Colombie
11.11.03
Interventions urgentes

Colombie : l’OMCT présente un rapport sur la violence d’Etat au Comité contre la Torture des Nations Unies.

COMMUNIQUE DE PRESSE


Aux représentants de la presse

Genève, le 11 novembre 2003



Colombie : l’OMCT présente un rapport sur la violence d’Etat au Comité contre la Torture des Nations Unies.

En collaboration avec la Comisión Colombiana de Juristas, Apoyo a víctimas pro recuperación emocional (AVRE), Fundación Comité de Solidaridad con los Presos Políticos (CSPP) et d’autres partenaires, l’OMCT a présenté le 12 novembre 2003 un rapport alternatif sur la pratique de la torture en Colombie destiné aux experts du Comité contre la Torture, dans son examen du troisième rapport périodique de l’Etat colombien.

Le rapport relève que la torture est pratiquée de façon systématique et généralisée en Colombie, notamment comme moyen de persécution politique, et comme outil de terreur vis-à-vis de la population civile. Les groups paramilitaires, les agents de l ‘Etat et les groupes de guérilla recourent à la torture de manière répétée.

L’état d’exception, en vigueur depuis 50 ans de façon quasi permanente, ne semble pas être étranger à ces pratiques. En effet, les lois d’exception créent les conditions favorables à la torture ou aux mauvais traitements, en enfreignant fortement les droits fondamentaux. Dans le cadre de l’état d’exception (mais pas uniquement), la force publique commet des actes de torture contre la population civile. Les reformes constitutionnelles visant a rendre permanente la législation d’exception aggravent encore la crise dans ce domaine.

En 1996, le Comité contre la Torture avait recommandé aux autorités colombiennes de récupérer le monopole de l’usage de la force, et de dissoudre les groupes civils armés ou paramilitaires. Or, le rapport souligne qu’aujourd’hui ces groupes se sont renforcés, et qu’ils sont à l’origine de la plupart des actes de torture commis dans le pays. Selon l’ACNUDH, « la torture est pratiquée fréquemment par les membres des groupes paramilitaires, et dans la plupart des cas est suivie d’une exécution extrajudiciaire ».

Une analyse du suivi des 76 cas soulevés par le rapporteur Spécial des Nations Unies sur la Torture révèle la situation d’impunité en matière de torture : l’absence de coordination entre les enquêtes pénales et disciplinaires, une justice pénale inopérante, une justice militaire favorisant l’impunité ainsi que le peu de résultats dans les enquêtes disciplinaires illustrent les graves manquements du système judiciaire dans le jugement des auteurs, ainsi que pour les réparations dues aux victimes ou à leurs familles.

Par ailleurs, la violence sexuelle contre les femmes et les jeunes filles est utilisée comme moyen de persécution sociale et politique ainsi que comme arme de guerre.

Les personnes privées de liberté ne soufrent pas seulement des conséquences du surpeuplement des lieux de détention, mais aussi de tortures et de traitements cruels, inhumains ou dégradants de la part des gardes.

En outre, les enfants sont également victimes de traitements inhumains ou dégradants. La privation de liberté semble être devenue la norme en cas d’infraction pénale des mineurs, alors que la Convention sur les droits de l’Enfant stipule que cette mesure ne peut représenter qu’un ultime recours.

Enfin, le harcèlement contre les familles de victimes décédées ou disparues est pratiqué de manière systématique, à travers les menaces, le déplacement et d’autres méthodes violentes, afin d’empêcher les poursuites judiciaires. Ces pratiques ont un grave impact sur ces familles, avec des caractéristiques de torture psychologique.

En conséquence, l’OMCT, la Comisión Colombiana de Juristas, Apoyo a víctimas pro recuperación emocional (AVRE), et la Fundación Comité de Solidaridad con los Presos Políticos (CSPP) demandent aux autorités colombiennes de se conformer aux obligations induites par la Convention contre la Torture, de s’abstenir de proclamer des lois ou des réformes constitutionnelles qui, en pratique, favorisent la torture, de proclamer l’état d’exception seulement de manière exceptionnelle, et ordonnent des enquêtes et sanctionnent les agents de l’état qui violent les obligations internationales auxquelles la Colombie a souscrit.

Contact OMCT : Christine Ferrier +4122 809.49.39