Hero Indigenous Peoples Joel Redman Guardians Forest 2018 @Joel Redman

Les peuples autochtones

Plus de la moitié des défenseur·e·s des droits de la terre et des militant·e·s écologistes tué·e·s dans le monde en 2018 l’ont été en Amérique latine.

Si des progrès ont été enregistrés dans le domaine de la reconnaissance des droits des peuples autochtones, ces derniers restent confrontés au quotidien à de graves atteintes à leurs droits fondamentaux, un peu partout sur la planète. La liste est longue : agressions, meurtres, disparitions forcées, détentions arbitraires, poursuites pénales, recours abusif à la législation contre le terrorisme, militarisation, état d’urgence, expulsions forcées et dépossession des terres.

Les défenseur·e·s des droits humains des autochtones sont en Amérique latine les premières victimes de persécutions et de violences constituant des actes de torture et des mauvais traitements. Ces violations sont d’autant plus fréquentes lorsque les militant·e·s s’opposent à de grands projets miniers, hydroélectriques, agroindustriels ou forestiers. Toutefois, les intérêts commerciaux ne constituent pas le seul facteur en jeu. Dans cette région où la répartition des revenus et des terres est parmi les plus inégalitaires du monde, la discrimination à l’égard des peuples autochtones est profondément ancrée dans un racisme qui remonte à l’époque coloniale.

La torture est omniprésente. Elle est dans les violences sexuelles et liées au genre faites aux femmes indigènes, elle accompagne les disparitions forcées, elle vient appuyer l’interdiction qu’ont ces peuples d’exprimer leur culture et leurs traditions lorsqu’on les prive de leur liberté. Finalement, c’est l’existence même des communautés autochtones et de leurs coutumes ancestrales qui est remise en cause.

40% des attaques contre les défenseur·e·s des droits humains étaient liées à leur action en faveur du droit à la terre, des peuples autochtones et de l’environnement

Les recherches sur ces actes de persécution et de violence, ainsi que sur leurs conséquences, sont insuffisantes. Beaucoup ne sont même pas signalés. Les membres du Réseau SOS-Torture de l’OMCT, en particulier ceux qui travaillent en Amérique latine, sont bien placés pour le savoir. L’OMCT a réuni, en 2020, 10 spécialistes originaires de huit pays de la région, afin qu’ils/elles se penchent sur ces questions. Ce Groupe de travail de l’OMCT sur les peuples autochtones et la torture effectue actuellement les recherches indispensables pour documenter et analyser les causes profondes, les modes opératoires et les effets multidimensionnels de la torture et des mauvais traitements infligés aux peuples premiers dans la région.

L’un de ses objectifs est de permettre au Comité contre la torture de l’ONU de mieux prendre en compte les problèmes spécifiques relevant de la Convention auxquels sont confrontées les populations autochtones. Les dispositions de la Convention constituent un schéma directeur pour toute politique visant à en finir avec la torture et les autres mauvais traitements, que les tortionnaires soient des agents de l’État ou des acteurs non étatiques. Les expert·e·s indépendant·e·s du Comité peuvent exiger des États qu’ils s’opposent aux persécutions et aux violences constituant de fait des actes de torture ou d’autres mauvais traitements infligés à des peuples autochtones, en prenant des mesures de prévention, en menant des enquêtes, en sanctionnant les auteurs et en garantissant des réparations. C’est là une tâche essentielle, dans la mesure où l’impunité constitue l’un des principaux obstacles empêchant de mettre un terme aux crimes perpétrés contre les populations autochtones.

OMCT Crafting Isla Soledad Mandinga Guna Yala Joel Redman INUTW 2016
Artisanat, Isla Soledad Mandinga (Guna Yala). Ces femmes passent une partie de la journée à confectionner des vêtements artisanaux, dont certains sont vendus aux rares touristes de passage ©Joel Redman-INUTW, 2016