République démocratique du Congo
12.03.09
Interventions urgentes

Détention arbitraire / Harcèlement judiciaire / Allégations de torture et mauvais traitements

Nouvelles informations
COD 002 / 0209 / OBS 026.3
Détention arbitraire / Harcèlement judiciaire
/ Allégations de torture et mauvais traitements

République démocratique du Congo

12 mars 2009

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir d’urgence à propos de la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC).

Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé par l’Association africaine de défense des droits de l’Homme (ASADHO) de la tenue d'une audience en appel, le vendredi 13 mars 2009, à 9 heures, au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK)[1], au sujet de M. Nginamau Malaba, président de la Centrale congolaise du travail (CCT) du ministère de l’Economie nationale et du commerce extérieur, et de MM. Richard Kambale Ndayango et Israël Kanumbaya Yambasa, deux autres syndicalistes cosignataires du mémorandum déposé par M. Malaba (cf. rappel des faits). Lors de cette audience, le juge devra décider de leur maintien en détention ou de leur libération.

L’Observatoire rappelle que ces trois défenseurs, qui se trouvent depuis le 23 février 2009 au CPRK, sont détenus depuis janvier 2009 de manière arbitraire[2].

Le 26 février 2009, le tribunal de paix de Kinshasa/Gombe avait ordonné leur libération provisoire, mais ces derniers avaient été maintenus en détention suite à l'appel interjeté par le parquet.

L’Observatoire demande la libération immédiate et inconditionnelle de MM. Malaba, Ndayango et Yambasa. L’Observatoire dénonce également les traitements inhumains et dégradants dont aurait fait l’objet M. Malaba, et rappelle que de tels actes sont contraires à la Convention des Nations unies contre la Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et passibles de poursuites individuelles.

L'Observatoire mandate un observateur à l'audience du 13 mars, et appelle la Délégation de la Commission européenne ainsi que les ambassades d'Etats membres de l'Union européenne (UE) à observer ce procès, au titre des lignes directrices de l'UE sur les défenseurs des droits de l'Homme.

Rappel des faits :

Le 19 janvier 2009, M. Nginamau Malaba a été arrêté vers 11 heures[3] par cinq agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR) alors qu’il s’apprêtait à déposer un mémorandum dénonçant le détournement des deniers publics par le ministre de l’Economie nationale et du commerce, et réclamant la rétrocession des bonus des recettes réalisées ainsi que le paiement des primes d’encouragement des fonctionnaires du ministère. MM. Ndayango et Yambasa ont été arrêtés respectivement les 11 et 16 janvier.

Le 19 février 2009 à 9 heures, M. Malaba a été auditionné par le magistrat instructeur Bokango au parquet général de Gombe à Kinshasa après qu’une plainte (n°RMP 3099/PG/BN) eut été déposée par le ministre de l’Economie nationale et du Commerce, M. André Futa. Dès le début de l’audience, l’avocat de MM. Malaba, Ndayango et Yambasa a expressément demandé au magistrat Bokango la libération immédiate des trois syndicalistes, ce qui lui a été refusé au motif que le parquet avait régularisé la détention a posteriori. Le magistrat a également refusé d’examiner la plainte introduite par M. Malaba concernant son arrestation et sa détention arbitraire ainsi que les actes de torture dont il a fait l’objet au cours de celle-ci.

Actions demandées :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités de RDC et de leur demander de :

  1. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Nginamau Malaba, M. Richard Kambale Ndayango et M. Israël Kanumbaya Yambasa et en particulier qu’ils ne soient pas soumis à des actes de torture et de mauvais traitements ;
  2. Procéder à la libération immédiate et inconditionnelle de M. Nginamau Malaba, M. Richard Kambale Ndayango et M. Israël Kanumbaya Yambasa, arbitrairement détenus ;
  3. Garantir l’accès immédiat et inconditionnel à leur avocat, aux membres de leur famille et à tout examen médical requis ;
  4. Mener une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale sur les actes de torture et mauvais traitements dont aurait fait l’objet M. Malaba, dont les conclusions seront rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;
  5. Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme congolais ;
  6. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”, ainsi que son article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;
  7. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la République démocratique du Congo.

Adresses :

  • M. le Procureur Général Mumba, Tél + 243 81 995 67 00
  • M. le Président de la République, S.E M. Joseph Kabila, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Email: upp@ic.cd ; Fax +243 88 02 120;
  • M. le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, M. Antipas Mbusa Nyamwisi, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo.
  • M. le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Mutombo Bakafwa Senda, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax: + 243 88 05 521, Email : minjustrdc@yahoo.fr
  • M. le Ministre des Droits Humains, M. Upio Kakura Wapol, Cabinet du Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax: + 243 12 20 664 ; + 243 9939971 ; Email: min_droitshumains@yahoo.fr
  • M. l’Ambassadeur, M. Antoine Mindua Kesia-Mbe, Mission permanente de la République démocratique du Congo, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, e-mail : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la République démocratique du Congo dans vos pays respectifs.

Paris-Genève, le 12 mars 2009

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du Prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence:
E-Mail : Appeals@fidh.omct.org
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80

Tel et fax OMCT : +41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] L'audience est convoquée par le tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe mais se tiendra dans les locaux du CPRK.

[2] Bien que le magistrat instructeur Bokango affirme avoir « régularisé » leur détention le 19 février 2009 au terme de près d’un mois de détention au secret, ce magistrat ne motive sa décision que sur la base d’une plainte déposée par le ministre de l’Economie et du commerce faisant état de la fabrication d’un faux ordre de mission par « des agents de [son] ministère », dans lequel MM. Nginamau Malaba, Richard Kambale Ndayango et Israël Kanumbaya Yambasa ne sont à aucun moment nommément désignés.

[3] L’Observatoire craint que l’arrestation de M. Malaba par l’ANR ait été réalisée avec le concours des services du premier ministre, car intervenue le 19 janvier, soit à la date du rendez-vous fixé par le directeur du cabinet du premier ministre afin qu’il lui dépose les preuves des accusations portées contre le ministre André Futa.