République démocratique du Congo
21.06.19
Interventions urgentes

Menaces de mort à l’encontre de M. Jean-Claude Katende

COD 001 / 0619/ OBS 052

Menaces de mort
Républiquedémocratique du Congo
21 juin 2019

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits del’Homme, un partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre latorture (OMCT), vous prie d’intervenir dans la situation suivante en Républiquedémocratique du Congo (RDC).

Descriptionde la situation :

L’Observatoire a été informé de sources fiables de menaces de mortà l’encontre de M. Jean-Claude Katende, président de l’Associationafricaine des droits de l’Homme (ASADHO). Depuis le début de l’année 2019, M.Katende et les membres de l’ASADHO mènent des actions auprès du nouveau pouvoirissu des élections de décembre 2018 en vue d’obtenir la libération de M. Eddy Kapend[1],et que justice soit rendue à M. Floribert Chebeya, président de l’ONG LaVoix des sans-voix (VSV) et membre de l’Assemblée générale de l’OMCT, et M. FidèleBazana, son assistant, tous deux assassinés le 2 juin 2010 par desreprésentants de l’État congolais[2].

Selon les informations reçues, les 11, 15 et 18 juin 2019, M.Jean-Claude Katende a reçu des appels téléphoniques, en numéro masqué,provenant de personnes non identifiées, le prévenant que « si [il]n’arrêtait pas [ses] actions en faveur d’Eddy Kapend et contre John Numbi, ilserait tué ».

Le premier appel est survenu la veille d’une manifestationorganisée par l’ASADHO le 12 juin 2019 pour demander la libération de M. EddyKapend et de ses compagnons. Les appels suivants sont survenus après quel’ASADHO a appelé à une nouvelle manifestation le 25 juin, pour demander, enplus de la libération d’Eddy Kapend, la ré-ouverture du dossier de FloribertChebeya et Fidèle Bazana et l’arrestation de M. John Numbi[3],haut responsable de l’armée et principal suspect de leur assassinat.

L’Observatoire exprime sa plus vive inquiétude au regard desmenaces de mort contre M. Jean-Claude Katende et appelle les autoritéscongolaises à garantir en toute circonstances son intégrité physique etbien-être psychologique, et à mener immédiatement une enquête impartiale etindépendante sur les faits rapportés.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autoritéscongolaises en leur demandant de :

i. Garantir entoute circonstances l’intégrité physique et le bien-être psychologique de M.Jean-Claude Katende et de tous les défenseurs des droits humains en RDC ;

ii.Mener sans délais une enquête exhaustive, indépendante,effective, rigoureuse, impartiale et transparente quant aux faits décritsci-dessus, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant untribunal indépendant, compétent et impartial conformément auxinstruments internationaux et régionaux de protection des droits del’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ouadministratives prévues par la loi ;

iii. Seconformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits del’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998,et plus particulièrement ses articles 1 et 12.2 ;

iv. Plusgénéralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle desdroits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs auxdroits humains ratifiés par la RDC.

Adresses :

· S.EM. Félix Tshisekedi, Président de la République, Email : cabinet@presidentrdc.cd, Fax +243 8802 120 ;

· M. Sylvestre Ilunga, Premier Ministre,E-mail : cabinet@primature.cd, Fax : +24381 555 55 81 ;

· M. AlexisTambwe Mwamba, Ministre de la Justice, Fax : + 243 88 05 521,E-mail : minjustdh@gmail.com ;

· Mme Marie-AngeMushobekwa, Ministre des droits humains, Email : min-droitshumains@yahoo.fr ;

· M. FloryKabange Numbi, Procureur Général de la République ; E-mail :florykan@yahoo.fr, pgr_rdc@yahoo.fr, pgr_rdcongo15@yahoo.com ;

· S.E.M. Zénon Mukongo Ngay, Ambassadeur, Mission permanente de la Républiquedémocratique du Congo auprès des Nations unies à Genève, Suisse, E-mail :missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 (22) 740 16 82 ;

· S.E.M. Paul Crispin Kakhozi Bin BulongoAmbassadede la République démocratique du Congo à Bruxelles, Belgique, E-mail :secretariat@ambardc.eu. Fax : + 32 22 13 49 95

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de laRépublique démocratique du Congo dans vos pays respectifs.

***
Paris-Genève, le 21 juin 2019

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toute actionentreprise en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoirepartenariat de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs desdroits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussiconcrète que possible. La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu,le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Hommemis en œuvre par la société civile internationale.

[1] M. Eddy Kapendet plusieurs autres personnes condamnées dans le cadre de cette affaire sont enprison depuis 18 ans, après avoir été condamnés pour l’assassinat du PrésidentLaurent-Désiré Kabila (tué le 16 janvier 2001), et ce alors qu’ils ont toujoursclamé leur innocence. En mars 2019, le nouveau Président élu, Félix Tshisekedi,a octroyé une grâce présidentielle à près de 700 prisonniers politique, grâcedont M. Eddy Kapend et ses compagnons ont été exclus.

[2] Convoqué, le 1er juin 2010, par le général John Numbi,inspecteur général de la police nationale congolaise (IG/PNC), FloribertChebeya avait été retrouvé sans vie le 2 juin 2010 au matin dans son véhicule,tandis que Fidèle Bazana était porté disparu. A l’issue d’un procès marqué parde nombreux incidents (voir le Rapport d’observation judiciaire de l’Observatoire pour laprotection des défenseurs des droits de l’Homme), la Cour militaire de Kinshasa a reconnu, le 23 juin2011, la responsabilité civile de l’État congolais dans l’assassinat deM. Chebeya, ainsi que dans l’enlèvement et la détention illégale deM. Bazana par plusieurs de ses agents et condamné cinq des huit policiersaccusés, dont quatre à la peine capitale et un à la prison à perpétuité. Troisdes condamnés à mort sont toujours en fuite, et trois policiers dont l’instructionavait pourtant révélé le rôle dans la disparition de Fidèle Bazana, ont étéacquittés. Le 7 mai 2013, la Haute cour militaire, saisie en tant quejuridiction d’appel, s’est déclarée incompétente pour instruire des questionsprocédurales et a décidé de saisir la Cour suprême de justice, qui fait officede Cour constitutionnelle, ce qui a suspendu de fait la procédure judiciaired’appel.

[3] En première instance comme en appel, aucune procédure judiciairen’a jamais été engagée par les autorités congolaises pour instruire le rôlejoué par le général John Numbi, qui a depuis été remplacé à la tête de lapolice nationale, malgré l’existence de preuves et le dépôt de plaintesnominatives par les familles des deux défenseurs.