de l’audience du 10 juillet 2018, etavait requis à son encontre 2 ans d’emprisonnement, dont un an ferme et un anavec sursis.


L’Observatoire condamne fermement le harcèlement judiciaire et la détentionarbitraire de Me. Lirwana Abdourahamane, MM. Ibrahim Diori et Maikoul Zodiainsi que les autres militants de la société civile nigérienneles condamnationsinjustes de Me. Lirwana Abdourahamane
etde MM. Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Mahamadou Arzika, en ce qu’ils ne visentqu’à punir leurs activités pacifiques et légitimes de défense des droitshumains.

L’Observatoireappelle les autorités nigériennes à procéder à la libération immédiate etinconditionnelle de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Me. LirwanaAbdourahamane et des autres militants de la société civile nigériennetoujours détenus arbitrairement, et à mettre un terme à toute forme deharcèlement à leur encontre. Dans l’attente, l’Observatoire appelle lesautorités nigériennes à garantir que toutes les procédures engagées contreceux-ci se fassent en respect de leur droit à un procès équitable.

L’Observatoireappelle également les autorités nigériennes à respecter l’ensemble des droitsgarantis par les instruments internationaux et régionaux de protection desdroits humains ratifiés par le Niger, en particulier s’agissant de la libertéd’association, de réunion, de rassemblement, de manifestation pacifique etd’expression.

Rappel des faits :

Le 25 mars 2018,MM. Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Arzika et Me. LirwanaAbdourahmane ont été arrêtés aux sièges respectifs du MPCR, de l’AEC, ducabinet d’avocat Seybou Daouda et des locaux de la chaîne de télévision Labari. Aucun mandat d’arrestation n’aété présenté au moment de leurs interpellations. Ces arrestations sontintervenues dans la matinée alors que se préparait une journée d’actioncitoyenne organisée par la société civile, prévue à partir de 16 heures pourprotester contre la loi de finance 2018[8].

La marche du 25 marss’était tenue malgré un arrêté publié par la ville de Niamey le 23 mars 2018l’interdisant « pour des raisons évidentes de sécurité […] et au regard ducontexte sécuritaire au Niger et dans la sous-région, et d’autres part, desrécentes attaques terroristes ».

Dans la soirée du 25mars 2018, les forces de sécurité ont encerclé le siège du MPCR et faitirruption dans les locaux de Labarisans présenter ni notification écrite du Conseil supérieur de la communication,ni mandat de la police. Ils souhaitaient récupérer une copie du journal téléviséauquel Me. Lirwana Abdourahmane avait participé le jour même et dans lequel ilcommentait l’interdiction de la manifestation. Face aux refus des journalistes,les forces de sécurité ont fermé l’accès aux locaux de la chaîne, en violationdes textes régissant la liberté de la presse au Niger, obligeant le média àcesser la diffusion de ses programmes jusqu’au 28 mars 2018, malgré un courrierdu Président du Conseil supérieur de la communication et la décision d’un jugedes référés qui a déclaré illégale la fermeture de la chaîne et ordonné saréouverture immédiate.

Le 27 mars 2018,MM. Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Arzika et Lirwana Abdourahmaneet 18 autres personnes arrêtées en lien avec la répression de la marche ont étéinculpés d’« organisation et participation à une manifestationinterdite » et « complicité de destruction de biens » aux termesde la loi 2004-45 du 08 juin 2004 réglementant les manifestations sur les voiespubliques au Niger. Ce même jour, ils ont été transférés dans différentesprisons à plusieurs dizaines de kilomètres de Niamey. Ainsi M. Ali Idrissaest détenu à Filingué (à environ 150 km de Niamey), M. Moussa Tchangari àOuallam (à environ 100 km de Niamey), M. Nouhou Arzika à Tillabéry etM. Lirwana Abdourahmane à Daïkaina sur le fleuve Niger (à environ 103 kmde Niamey).

Le 15 avril 2018 dansla matinée, MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi et Abdourahamane Idé Hassaneont été arrêtés à Niamey en amont d’une journée d’action citoyenne organiséepar la société civile pour protester contre la loi de finance 2018 et interditepar les autorités pour des « raisons de sécurité ».

Le 19 avril 2018, letribunal de Niamey a inculpé les trois défenseurs de « participation à unemanifestation interdite et dégradation des biens publics ».MM. Ibrahim Diori et Maikoul Zodi ont par la suite été transférésrespectivement dans les prisons de Kollo et Say et M. Abdourahamane IdéHassane a été libéré sous caution.

Le 18 avril 2018,M. Sadat Illiya Dan Malam a été arrêté par la police de Zinder. Il estaccusé de « participation à un mouvement insurrectionnel » et« complot contre la sûreté de l’État ». Ces accusations seraientliées à sa participation au mouvement contre la loi de finance dans la régionde Zinder.

Le 25 avril 2018,M. Yahaya Badamassi a été arrêté à la police judiciaire de Zinder, où ilavait été convoqué le même jour et où il reste détenu. Il aurait été interrogésur les manifestations organisées en février, mars et avril 2018 contre la loide finance 2018.

Le 2 juillet 2018, M. KarimTanko a été arrêté par la police judiciaire avant d’être transféré une heureaprès à la prison de Niamey. Il est accusé d’ « organisation etparticipation à une manifestation interdite » et « dégradation debiens publics », pour avoir participé à des manifestations contre la loide finance 2018, celui-ci étant l’un des cosignataires de l’appel à manifesterdu 15 avril 2018.

Le 3 juillet 2018 leprocès de MM. Sadat Illiya Dan Malam, Yahaya Badamassi, Ibrahim Diori,Maikoul Zodi, Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Mahamadou Arzika, Me.Lirwana Abdourahmane et de quatorze leaders de la société civile nigérienne aété reporté au 10 juillet 2018, après que les prévenus n’aient pas étéprésentés à la barre. Interrogée sur les raisons de l’absence des prévenus àl’audience, la procureure a déclaré « je ne sais pas ». Les avocatsde la défense ont formulé une demande de mise en liberté au motif de« l’incapacité du ministère public à faire comparaitre des personnesdétenues sous mandat ». La demande a été rejetée par le tribunal.

Lors de l’audience du 10 juillet 2018, qui a duré 15 heures, le ministèrepublic a requis 3 ans de prison ferme et 100,000 FCFA d’amende (environ 150euros) à l’encontre de MM. Ali Idrissa, Nouhou Mahamdou Arzika et MoussaTchangari et 1 an de prison ferme à l’encontre de Me. Lirwana Abdourahmane. Parailleurs, la ville de Niamey qui s’est constituée partie civile dans le procèsa réclamé 20,000,000 FCFA (environ 30 450 euros) de dommages et intérêts. Letribunal de grande instance de Niamey a mis l’audience en délibéré au 24juillet 2018.

Le 12 juillet 2018,Me Lirwana Abdourahmane a été de nouveau arrêté par la police judiciaire à lasuite d’une plainte du doyen des juges d’instruction. Détenu à la prison deDaikaina, il devait comparaître le 16 juillet 2018 devant le tribunal de Niameypour avoir accusé le doyen des juges du tribunal de Niamey de corruption aucours de l’audience du 10 juillet. Le délibéré a été repoussé au 23 juillet2018.

Actionsrequises :

L’Observatoire vousprie de bien vouloir écrire aux autorités nigériennes en leur demandantde :

i. Garantiren toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de MM. IbrahimDiori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa,Moussa Tchangari, Nouhou MahamadouArzika, et Me. Lirwana Abdourahmane, ainsi que de l’ensemble desmilitants de la société civile et défenseurs des droits humains au Niger ;

ii. Libérerimmédiatement et inconditionnellement MM. Ibrahim Diori et Maikoul Zodi, et Me.Lirwana Abdourahamane, ainsi que tous les défenseurs des droits humains détenusau Niger ;

iii. Mettreun terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre deMM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, AliIdrissa, Moussa Tchangari,Nouhou Mahamadou Arzika, et Me. Lirwana Abdourahmane, et les autresmilitants de la société civile nigérienne ;

iv. Dansl’attente, garantir que les procédures engagées à l’encontre de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, et Me. Lirwana Abdourahmane respectent leur droità un procès équitable ;

v. Respecterla liberté d’expression, d’association et de manifestation de la société civilenigérienne ;

vi. Seconformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits del’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998,et plus particulièrement ses articles 1, 5, 6 et 12.2 ;

vii. Plusgénéralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle desdroits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs auxdroits humains ratifiés par le Niger.

Adresses :

· M. IssoufouMahamadou, Président de la République du Niger, Tél. : +227 20 72 24 72,Fax : +227 20 73 77 03
· M. Brigi Rafini, Premier Ministre, brigi_rafini@yahoo.fr, Cabinet duPremier Ministre BP 893 Niamey, Niger ; Tél : + 227 20 72 26 99,Fax : + 227 20 73 58 59
· M. Marou Amadou, Ministre de la justice, marou_amadou2000@yahoo.fr,Tél : +227 08 00 11 11, Fax : +227 20 72 37 77
· M. Bazoum Mohamed, Ministre de l’intérieur, Tél. : +227 20 32 3262, Fax : + 227 20 72 21 76
· Direction générale des affaires juridiques du Ministère de l’intérieur ;Fax : +227 20 20 36 89
· Ibrahim Yacoubou, Ministre des Affaires étrangères de la coopération, del’intégration africaine et des nigériens à l’extérieur, ibrayac2@gmail.com
· S.E. M. Ousmane Alhassane Abba, Ambassadeur, Mission permanente du Nigerauprès de l’Union européenne, 78 avenue Franklin Roosevelt, B-1050 Bruxelles,Fax : + 32 2 648 27 84
· S.E Mme Fatima Sidikou, Représente permanente du Niger, Missionpermanente du Niger auprès des Nations unies à Genève, 23 Avenue de France,1202 Genève, Suisse. Tél : +41 22 979 24 50 – Fax : +41 22 979 24 51

Prière d’écrireégalement aux représentations diplomatiques du Niger dans vos pays respectifs.


***
Paris-Genève, le 25 juillet 2018

Merci de bien vouloirinformer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code decet appel.

L’Observatoire partenariat de la FIDH et de l’OMCT, avocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violationset à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDH et l’OMCT sontmembres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour lesdéfenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civileinternationale.

Pour contacterl’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] Coordinateurnational du Réseau des organisations pour la transparence et l’analysebudgétaire (ROTAB) et de Publiez ce que vous payez-Niger (PCQVP)

[2] Secrétairegénéral d’Alternative Espaces Citoyens (AEC), membre de la fondation FrantzFanon.

[3] Présidentdu Mouvement patriotique pour une citoyenneté́ responsable (MPCR)

[4] Avocatet membre du MPCR.

[5] Membred’AEC.

[6] Coordinateurpour le Niger de la campagne Tournons la page et président du rassemblement desjeunes républicains (RJR)

[7] Voir le Communiqué de presse conjoint : « Niger: Les défenseurs des droitshumains poursuivis à tort, doivent être libérés immédiatement et sans condition » du 23 juillet2018

[8] La loi de finance 2018 impose de nouvellestaxes en outre sur l’électricité et l’habitation, desservant les couches lesplus vulnérables de la société nigérienne. @font-face { font-family: Arial;}@font-face { font-family: "Cambria Math";}@font-face { font-family: Tahoma;}@font-face { font-family: "Myriad Pro";}@font-face { font-family: Ariel;}p.MsoNormal, li.MsoNormal, div.MsoNormal { margin: 0cm 0cm 0.0001pt; font-size: 10pt; font-family: "Times New Roman"; }h4 { margin: 0cm 0cm 0.0001pt; page-break-after: avoid; font-size: 10pt; font-family: "Times New Roman"; font-weight: normal; }p.MsoFootnoteText, li.MsoFootnoteText, div.MsoFootnoteText { margin: 0cm 0cm 0.0001pt; font-size: 10pt; font-family: "Times New Roman"; }p.MsoBodyText, li.MsoBodyText, div.MsoBodyText { margin: 0cm 0cm 6pt; font-size: 10pt; font-family: "Times New Roman"; }a:visited, span.MsoHyperlinkFollowed { color: rgb(149, 79, 114); text-decoration: underline; }span.Titre4Car { }span.Caractresdenotedebasdepage { vertical-align: super; }span.Appelnotedebasdep8 { vertical-align: super; }span.Marquedecommentaire3 { }span.CorpsdetexteCar { font-family: Tahoma; }span.NotedebasdepageCar { }.MsoChpDefault { font-size: 10pt; }div.WordSection1 { }ol { margin-bottom: 0cm; }ul { margin-bottom: 0cm; }