Rapport annuel 2024
06

En quête de justice

En 2024, l'OMCT a fait progresser la justice pour les victimes de torture et de violations des droits humains dans le monde entier.

Tchad

Au Tchad, l'OMCT a soutenu dix victimes du massacre du « Jeudi noir » de 2022 en déposant plainte contre vingt hauts responsables afin de faire pression pour que ces derniers rendent des comptes devant la justice et pour l’ouverture d’enquêtes impartiales.

Burundi

Au Burundi, le Comité des Nations unies contre la torture (CAT) a statué dans l'affaire Epitace Nshimirimana c. Burundi, un cas soumis à l’organe onusien par l'OMCT et Armel Niyongere, membre du Groupe des avocats africains. Dans sa décision, le CAT condamne le gouvernement pour avoir utilisé la torture pour punir des opposant.e.s politiques, marquant ainsi une avancée dans le traitement des violences électorales de 2015.


Afrique de l'Ouest

En Afrique de l'Ouest, la Cour de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a statué sur la disparition forcée de Peter Mensah sous l'ancien président gambien Yahya Jammeh. Elle a conclu que le Ghana avait violé le droit à l'information. L'OMCT a joué un rôle clé en intervenant, pour la première fois devant cette juridiction, et en soumettant un mémoire de soumission d'amicus curiae, lequel met en exergue les obligations de l'État vis-à-vis des proches des victimes de disparitions forcées.

Togo

Au Togo, le Collectif des Associations Contre l'Impunité au Togo (CACIT) a renforcé son travail de contentieux régional en déposant deux plaintes auprès de la CEDEAO concernant le cas de deux mineurs blessés par balle lors d’une intervention policière visant d’autres suspects poursuivis.

Tunisie

En Tunisie, les actions de SANAD, le programme d'assistance directe aux victimes de torture de l'OMCT, ont contribué à l’adoption de multiples décisions contre le ministère de l'Intérieur. Ces décisions l’enjoignent à verser des indemnités aux personnes qui ont été « fichées » et soumises à une série de restrictions arbitraires de leur liberté, conditions de vie qui s’apparentent à de la torture. Eya est une jeune mère qui a été victime de harcèlement policier de manière incessante pendant plus de dix ans : elle a notamment subi des perquisitions à domicile, été arrêtée plusieurs fois dans des lieux publics et a dû faire face à des interrogatoires violents. Avec le soutien de SANAD, elle a fait appel devant le tribunal administratif en décembre 2021. Trois ans plus tard, le tribunal a ordonné la clôture du dossier d'Eya et son indemnisation.

Tadjikistan

Suite aux communications de l'OMCT en 2023, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire (GTDA) a publié les avis 18/2024 et 19/2024. Dans ces décisions, il affirme que cinq défenseur.e.s des droits humains détenu.e.s étaient emprisonné.e.s au Tadjikistan en raison de leur travail de plaidoyer demandant l’ouverture d'enquêtes sur les violences policières contre des membres de la minorité pamiri dans le cadre des manifestations de masse en 2021-2022. Le GTDA a demandé instamment leur libération inconditionnelle.

Thaïlande

En Thaïlande, les victimes du massacre de Tak Bai en 2004 ont, avec le soutien de la Cross Cultural Foundation, partenaire de l'OMCT, intenté un procès contre les responsables d'une répression qui a fait 85 morts parmi les manifestants musulmans malais. L'OMCT a financé les frais de justice, effectué un travail de plaidoyer auprès des autorités et renforcé la visibilité de l'affaire. Aussi, le Comité des Nations unies contre la torture, dans ses observations finales à l'issue de l'examen de la Thaïlande en novembre, a exhorté l'État à veiller à ce que les crimes de torture et de disparition forcée ne soient soumis à aucun délai de prescription. Le Comité a demandé d’être informé d'ici le 22 novembre 2025 sur les mesures de suivi concernant le délai de prescription.

République du Nicaragua

En octobre 2024, le GTDA a adopté un avis dans lequel il caractérise d’arbitraire la détention en République du Nicaragua des défenseurs des droits des peuples autochtones Ignacio Celso Lino, Argüello Celso Lino, Donald Andrés Bruno Arcángel et Dionisio Robins Zacarías. Le GTDA a demandé leur libération immédiate avec d’autres organisations, dont la Cour et la Commission interaméricaines des droits de l'homme, lesquelles ont adopté des mesures de précaution et provisoires l'année dernière.

Indonésia

En 2023, l'OMCT a présenté deux mémoires de soumission amicus curiae en faveur de Fatia Maulidiyanti et Haris Azhar, deux défenseur.e.s indonésien.ne.s des droits humains poursuivi.e.s pour diffamation après avoir dénoncé des pratiques de corruption et des violations des droits humains dans la région indonésienne de Papouasie. Le 8 janvier 2024, le tribunal de district de Jakarta-Est a acquitté Mme Maulidiyanti et M. Azhar après plus de deux ans de harcèlement judiciaire. Le 24 septembre 2024, la Cour suprême indonésienne a rejeté le pourvoi en cassation du procureur, ce qui a entraîné l'acquittement définitif des deux défenseur.e.s des droits humains et la clôture de l'affaire.