Cameroun
16.02.07
Interventions urgentes

Cameroun: Gardiens de prison arrêtés suite à une grève

Cas CMR 040107.1/ Cas CMR 040107.1 DESC
Suivi du Cas CMR 040107
Libération/ Poursuites judiciaires/ Mauvais traitements/ Conditions de détention équivalentes à un traitement inhumain et dégradant
Genève, le 16 février 2007

Le Secrétariat international de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) a reçu de nouvelles informations concernant la situation suivante au Cameroun.

Nouvelles informations

Le Secrétariat international de l’OMCT a été informé par l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT- Littoral), membre du réseau SOS-Torture, de la libération le 12 janvier 2007 de tous les gardiens de prison arrêtés et placés en garde à vue depuis le 2 janvier 2007 au sous-sol du Secrétariat d’Etat à la Défense (SED). Ils font toutefois l’objet de poursuites judiciaires.

Les dernières informations reçues font état de 71 gardiens arrêtés et détenus arbitrairement le 2 janvier 2007 suite à leur grève. Parmi les 71 gardiens, on dénombre 46 hommes et 25 femmes.

Selon les informations, les gardiens ont été brutalisés lors de leur arrestation. Par ailleurs, les conditions de détention des 46 hommes dans le sous-sol de la SED étaient déplorables. Ces derniers ont été détenus dans une cellule insalubre et exiguë. Selon ces mêmes informations, seules les premières personnes qui y étaient entrées parvenaient à avoir un espace pour se coucher à même le sol. Les gardiens n’auraient reçu à manger et à boire que durant les quatre premiers jours de leur détention. Les 25 femmes ont été détenues séparément de leurs collègues masculins mais leurs conditions de détention étaient également déplorables.

Les gardiens ont été présentés le septième jour de leur détention au Groupement de la gendarmerie du centre où ils auraient été entendus sans assistance judiciaire et inculpés des chefs d’accusations suivants: grève, mutinerie, violations de consignes, rébellion et insubordination. Les gardiens ont tour à tour été entendus devant une commission d’enquête composée d’un colonel, de commissaires, d’un magistrat, d’officiers de police et d’adjudants de gendarmerie.

Selon les informations reçues, suite à cette audition, les gardiens ont été ramenés dans leurs cellules dans lesquelles ils sont restés jusqu’au 11 janvier 2007, jour où ils seront de nouveau conduits au Groupement de la gendarmerie du centre. Ils passeront tour à tour dans le bureau d’un lieutenant colonel. Les gardiens ont dû signer des procès-verbaux sans avoir pu relire le contenu, sous prétexte qu’il n’y avait pas assez de temps à disposition. Ils seront ramenés dans leurs cellules aux environs de 21 heures.

Le 12 janvier 2007, vers 9 heures, ils ont été embarqués par groupe de cinq dans des cars de police et des pick-up de gendarmerie pour le Palais de justice d’Ekounou où ils seront placés dans une des salles d’audience. Ils seront convoqués tour à tour dans le bureau des magistrats. Ils auraient à nouveau dû signer des papiers sans pouvoir en prendre connaissance.

Selon les informations reçues, le même jour, le Procureur de la République du tribunal d’Ekounou accompagné entre autres du Secrétaire d’Etat à l’administration pénitentiaire (SEAP) s’est présenté à eux et leur a transmis un message du Vice-premier ministre, message qui consistait à leur dire que le Vice-premier ministre avait demandé de les laisser comparaître libre. Ils devraient toutefois se présenter le 16 janvier 2007 au Tribunal d’Ekounou et rester à la disposition du délégué provincial pour le Centre de l’administration pénitentiaire. Après avoir reçu des demandes d’explication signées du SEAP qu’ils devaient déposer 48 heures après, ils se sont présentés le 16 janvier 2007 à l’audience. Les faits suivants leur sont reprochés : insubordination, séquestration des autorités pénitentiaires, refus d’exécuter les ordres instruits et les tâches prescrites, violation des consignes, grève, mutinerie, destructions, incendie, regroupement, blessures et homicides involontaires. L’audience a été renvoyée au 20 février 2007. Par ailleurs, selon les informations obtenues, les gardiens auraient été sanctionnés, soit suspension de salaire et de fonction, avant même leur comparution devant le conseil de discipline.

Le Secrétariat international de l’OMCT se félicite de la libération des gardiens mais s’inquiète toutefois des allégations de mauvais traitements subis et des conditions de détention déplorables. L’OMCT demande également à ce que les poursuites judiciaires à l’encontre des gardiens soient abandonnées en l’absence de charges valables, ou le cas échéant, les traduire devant un tribunal civil, impartial et compétent tout en garantissant leurs droits procéduraux en tout temps.

Rappel des faits

Selon les informations reçues, environ 50 gardiens de la prison de Kondengui (Prison Centrale de Yaoundé) avaient été arrêtés et détenus arbitrairement le 2 janvier 2007.

Selon ces mêmes informations, suite à une grève entamée le 28 décembre 2006 pour protester contre leurs conditions de travail et de vie, une cinquantaine de gardiens de la prison de Kondengui, parmi lesquels 20 femmes environ, avaient été transportés manu militari vers une destination dans un premier temps inconnue.

Selon les informations, ils étaient détenus au sous-sol du SED à Yaoundé, lieu de détention connu pour sa mauvaise réputation.

Actions requises

Merci d’écrire aux autorités du Cameroun, afin de leur demander de:

  1. Garantir l’intégrité physique et psychologique des 71 gardiens;
  2. Ordonner l’abandon des poursuites judiciaires à l’encontre des personnes mentionnées ci-dessus en l’absence de charges valables ou, le cas échéant, les traduire devant un tribunal civil, impartial et compétent tout en garantissant leurs droits procéduraux en tout temps;
  3. Garantir une enquête exhaustive, indépendante et impartiale sur ces événements, en particulier sur les allégations de mauvais traitements, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;
  4. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales à travers le pays, y compris le respect des droits économiques, sociaux et culturels, selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’homme.

Adresses

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de la République du Cameroun dans vos pays respectifs.

  • M. Paul Biya, Président de la République, Présidence de la République, Palais de l’Unité, 1000 Yaoundé, Cameroun, Fax +237 222 08 70
  • M. Amadou Ali, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice, 1000 Yaoundé‚ Cameroun, Fax: + 237 223 00 05
  • M. Rémy Ze Meka, Ministre de la Défense, 1000 Yaoundé‚ Cameroun, Fax +237 223 59 71
  • M. Jean Marie Aleokol, Secrétaire d’Etat à la Défense, Chargé de la Gendarmerie, Fax +237 222 39 98
  • M. Alain Edgard Mebe Ngo’o, Délégué Général à la Sûreté Nationale, Fax +237 221 00 69
  • M. Marafa Hamidou Yaya, Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Fax : + 237 222 37 35
  • Dr. Chemuta Divine Banda, Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés (CNDHL), Tel : +237 222 61 17, Fax : +237 222 60 82, E-mail: cndhl@iccnet.cm
  • M. Ahmadou Tidjani, Gouverneur de la Province de l’Extrême Nord, Tel : +237 229 14 61 / +237 229 22 03
  • Procureur général de la Province de l’Extrême Nord, Tel : +237 229 33 03
  • Ambassadeur, M. Jean Simplice Ndjemba Endezoumou, Mission permanente de la République du Cameroun auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, rue du Nant 6, 1207 Genève, Suisse, Fax : + 41 22 736 21 65
  • Ambassadrice, Mme Isabelle Bassong, Ambassade de la République du Cameroun à Bruxelles, 131 av. Brugmann, 1190 Forest, Belgium, Tel : + 32 2 345 18 70 ; Fax : + 32 2 344 57 35 ; Email : ambassade.cameroun@skynet.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Cameroun dans vos pays respectifs

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Genève, le 16 février 2007

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