République démocratique du Congo
17.06.10
Interventions urgentes

Décès de M. Sebuhinja Tarcisse des suites de mauvais traitements et refus d'accorder des soins médicaux à M. Musingiyende Kanyamanza

COD 170610
Décès des suites de tortures et de mauvais traitements/ Refus d’accorder des soins médicaux/ Crainte pour l’intégrité physique et psychologique

Le Secrétariat International de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) requiert votre intervention urgente dans la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC)/ Province du Nord-Kivu.

Description des faits

Le Secrétariat International de l’OMCT a été informé par une source fiable et Antenna International, une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, du décès de M. Sebuhinja Tarcisse (âgé de 28 ans) des suites de mauvais traitements par des militaires des Forces armées de la RDC (FARDC). L’OMCT a également été informée du refus d’accorder des soins médicaux à M. Musingiyende Kanyamanza, qui se trouve actuellement détenu dans la zone opérationnelle des FARDC à Rutshuru.

Selon les informations reçues, le 15 juin 2010, M. Sebuhinja Tarcisse et M. Musingiyende Kanyamanza, tous les deux cultivateurs résidant dans le village de Mutabo (Nyamubiongo), chefferie de Bwisha dans le groupement de Busanza, dans le Territoire de Rutshuru, ont été arrêtés par des militaires des FARDC, à la demande du chef de la localité de Mutabo, soupçonnés de vol. Après avoir été maltraités, ils ont été transférés à la zone opérationnelle des FARDC à Rutshuru où ils auraient été ligotés, allongés par terre et fouettés jusqu’à ce qu’ils perdent connaissance.

Selon les mêmes informations, M. Sebuhinja Tarcisse est décédé de ses blessures après avoir été conduit à l’hôpital le jour même. Son corps porterait des traces de coups de fouet et autres blessures. M. Musingiyende Kanyamanza resterait, quant à lui, détenu au cachot de la zone opérationnelle sans avoir eu accès à des soins médicaux malgré son état de santé critique.

Le Secrétariat International de l’OMCT exprime sa plus vive inquiétude quant aux faits allégués ci-dessus, et notamment le décès de M. Sebuhinja Tarcisse des suites de tortures et de mauvais traitements, ainsi que du refus d’accorder des soins médicaux à M. Musingiyende Kanyamanza malgré son état critique.

L’OMCT prie les autorités de RDC de garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Musingiyende Kanyamanza, conformément au droit régional et international pertinent, et notamment aux dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

L’OMCT demande également aux autorités compétentes à ce qu’une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale soit menée sur les circonstances du décès de M. Sebuhinja Tarcisse et les allégations de torture et de mauvais traitements, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi. Les conclusions de cette enquête doivent être rendues publiques.

Enfin, l’OMCT rappelle que nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire et demande instamment aux autorités de RDC de respecter les garanties concernant la liberté de la personne conformément, entre autres, aux dispositions de la Constitution de la RDC et notamment l’article 18, alinéas 1, 3 et 4[1].

Actions requises

Merci d’écrire aux autorités de la RDC, afin de leur demander de :

  1. Garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Musingiyende Kanyamanza;
  2. Garantir l’accès immédiat et inconditionnel à un avocat de son choix et aux membres de sa famille ainsi que garantir un examen médical immédiat par un médecin de son choix et un traitement médical approprié, conformément, entre autres, à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies;
  3. Garantir une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale sur ces évènements, en particulier sur les circonstances du décès de M. Sebuhinja Tarcisse et des allégations de torture et de mauvais traitements à l’encontre de ce dernier et de M. Musingiyende Kanyamanza, dont les conclusions seront rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;
  4. Garantir un recours effectif et une réparation adéquate, y compris l’indemnisation et la réhabilitation, aux victimes concernées ou leurs familles;
  5. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’homme.

Adresses

  • S.E M. Joseph Kabila, Président de la République, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax +243 88 02 120
  • M. Alexis Thambwe Mwamba, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo
  • M. Luzolo Bambi, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax : + 243 88 05 521
  • Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations unies, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, Email : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République Démocratique du Congo dans vos pays respectifs.

Genève, le 17 juin 2010.

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.

[1] Aux termes de l’article 18, alinéas 1, 3 et 4 de la Constitution : « Toute personne arrêtée doit être immédiatement informée des motifs de son arrestation et de toute accusation portée contre elle et ce, dans la langue qu’elle comprend. La gardée à vue ne peut excéder quarante huit heures. A l’expiration de ce délai, la personne gardée à vue doit être relâchée ou mise à la disposition de l’autorité judiciaire compétente », et alinéa 3 « la personne gardée à vue a le droit d’entrer immédiatement en contact avec sa famille ou avec son conseil».