Niger
27.04.18
Interventions urgentes

Arrestation et détention arbitraire de MM. Sadat Illiya Dan Malam, Yahaya Badamassi, Ibrahim Diori et Maikoul Zodi

APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE


NER 001 / 0418 / OBS 039.1

Arrestation / Détentionarbitraire /

Harcèlementjudiciaire /

Entraves à laliberté de réunion pacifique /

Entraves à la liberté d’expression

Niger

27 avril 2018

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de lHomme, un partenariat de la FIDH et de lOrganisation mondiale contre la torture (OMCT), areçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence surla situation suivante au Niger.

Nouvelles informations :


L’Observatoirea été informé de sources fiables de l’arrestation et la détention arbitraire deMM. Sadat Illiya Dan Malam, membredu Mouvement patriotique pour une citoyenneté responsable (MPCR) à Zinder, Yahaya Badamassi, coordonnateur d’AlternativeEspaces Citoyens (AEC) de Zinder, IbrahimDiori, membre d’AEC et Maikoul Zodi,coordinateur pour le Niger de la campagne Tournons la page, ainsi que de leurharcèlement judiciaire et de celui de M. AbdourahamaneIdé Hassane, président de Jeunesse pour une Nouvelle Mentalité (JENOME).

Selonles informations reçues, le 25 avril 2018, M. Yahaya Badamassi a été arrêté à lapolice judiciaire de Zinder, où il avait été convoqué le même jour et où ilreste détenu. Il aurait été interrogé sur les manifestations organisée enfévrier, mars et avril 2018 par la société civile contre la loi de finance2018, qui a été sévèrement critiquée par une partie de la société civile nigérienne[1].

Parailleurs, le 22 avril 2018, la police nigérienne anti-émeute a occupé leslocaux d’AEC en prévision d’une nouvelle marche prévue le même jour contre laloi de finance 2018. La marche avait été interdite par les autorités pour des« raisons de sécurité ».

Déjà enamont d’une précédente journée d’action citoyenne organisée par la sociétécivile pour protester contre la loi de finance 2018 et interdite par lesautorités pour des « raisons de sécurité », le 15 avril 2018 dans lamatinée, MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi et Abdourahamane Idé Hassane ont étéarrêtés à Niamey.

Le 19avril 2018, le tribunal de Niamey a inculpé les trois défenseurs de «participation à une manifestation interdite et dégradation des bienspublics ». MM. Ibrahim Diori et Maikoul Zodi ont par la suite ététransférés respectivement dans les prisons de Kollo et Say et M. AbdourahamaneIdé Hassane a été libéré sous caution.

Deplus, le 18 avril 2018, M. Sadat Illiya Dan Malam a été arrêté par la police deZinder. Il est accusé de « participation à un mouvement insurrectionnel »et « complot contre la sûreté de l’État ». Ces accusations seraientliées à sa participation au mouvement contre la loi de finance dans la régionde Zinder.

Parailleurs, l’Observatoire rappelle que 22 membres de la société civile dont M. Ali Idrissa, coordinateur national duRéseau des organisations pour la transparence et l'analyse budgétaire(ROTAB) et de Publiez ce que vous payez-Niger (PCQVP), M. Moussa Tchangari, secrétaire générald’AEC, M. Nouhou Mahamadou Arzika,président du MPCR et Me. LirwanaAbdourahmane, avocat et membre du MPCR restent détenus depuis le 25 mars2018 (voir rappel des faits ci-dessous). Plusieurs détenus ont entamé une grèvede la faim le 23 avril 2018 pour protester contre leur détention arbitraire.

L’Observatoirecondamne fermement l’arrestation, la détention arbitraire et le harcèlementjudiciaire de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa, Moussa Tchangari,Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Yahaya Badamassi et Sadat Illiya DanMalam en ce qu’ils ne visent qu’à punir leurs activités pacifiques et légitimesde défense des droits humains.

L’Observatoireappelle les autorités nigériennes à procéder à la libération immédiate etinconditionnelle de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa, MoussaTchangari, Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Yahaya Badamassi et SadatIlliya Dan Malam et à mettre un terme à toute forme de harcèlement à leurencontre et celle de M. Abdourahamane Idé Hassane. Dans l’attente,l’Observatoire appelle les autorités nigériennes à garantir que toutes lesprocédures engagées contre ceux-ci se fassent en respect de leur droit à unprocès équitable.

L’Observatoireappelle également les autorités nigériennes à respecter l’ensemble des droitsgarantis par les instruments internationaux et régionaux de protection desdroits humains ratifiés par le Niger, en particulier s’agissant de la libertéd’association, de réunion, de rassemblement, de manifestation pacifique etd’expression.

Rappel des faits :

Le 25mars 2018, MM. Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Arzika et Me. LirwanaAbdourahmane ont été arrêtés aux sièges respectifs du MPCR, de l’AEC, ducabinet d’avocat Seybou Daouda et des locaux de la chaîne de télévision Labari[2].Aucun mandat d’arrestation n’a été présenté au moment de leurs interpellations.Ces arrestations sont intervenues dans la matinée alors que se préparait unejournée d’action citoyenne organisée par la société civile, prévue à partir de16 heures pour protester contre la loi de finance 2018, critiquée par unepartie de la société civile nigérienne. Une marche protestant contre l’adoptionde la loi de finance 2018 et interdite par les autorités s’est tenue le mêmejour[3].

Le 23mars 2018, la ville de Niamey avait publié un arrêté interdisant la marche « pourdes raisons évidentes de sécurité […] et au regard du contexte sécuritaire auNiger et dans la sous-région, et d’autres part, des récentes attaquesterroristes ». Le matin du 25 mars, les forces de sécurité avaient encercléle siège d’AEC et les points de rassemblement afin d’empêcher les manifestantsde se mobiliser.

Dansla soirée du 25 mars 2018, les forces de sécurité ont encerclé le siège du MPCRet fait irruption dans les locaux de Labarisans présenter ni notification écrite du Conseil supérieur de la communication,ni mandat de la police. Ils souhaitaient récupérer une copie du journaltélévisé auquel Me. Lirwana Abdourahmane avait participé le jour même et danslequel il commentait l’interdiction de la manifestation. Face aux refus desjournalistes, les forces de sécurité ont fermé l’accès aux locaux de la chaîne,en violation des textes régissant la liberté de la presse au Niger, obligeantle média à cesser la diffusion de ses programmes jusqu’au 28 mars 2018, malgré uncourrier du Président du Conseil supérieur de la communication et la décision d’unjuge des référés qui a déclaré illégale la fermeture de la chaîne et ordonné saréouverture immédiate.

Le 27mars 2018, MM. Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Arzika et LirwanaAbdourahmane et 18 autres personnes arrêtées en lien avec la répression de lamarche ont été inculpés d’ « organisation et participation à unemanifestation interdite » et « complicité de destruction de biens». Selonle procureur, Maman Sayabou Issa, les manifestants ont été arrêtés pour avoir enfreintles dispositions de la loi 2004-45 du 08 juin 2004 réglementant lesmanifestations sur les voies publiques au Niger. Ce même jour, ils ont ététransférés dans différentes prisons à plusieurs dizaines de kilomètres deNiamey dans l’attente de leur procès. Ainsi M. Ali Idrissa est détenu àFilingué (à environ 150 km de Niamey), M. Moussa Tchangari à Ouallam (à environ100 km de Niamey), M. Nouhou Arzika à Tillabéry et M. Lirwana Abdourahmane àDaïkaina sur le fleuve Niger (à environ 103 km de Niamey).

Actionsrequises :

L’Observatoire vous prie de bienvouloir écrire aux autorités nigériennes en leur demandant de :

i.Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa, MoussaTchangari, Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Yahaya Badamassi et SadatIlliya Dan Malam ainsi que del’ensemble des défenseurs des droits humains au Niger ;

ii.Libérer immédiatement et inconditionnellement MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa, MoussaTchangari, Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Yahaya Badamassi et SadatIlliya Dan Malam ainsi que tous les défenseurs des droits humains détenus auNiger ;

iii. Mettre un terme à toute formede harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre de MM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Abdourahamane IdéHassane, Ali Idrissa, Moussa Tchangari, Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Yahaya Badamassi et Sadat Illiya Dan Malam ainsi que de l’ensemble desdéfenseurs des droits de l’Homme au Niger ;

iv. Dans l’attente, garantir que les procédures engagées à l’encontre deMM. Ibrahim Diori, Maikoul Zodi, Ali Idrissa, MoussaTchangari, Nouhou Arzika, Me. Lirwana Abdourahmane, Sadat Illiya Dan Malam etYahaya Badamassi respectent leur droit à un procès équitable ;

iv. Respecter la liberté d’expression, d’association et de manifestationde la société civile nigérienne ;

v. Se conformer auxdispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme,adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plusparticulièrement ses articles 1, 5, 6 et 12.2 ;

vi.Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelledes droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs auxdroits humains ratifiés par le Niger.

Adresses :

· M. IssoufouMahamadou, Président de la République du Niger, Tél. : +227 20 72 24 72, Fax :+227 20 73 77 03

· M. BrigiRafini, Premier Ministre, brigi_rafini@yahoo.fr,Cabinet du Premier Ministre BP 893 Niamey, Niger ; Tél : + 227 20 72 26 99, Fax: + 227 20 73 58 59

· M. MarouAmadou, Ministre de la justice, marou_amadou2000@yahoo.fr,Tél : +227 08 00 11 11, Fax : +227 20 72 37 77

· M. BazoumMohamed, Ministre de l’intérieur, Tél. : +227 20 32 32 62, Fax: + 227 20 72 2176

· Directiongénérale des affaires juridiques du Ministère de l'intérieur ; Fax : +227 20 2036 89

· IbrahimYacoubou, Ministre des Affaires étrangères de la coopération, de l’intégrationafricaine et des nigériens à l’extérieur, ibrayac2@gmail.com

· S.E. M. OusmaneAlhassane Abba, Ambassadeur, Mission permanente du Niger auprès de l’Unioneuropéenne, 78 avenue Franklin Roosevelt, B-1050 Bruxelles, Fax : + 32 2 648 2784

· S.E Mme FatimaSidikou, Représente permanente du Niger, Mission permanente du Niger auprès desNations unies à Genève, 23 Avenue de France, 1202 Genève, Suisse. Tél : +41 22979 24 50 – Fax : +41 22 979 24 51

Prière d’écrire également auxreprésentations diplomatiques du Niger dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 27 avril 2018

Merci de bien vouloir informer lObservatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire partenariat de la FIDHet de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Hommevictimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.La FIDH et l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Unioneuropéenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par lasociété civile internationale.

Pour contacter lObservatoire, appeler La Ligne dUrgence :

· E-mail : Appeals@fidh-omct.org

· Tel et fax FIDH : 33 1 43