République démocratique du Congo
07.07.10
Interventions urgentes

Suivi du cas COD 170610_M. Musingiyende Kanyamanza reste détenu sans accès à des soins médicaux

COD 170610.1
Suivi du cas COD 170610
Refus d’accorder des soins médicaux/ Crainte pour l’intégrité physique et psychologique/ Absence d’enquête effective

Le Secrétariat International de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) a reçu de nouvelles informations sur la situation suivante et sollicite votre intervention en République démocratique du Congo (RDC)/ Province du Nord-Kivu.

Nouvelles informations

Le Secrétariat International de l’OMCT a été informé par une source fiable et Antenna International, une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, que M. Musingiyende Kanyamanza, arrêté le 15 juin 2010 par des militaires des Forces armées de la RDC (FARDC) soupçonné de vol, reste détenu dans la zone opérationnelle des FARDC à Rutshuru sans avoir encore été présenté devant une autorité judiciaire compétente. Par ailleurs, il n’a toujours pas eu accès à un avocat de son choix, à des soins médicaux, et sa famille n’a toujours pas été autorisée à le voir. Seul un représentant d’une ONG locale de défense des droits de l’Homme, le Centre de Recherche sur l’Environnement, la Démocratie et les Droits de l’Homme (CREDDHO), a pu le rencontrer. Selon ses informations, M. Musingiyende Kanyamanza ne serait plus victime de torture et de mauvais traitements mais son état de santé serait critique suite aux actes subis lors de son arrestation (voir rappel des faits).

L’OMCT demande instamment aux autorités de la RDC de faire en sorte que M. Musingiyende Kanyamanza soit promptement présenté devant une autorité judiciaire compétente et qu’il ait immédiatement accès à un avocat de son choix, à des soins médicaux et puisse recevoir la visite de sa famille.

A cet égard, l’OMCT rappelle à nouveau que nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire et demande, par conséquent, aux autorités de RDC de respecter les garanties concernant la liberté de la personne conformément, entre autres, aux dispositions de la Constitution de la RDC et notamment l’article 18, alinéas 1, 3 et 4[1].

L’OMCT prie également les autorités de RDC de garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Musingiyende Kanyamanza, conformément au droit régional et international pertinent, et notamment aux dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Enfin, selon les mêmes informations, aucune enquête effective n’a été conduite suite aux allégations de torture et de mauvais traitements infligés par des militaires des FARDC à M. Musingiyende Kanyamanza et M. Sebuhinja Tarcisse (âgé de 28 ans), qui avait été arrêté à la même occasion que M. Musingiyende Kanyamanza et qui est décédé en détention.

Le Secrétariat International de l’OMCT réitère sa plus vive inquiétude quant aux faits allégués ci-dessus et demande aux autorités compétentes à ce qu’une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale soit menée sur les circonstances du décès de M. Sebuhinja Tarcisse et les allégations de torture et de mauvais traitements à l’encontre de ce dernier et de M. Musingiyende Kanyamanza, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi. Les conclusions de cette enquête doivent être rendues publiques.

Rappel des faits

L’OMCT avait été informée du décès de M. Sebuhinja Tarcisse des suites de mauvais traitements par des militaires des FARDC. L’OMCT avait également été informée du refus d’accorder des soins médicaux à M. Musingiyende Kanyamanza, détenu dans la zone opérationnelle des FARDC à Rutshuru.

Selon les informations reçues, le 15 juin 2010, M. Sebuhinja Tarcisse et M. Musingiyende Kanyamanza, tous les deux cultivateurs résidant dans le village de Mutabo (Nyamubiongo), chefferie de Bwisha dans le groupement de Busanza, dans le Territoire de Rutshuru, ont été arrêtés par des militaires des FARDC, à la demande du chef de la localité de Mutabo, soupçonnés de vol. Après avoir été maltraités, ils ont été transférés à la zone opérationnelle des FARDC à Rutshuru où ils auraient été ligotés, allongés par terre et fouettés jusqu’à ce qu’ils perdent connaissance.

Selon les mêmes informations, M. Sebuhinja Tarcisse est décédé de ses blessures après avoir été conduit à l’hôpital le jour même. Son corps porterait des traces de coups de fouet et autres blessures. M. Musingiyende Kanyamanza restait, quant à lui, détenu au cachot de la zone opérationnelle sans avoir eu accès à des soins médicaux malgré son état de santé critique.

Actions requises

Merci d’écrire aux autorités de la RDC, afin de leur demander de :

  1. Garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Musingiyende Kanyamanza;
  2. Garantir l’accès immédiat et inconditionnel à un avocat de son choix et aux membres de sa famille ainsi que garantir un examen médical immédiat par un médecin de son choix et un traitement médical approprié, conformément, entre autres, à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies;
  3. Ordonner sa libération immédiate en l’absence de charges légales valables ou, le cas échéant, le traduire promptement devant un tribunal civil, impartial et compétent tout en garantissant ses droits procéduraux en tout temps;
  4. Garantir une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale sur ces évènements, en particulier sur les circonstances du décès de M. Sebuhinja Tarcisse et des allégations de torture et de mauvais traitements à l’encontre de ce dernier et de M. Musingiyende Kanyamanza, dont les conclusions seront rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;
  5. Garantir un recours effectif et une réparation adéquate, y compris l’indemnisation et la réhabilitation, aux victimes concernées ou leurs familles;
  6. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’homme.

Adresses

  • S.E M. Joseph Kabila, Président de la République, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax +243 88 02 120
  • M. Alexis Thambwe Mwamba, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo
  • M. Luzolo Bambi, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax : + 243 88 05 521
  • Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations unies, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, Email : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République démocratique du Congo dans vos pays respectifs.

Genève, le 7 juillet 2010.

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.

[1] Aux termes de l’article 18, alinéas 1, 3 et 4 de la Constitution : « Toute personne arrêtée doit être immédiatement informée des motifs de son arrestation et de toute accusation portée contre elle et ce, dans la langue qu’elle comprend. La gardée à vue ne peut excéder quarante huit heures. A l’expiration de ce délai, la personne gardée à vue doit être relâchée ou mise à la disposition de l’autorité judiciaire compétente », et alinéa 3 « la personne gardée à vue a le droit d’entrer immédiatement en contact avec sa famille ou avec son conseil».